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Et dedens briefz jours après lesdiz frères d'Orléans se conclurent de faire guerre mortelle audit duc de Bourgongne et à tous ses aliez, et leur envoièrent leurs lectres de défiance par ung hérault.

CHAPITRE LXXII.

Comment le duc d'Orléans et ses frères envoièrent leurs lectres de défiance au duc Jehan de Bourgongne pour la première foiz, et la teneur d'icelles.

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Charles, duc d'Orléans et de Valois, conte de Blois et de Beaumont, seigneur de Coucy, Phelippe, conte de Vertus, et Jehan, conte d'Angoulesme, à toy Jehan qui te dis duc de Bourgongne. Pour le très horrible meurtre par toy fait en grande trahison, d'aguet appensé, par murdriers affectez, en la personne de nostre trèsredoubté seigneur et père, monseigneur Loys, duc d'Orléans, seul frère germain de monseigneur le Roy, nostre souverain seigneur et le tien, non obstant plusieurs seremens, aliances et compaignies d'armes que tu avoies à lui, et pour les grans trahisons, desloyaultez, deshonneurs et mauvaisetiez que tu as perpétré contre nostredit souverain seigneur le Roy et contre nous en plusieurs manières, te faisons savoir que de ceste heure en avant nous te nuirons de toute nostre puissance et par toutes les manières que nous pourrons; encontre toy et ta desloiaulté et trahison appellons Dieu et raison en nostre aide, et tous les preudommes de ce monde. En tesmoing de vérité, nous avons fait séeller ces présentes lectres du séel de moy Charles, duc d'Orléans des

susnommé. Données à Jargueau' le xvi jour de juillet. >>

Lesquelles lectres receues par ledit duc de Bourgongne et à lui présentées par ung hérault des dessusdiz frères en la ville de Douay', prestement après ce qu'il eut eu conseil sur icelles, rescripvit aux dessusdiz en faisant response telle que cy-après sera déclairée, et les envoya par ung sien officier d'armes devers ledit duc d'Orléans et ses frères.

CHAPITRE LXXIII.

Comment le duc Jehan de Bourgongne rescripvy aux enfans d'Orléans sur les défiances qu'ilz lui avoient envoiées.

<< Jehan, duc de Bourgongne, conte d'Artois, de Flandres et de Bourgongne, seigneur de Salins et de Maslignes, à toy Charles, qui te dis duc d'Orléans, à toy Phelippe, qui te dis conte de Vertus, à toy Jehan, qui te dis conte d'Angoulesme, qui naguères nous avez escript voz lectres de défiances. Faisons savoir, et voulons que chascun sache, que pour abatre les très horribles traysons par très grandes mauvaisetiez et agaiz apensez conspirées, machinées et faictes félonneusement à l'encontre de monseigneur le Roy, nostre trèsredoubté et souverain seigneur et le vostre, et contre sa très noble généracion, par feu Loys, vostre père, en plusieurs et diverses manières, et pour garder vostre père, faulx et desloial traistre, de parvenir

1. Lis. Jargeau.

2. Le 10 août, suivant le Religieux de Saint-Denis. 3. Malines.

à la finale exécucion détestable à laquelle il a contendu à l'encontre de nostre trèsredoubté et souverain seigneur et le sien, et aussi contre sadicte généracion, si faulcement et si notoirement que nul preudomme ne le devoit laisser vivre, et mesmement, Nous, qui sommes cousins germains de mondit seigneur, doyen des pers et deux foiz per, et plus astraint à lui et à sadicte généracion que autres quelconques de leurs parens et subgects, ne devons ungs si faulx et desléal, cruel et félon traistre laisser sur terre plus longuement, que ce ne feust à nostre très grant charge, avons, pour nous acquiter loyaument et faire nostre devoir envers nostre très grant, redoubté et souverain seigneur, et sadicte généracion, fait mourir, ainsi que devoit, le faulx et desloial traistre. Et ainsi avons fait plaisir à Dieu, service loyal à nostre trèsredoubté et souverain seigneur, et exécuté raison. Et pour ce que, toy et tes diz frères voulez ensuivir et ensuivez la faulse trace et desloiale félonnie de vostredit feu père, cuidans venir aux dampnables et desloiaulx fais à quoy il contendoit, avons très grande léesse au cuer desdictes défiances. Mais du surplus contenu en icelles, toy et tesdiz frères, avez menti et mentez faulsement, mauvaisement et desloiaument, comme faulx, mauvais et desloiaulx traistres que vous estes. Et donc, à l'aide de Dieu, qui scet et congnoist la très entière et parfaicte loyaulté, amour et vraie entencion que tousjours avons, et aurons tant que nous vivrons, à nostredit seigneur le Roy et sadicte généracion, au bien de son peuple et de tout son royaume, vous ferons venir à la fin et punicion telle que telz faulx, mauvais et desloiaulx traistres, rebelles, désobéissans et félons comme

toy et tes diz frères estes, doivent venir

par raison. En tesmoing de ce, nous avons fait séeller ces présentes lectres de nostre séel. Donné en nostre ville de Douay, le x1 jour d'aoust l'an mil quatre cens et

unze1. »

Lesquelles lectres ledit duc de Bourgongne envoya, comme dit est dessus, par ung officier d'armes, devers ledit duc d'Orléans et ses frères. Lequel duc fut trouvé à Blois, et eut grand desdaing et desplaisir de la response que lui faisoit ledit duc de Bourgongne. Néantmoins il fist faire assez bonne chère, et après que sur icelles il eut eu délibéracion de conseil, il s'esforça en toutes les manières qu'il peut, d'assembler gens d'armes pour mener guerre audit duc de Bourgongne.

CHAPITRE LXXIV.

Comment le duc de Bourgongne se prépara pour soy défendre contre le duc d'Orléans et ses frères, et des lectres qu'il envoia au duc de Bourbon pour avoir son aide.

En après, le duc Jehan de Bourgongne, quant il ot congnoissance qu'il auroit la guerre au duc d'Orléans et ses frères et leurs aliez, et que les aucuns le eurent défié par lectres et paroles, il se prépara de toute sa puissance pour acquérir amis et aliez pour résister

1. Cette lettre se trouve aussi dans Juvénal des Ursins, qui donne, de plus que Monstrelet, une lettre du duc d'Orléans à la Reine, de la même date. Voy. le Ch. V1 de Godefroi, p. 222.

2. Notre texte omet ici les mots : « à celluy qui les avoit portées,» nécessaires au sens et qu'on lit dans le ms. Suppl. fr. 93. L'omission se trouve aussi dans le ms. 8345.

contre tous ceulx qui mal lui vouloient. Et entre les autres qui le défièrent et dont il fut plus mal content que de nul autre, le défia ung chevalier de Picardie, nommé messire Mansart du Bos', duquel et de sa fin sera plus à plain déclairé cy-après quant temps sera. Si escripvit icellui duc de Bourgongne au duc de Bourbon unes lectres, lesquelles il envoya par son roy-d'armes de Flandres. Dont, du contenu en icelle la copie s'ensuit :

« Très cher et bien amé cousin, duc de Bourbon et conte de Clermont', Jehan, duc de Bourgongne, conte de Flandres, d'Artois et de Bourgongne. Tiengs bien en vostre mémoire comment l'an mil quatre cens et deux, vous et moy feismes et eusmes certaines aliances ensemble, lesquelles furent et ont esté à vostre prière et requeste renouvelées et de rechef jurées et promises en la présence de plusieurs chevaliers et autres gens dignes de foy, et devions demourer vrays, bons et loyaulx et parfaiz amis et aliez durant le cours de nos vies. Et deviez procurer à vostre loyal povoir le bien et honneur de moy, et eschever mon mal et dommage, ainsi que bon parent loyal, à moy alié, est tenu de faire. Et avecques ce, que toutes et quantes fois que je aurai à faire chose qui touche l'onneur et estat de ma personne et de mes seigneurs et amis, vous devez et estes tenu moy aider, conseiller et conforter loyaument, se requis en estes, de corps, d'amis, de conseil de gens et de chevance, envers tous et contre tous, excepté tant seulement la personne de

1. Mansart du Bois.

2. Jean Ier, duc de Bourbon. Il était comte de Clermont par sa mère.

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