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monseigneur le Roy, monseigneur le duc d'Acquitaine et ceulx qui succèderont au royaume de France, et feu beau cousin le duc de Bourbon, vostre père'. Et encores, s'il feust advenu que entre moy et aucuns autres eust eu guerre ou débat et ledit beau cousin vostre père se feust mis en sa personne avecques mon adversaire, vous, en ce cas, vous eussiez peu mectre avec vostredit père tous le cours de sa vie tant seulement, sans par ceste condicion ou excepcion estre préjudicié ou derrogué aucunement ausdictes aliances. Et comme je, aussi vous, estes assez recors, vous avez juré tenir, garder, faire et acomplir les choses dessusdictes et déclairées toutes et quantes foiz que le cas s'y offrera, sur la dampnacion de vostre âme, par la foy et serement de vostre corps sur les sainctes évangiles de Dieu et sur les sainctes reliques par vous touchées. Or est vérité, très cher et très amé cousin, que Charles, qui se dit duc d'Orléans, Phelippe et Jehan, ses frères, me ont nouvellement envoyé lectres de défyance et ont entencion et propos de me grever de toute leur puissance. A quoy, au plaisir de Dieu, j'ay entencion et propos de résister par le bon conseil, confort et aide de noz parens, amis et aliez, et de mes subgetz et bien vueillans, et garder mon honneur encontre eulx. Et pour ce, très cher et très amé, que vous estes à moy alié par la manière dessusdicte, et tenu de moy aider, conseiller et conforter loyaument, je vous requiers et somme, par la vertu desdictes aliances et les seremens que fais avez, comme dit est, qu'en vostre personne, le mieulx que vous pourrez, acom

1. Louis II, dit Le Bon, qui était mort le 19 août 1410.

paigné d'amis et de gens d'armes, me vueillez venir aider, conseiller et conforter loyaument contre les dessusdiz nommez Charles, Phelippe et Jehan, en acquitant vous et vosdiz honneur et serement. Sachant qu'en pareil cas je voudroie garder pareillement mon honneur, ma foy et serement sans les aucunement frauder; et ainsi je espère que vous ferez. Si me vueillez briefment par le porteur de ces présentes lectres rescripre et faire savoir sur ce vostre plaisir et voulenté, ainsi que le cas le requiert. Donné en ma ville de Douay, soubz mon grant séel placqué à ces présentes, le xxi jour d'aoust, l'an mil quatre

cens et unze. »

Lesquelles lectres présentées par icellui roy-d'armes au duc de Bourbon, après qu'il les eut veues et visitées bien au long, fist response au dessusdit roy-d'armes que dedens briefz jours il envoieroit devers son maistre le duc de Bourgongne. Laquelle chose il fist. Car, assez tost après lui renvoya les devantdictes lectres de confédéracion et d'aliances qu'il avoit du duc de Bourgongne, en faisant les convenances nulles, et s'alia du tout avec les Orléanois 1. Dont ledit duc de Bourgongne fut très mal content de lui, jà soit ce que pour lors ne le peut il avoir autre.

1. Il avait toujours penché de ce côté-là, et la mort funeste du grand maître Jean de Montaigu n'avait pas peu contribué à lui rendre le duc de Bourgogne haïssable.

2. Ni Juvénal des Ursins, ni le Religieux de Saint-Denis ne parlent de ce fait important du refus opposé par le duc de Bourbon aux avances du duc de Bourgogne.

CHAPITRE LXXV.

Comment le duc de Bourgongne escripvi et envoia ses lectres au bailli d'Amiens et à ceulx de la loy de ladicte ville, et la teneur d'icelles.

Or est vérité que le duc Jehan de Bourgongne, doubtant que ses amis, aliez et subgetz ne délaiassent aucunement à le servir en ses afaires par le moien et crainte du mandement royal qui avoit esté publié par tous les bailliages du royaume de France, contenant, comme il peut plus plenement apparoir par la copie d'icellui cy-devant escripte, que nul dudit royaume ne feust si hardi de soy mectre sus en armes pour servir les ducs d'Orléans et de Bourgongne, ne nul d'iceulx, pour mener guerre l'un contre l'autre, si escripvi lectres au bailli d'Amiens ou à son lieutenant, au maieur et eschevins dudit lieu et à chascun d'eulx. Desquelles la copie s'ensuit :

<< Très chers et bien aymez. Nous avons entendu de plusieurs, que par le mandement de monseigneur le Roy vous avez défendu généralement à tous subgetz et autres, que nul à nostre instance, ne de noz adversaires, ne se arme. Lesquelles défenses sont faictes de par ledit monseigneur le Roy pour ce qu'il avoit entencion, propos et voulenté de mettre paix et concorde entre nous et noz adversaires. Pour quoy il a plusieurs foiz envoié ses ambaxadeurs et messages espéciaulx, tant devers nous comme devers nosdiz ennemis; auxquelz nous avons tousjours respondu comme féables, vrais et loyaulx subgetz et serviteurs dudit monseigneur le Roy, et tant que Dieu mercy

toutes les responses qui ont esté faictes ont esté tendans à bonne paix et union, et lui ont esté plaisans et agréables. Mais noz adversaires et ennemis, en continuant leur mauvais, dampnable et desloyal propos et voulenté, laquelle ilz ont tousjours eue et ont encores vers monseigneur le Roy et sa noble généracion et le bien de son royaume, ont fait tout le contraire et ont tousjours respondu en dissimulant et prolonguant le temps soubz feintes, faulses et mauvaises couleurs, durant le temps que ma trèsredoubtée dame madame la Royne, nostre trèscher oncle et seigneur monseigneur le duc de Berry, et nostre trèscher frère monseigneur le duc de Bretaigne, qui se sont mis ensemble par l'ordonnance et bon plaisir de monseigneur le Roy à trouver et quérir aucun bon moien de bonne paix entre nous et noz adversaires, ces faulx et desloiaulx traistres, rebelles et inobediens, Charles, qui se dit duc d'Orléans, et ses frères, qui nous ont envoyé leurs défiances et qui, devant icelles, se sont plusieurs foiz efforcez desloialement et traistreusement contre leur serement, nous ont diffamé, dommagé et deshonnouré, et, ce tant de fait comme autrement, pourchacié. Laquelle chose, au plaisir de Dieu, n'est point en sa puissance, ne ne sera se Dieu plaist, qui scet et congnoist l'entière et parfaite loyaulté que nous avons et aurons tant que nous vivrons à nostredit seigneur le Roy, à sa généracion et au bien de son royaume, pour lequel nous avons et voulons tousjours mectre cuer, corps, finances, puissance et tout ce généralement que Dieu nous a donné, et pour lequel nous feismes et commandasmes estre fait tout ce généralement que nous feismes, sans avoir autre regard. Et ne sommes diffamez, ne dom

magez en corps ne en biens, en honneur ou autrement amendris par si faulx, mauvais et desloyaulx traistres, rebelles et inobédiens à nostredit seigneur le Roy, ainsi que sont les devantdiz Charles et ses frères, qui sont venus et yssus de si faulx, mauvais et desloial traistre comme a esté leur père, ainsi qu'il est tout notoire et commun par tout le royaume. Et vraiment nous tenons que onques ne fut l'entencion de nostre seigneur le Roy de vouloir empescher que tous noz bons parens, amis, aliez, subgetz, serviteurs et bien vueillans loisiblement et raisonnablement ne puissent venir à nous acompaigner et servir contre nosdiz adversaires à garder nostre honneur et icelle maintenir et défendre avecques nosdiz subgetz. Pour ce, nous vous prions et requérons tant et si affectueusement comme nous povons, qu'il vous plaise, noz bien vueillans et amis quelzconques demourans en vostre bailliage et tous autres alans et passans parmy, laisser franchement venir à nous et en nostre service sans à eulx donner ne souffrir estre donné par quelque manière que ce soit aucun empeschement, en corps ou en biens. Et vous povez tenir seurs et acertenez que tout ce que nous avons en entencion et propos de faire, est et sera pour le bien et seureté de monseigneur le Roy, de sa généracion et de tous son royaume, et à la confusion et destruction de ceulx qui sont et ont esté envers lui faulx, mauvais, desléaulx, traistres rebelles et inobédiens. Et s'il est chose qui vous plaise que puissions faire, signifiez le nous et nous le ferons de très bon cuer. Très chers et bons amis, le SaintEsperit vous ait en sa saincte garde. Escript en nostre ville de Douay, le xi jour d'aoust. »

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