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ceste matière, feismes toutes les diligences à nous pos sibles, et par grandes instances soustenismes et attendismes trèslonguement et par longues dilacions. Car jà sont passez trois ans et demy et plus, que ceste prosécucion est commencée, sans ce, comme devant est dit, qu'onques peussions obtenir une seule provision de justice, ne parcevoir par quelles manières justice se voulsist aucunement de ce entremetre. Laquelle chose est et sera doloreuse et misérable, seulement à le oyr réciter, actendu aussi et considerez les grans maulx, dommages et inconvéniens par ce venus en vostre royaume, qui neccessairement adviennent et advenront encores plus grans, si non que ce cas cy n'y soit réparé. Car ainsi que vous povez veoir clèrement, depuis ledit cas et homicide advenu, ce royaume, de inconvénient plus grant en plus grant est passé. Et aussi est-ce le propre droit de faulte de justice, engendrer et nourrir ou multiplier inconvéniens.

« Pour ce, plaise vous de vostre grace, en faisant vostre loial devoir de vostre office, en obéissant à Dieu vostre créateur duquel l'estat de justice procède et directement dépend, et dont aussi vous tenez icelle, et aussi eu regard en pitié au bon maintenement de vostre seigneurie et de vostre règne, vueillez vous exerciter et esveiller et promptement toutes grandes dilacions derrière mises vous exposer à ladicte exécucion de justice. Et de ce en telle et si grande humilité que nous plus povons, vous supplions et resupplions, sommons et requérons très instamment, et par nous et par toutes voies voulons procurer et poursuyr, tant de fait comme autrement, la réparacion dudit homicide et le déshonneur de nostre trèsredoubté seigneur et père,

duquel Dieu ait mercy, auquel de fait ainsi blécié et contempné nous sommes obligez et contrains par droit et sur très grosses et grandes peines y obvier et résister, c'estassavoir sur peine d'encourir nom de diffame, de non estre réputez ses enfans ne à lui appartenir en aucune manière, estre aussi réputez indignes de sa succession, de son nom, de ses armes et de sa seigneurie. Lesquelles peines nous ne voulons ne devons encourir; nous aurions plus cher à soustenir et souffrir mort, comme devroit faire tout cuer noble de quelque estat qu'il soit. Nous vous supplions tant humblement comme plus povons, que à ce et aussi à résister et rebouter sa maligne intencion, laquelle il a contre nous par toutes voies à nostre destruction tendant, vous plaise de vostre grace, vous auxquelz Dieu a fait si grande grace qu'il nous fist naistre en ce monde vos parens et tant prouchains de vostre généracion et comme nepveux vrais de vostre seul frère germain, aider, secourir et conforter vostredit frère de vostre puissance, et à proprement parler vous plaise aider, secourir et conforter vostredit frère, auquel en ceste partie nous déduisons et entendons à déduire la cause. Las! nostre trèsredoubté et souverain seigneur, il n'est si povre homme ne de si bas estat en ce monde ne quelconques autre, à qui si cruellement et tant traitreusement père ne frère feust occis, que lui ou ses parens et amis ne se feissent partie jusques à la mort et qu'ilz ne poursuissent contre ledit homicide qui de plus en plus en l'obstinacion de son cruel faulx et mauvais courage persévère notoirement, et tant que ledit traistre puis naguères vous a osé escripre, et en plusieurs autres lieux notables dire, qu'il a fait mourir

vostre frère, nostre trèsredoubté seigneur et père, que Dieux absoille, bien et deuement. Esquelz lieux à ceste occasion, moy Charles afferme lui avoir menti. Auquel de plus avant respondre je me déporte pour le présent. Car, comme dit est devant, il appert clèrement qu'il est menteur, faulx traistre et desléal, et moy par la grace de Dieu j'ay tousjours esté, suis et seray net, sans reprouche et voir disant. Et pour ce, nostre trèsredoubté seigneur, que les choses dessusdictes furent et ont esté faictes ou grant vitupère et préjudice de vostre personne, de toute vostre royaume et de toute la chose publique, vous supplions tant et si humblement que nous povons, qu'il vous plaise à vous exposer ainsi que de raison faire le devez, à la réparacion de ceste besongne, et nous aider, secourir et conforter par toutes manières à vous possibles, afin que la réparacion de ce cruel homicide puist estre puny ainsi que de raison faire se doit. Et en ce faisant Vous vous acquiterez principalement envers Dieu nostre créateur, et exécuterés justice, de laquelle vous estes chef et souverain, auquel après Dieu nous devons avoir recours. Et afin, nostre trèsredoubté et souverain seigneur, que vous sachiez que le contenu en ces présentes procède de nostre certaine science et voulenté, Nous Charles, Phelippe et Jehan, vos très humbles filz et nepveux, y avons chascun de nous mis nostre seing manuel. Escript à Jargeau, le 1xo jour de juillet mil quatre cens et unze.1 »

1. Le 9 juillet 1411. Le ms. Suppl. fr. 93 et Vérard, datent cette lettre du 10, et le Religieux de Saint-Denis, du 14. Ce dernier, qui la traduit en latin, l'abrége et la tronque considérablement. Il termine par cette réflexion : « J'ai entendu dire à quelques

Lesquelles lectres furent envoiées par ung hérault du duc d'Orléans, à Paris, devers le Roy1. Auquel lieu elles furent visitées en plein conseil, et au long et sur le contenu en icelles furent mises avant plusieurs et diverses opinions et voulentez. Et vouloient les aucuns que les frères dessusdiz fussent oyz en leurs raisons, et que le duc de Bourgongne feust évoqué et contraint de respondre à ce qu'ilz vouldroient dire et proposer contre lui. Mais finablement les besongnes furent prolonguées, et ne purent les dessusdiz avoir aucune response qui leur feust agréable, pour ce que la plus grant partie de ceulx qui gouvernoient le Roy et le duc d'Aquitaine estoient plus favorables au duc de Bourgongne qu'à la partie d'Orléans. Et mesmement lui fut tost après envoiée la copie desdictes lectres, lesquelles par lui veues, apperçeut assez qu'il estoit apparant que iceulx frères d'Orléans lui feroient guerre dedens brief temps. Dont, pour y résister, se pourveut de gens et de habillemens de guerre le plus hastivement que faire le peut, par tous ses pays.

Et tout en la manière que lesdiz d'Orléans avoient escript au Roy, escripvirent à plusieurs princes et bonnes villes du royaume de France, en eulx complai

personnes de savoir et d'expérience, qui lurent ce message d'un bout à l'autre avec la plus extrême attention, qu'il ne contenait que de justes demandes. Seulement elles regardaient comme attentatoire aux lois divines et humaines, et comme du plus mauvais exemple, que le duc d'Orléans demandât justice, non par d'humbles prières, mais les armes à la main, à la tête de son parti et avec l'assistance des ennemis mortels du royaume. » (Chr. de Ch. V1, t. IV, p. 435. Traduction de M. Bellaguet.)

1. La réponse du roi ne se fit pas attendre. Elle est du 20 juillet 1411. Il lui ordonne de désarmer.

gnant, et requérant aide contre ledit duc de Bourgongne. Et pour ce que selon leur entencion, le Roy leur oncle, et son grant conseil, ne leur baillèrent point response aux lectres qu'ilz avoient envoiées telle qu'ilz désiroient, de rechef envoyèrent autres assez semblables, contenans en substance manière de sommacions, donnans à entendre que, si provision ne leur estoit baillée, il convenroit et ne se pourroient déporter de la quérir par autre manière. Et adonc fut par le Roy ordonné, tant à la Royne, au duc de Berry comme autres de grant auctorité et du sang royal, comme du conseil, à quérir moien entre ces deux parties, c'estassavoir d'Orléans et de Bourgongne. Et furent envoiez plusieurs et divers ambaxadeurs de costé et d'autre. Mais finablement on ne les peut accorder, pour ce principalement que le duc de Bourgongne ne vouloit point descendre à faire quelque réparacion, si non ainsi qu'il avoit esté traicté à la paix de Chartres; et se tenoit fier, pour ce qu'il avoit le Roy et le duc d'Acquitaine de sa partie. Les autres, c'estassavoir les enfans d'Orléans, n'estoient point de ce contens. Lesquelz sentoient qu'ilz avoient plusieurs grans seigneurs de leur partie et qui déjà leur avoient promis à donner confort et aide de toute leur puissance contre ledit duc de Bourgongne. Et par ainsi, la Royne et ceulx qui estoient ordonnez de par le Roy à poursuivir les traictiez dessusdiz, voians qu'ilz n'en povoient venir à chef et qu'il leur estoit impossible, selon les demandes et responses des deux parties, de les accorder, délaissèrent ceste matière et firent un certain jour leur relacion au Roy, des devoirs qu'ilz en avoient fais et des responses qu'ilz en avoient eues de chascune partie.

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