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autres besongnes qu'ils portoient. Et les autres se saulvèrent où ilz porent le mieulx. Après laquelle destrousse toutes icelles besongnes furent par icellui bailli envoiées à Paris devers le Roy et son grant conseil, closes et seellées, en ung sac de cuir. Et pour icelles veoir et visiter, le premier mercredi après le jour de Pasques', le Roy estant en personne en son hostel de Saint-Pol et tenant son conseil, ouquel estoient le roy de Cécile, les dues d'Acquitaine et de Bourgongne, les contes de Charrolois, de Nevers et de Mortaigne, messire Giles de Bretaigne, le chaucellier de France, c'estassavoir maistre Henry de Marle2, les évesques de Tournay, d'Amiens, de Constances et d'Aucerre, le recteur de l'Université, le prévost de Paris et plusieurs autres tant du conseil du Roy, comme les bourgois de la ville et les clercs de l'Université, fut proposé par le chancelier du duc d'Acquitaine, c'estassavoir le seigneur de Dolehaing, naguères advocat en parlement et licencié en lois, comment naguères lui avoit esté baillé en garde par l'ordonnance du Roy et de son conseil, ung sac de cuir ouquel estoient plusieurs lectres et papiers qui avoient esté trouvez et prins par le bailli de Caen en la compaignie d'un chevalier, chambellan du duc de Bretaigne, de Foucon d'Encre, de frère Jaques Petit, de l'ordre Saint-Augustin, et autres ambaxadeurs des seigneurs dessus

1. Le 6 avril 1412.

2. Henri de Marle n'était pas chancelier de France, mais président au Parlement. Le chancelier était Eustache de Laistre, comme on l'a vu plus haut.

3. Florent d'Encre, chevalier, chambellan du duc de Bourgogne (La Barre, p. 126),

nommez, lequel sac, comme dit est, avoit esté envoyé par ledit bailli. Et récita ledit chancellier d'Acquitaine, comment en icellui sac avoit trouvé quatre blans seellez de quatre grans seaulx et signez de quatre signes manuelz, c'estassavoir de Berry, d'Orléans, de Bourbon et Alençon, et en chascun blanc estoient leurs noms escrips dessus leurs seaulx en marge, et n'y avoit point autre chose escript. Et aussi avoit-on trouvé plusieurs lectres closes de par le duc de Berry adrécans au roy d'Angleterre, à la royne et à leurs quatre filz, et pareillement au duc de Bretaigne, au comte de Richemont et à autres grans seigneurs d'Angleterre. Si y avoit plusieurs autres lectres èsquelles point n'y avoit de suspicion, qui toutes estoient de crédence pour les dessusdiz Faulcon et frère Jaques Petit, adrécans audit roy et à la royne, lesquelles furent là leues publiquement. Et nommoit, le duc de Berry, le roy d'Angleterre « mon très redoubté seigneur et nepveu, » et la royne « ma très redoubtée et honnorée dame niépce et fille, » et estoient signées de la propre main du duc de Berry, et en celles de la royne avoit escript deux lignes de sa main portant crédence sur les devant diz. En oultre là furent, présens le Roy et ses princes et tout le conseil, monstrez les blans seellez dessusdiz, et les tint le Roy en ses mains. Et si y avoit ung petit codicile par manière de libelle contenant une feuille de papier, ouquel estoit l'instruccion desdiz ambaxadeurs ; et fut leu publiquement. Et estoit contenu dedens comment ilz réciteroient les proposicions faictes par la duchesse d'Orléans et ses enfans contre le duc de Bourgongne pour la mort du duc d'Orléans. Réciteroient aussi comment, pour icelle mort, ilz avoient

plusieurs foiz sommé et requis le roy de France à faire et avoir justice de ladicte mort, laquelle ilz n'avoient peu obtenir, pour tant que ledit duc de Bourgongne avoit tellement séduit et enhorté le Roy et son conseil, disant que le duc d'Orléans estoit faulx, et en avoit ledit duc de Bourgongne séduit le peuple et par espécial cellui de Paris, et comment les dessusdiz vouloient déposer le Roy de sa couronne et destruire sa généracion; lequel aussi estoit faulx et à quoy n'avoit onques pensé. Et si y estoit aussi, que le duc de Bourgongne avoit mis en indignacion devers le Roy, Jelian, duc de Bretaigne, pour cause de ce qu'il avoit rompu le voiage de Calais et plusieurs autres choses que le duc vouloit faire contre le roy d'Angleterre. Et comment ledit duc de Bourgongne avoit tellement séduit le peuple de Paris contre le Roy et son filz le duc d'Acquitaine, que tout entièrement estoit gouverné par leurs mains, et devers eulx estoient en telle subjection que à peine osoient ilz dire mot. Et aussi comment ceulx de Paris, soubz une bulle donnée par Urbain, pape quint de ce nom, pour les grans compaignes qui estoient venus en France, les dessusnommez et leurs aliez contre raison avoient fait dénoncer excommeniez. Et comment ils avoient contraint l'official de Paris par grant force à faire procès contre eulx afin qu'ilz feussent excommuniez, agravez, réagravez et renforcez. Et après ce que lesdiz ambaxadeurs se gar

1. Les bulles fulminées par Urbain V contre les Grandes compagnies sont au nombre de dix. La première est du 27 juillet 1364, et la dernière du 10 février 1369. Celle qui commence par les mots : Quam sit plena periculis fut vidimée par le pape Jean XXIII, le 15 juin 1413, et par le Roi, dans le même mois.

dassent bien de eulx descouvrir à homme d'Angleterre, s'ilz ne sentoient qu'ilz feussent de la bende des dessusnommez. Et quant ilz auroient dit au roy d'Angleterre ce que dit est dessus, si lui deissent qu'ilz avoient à parler à lui à part, c'estassavoir que ceulx de Berry, d'Orléans, de Bourbon et d'Alençon vouloient du tout en tout son bien et son honneur et eulx alier avecques lui, le aider et conforter contre le duc de Bourgongne et ses aliez, et aussi contre ceulx de Gales et d'Irlande. Et si lui deissent oultre que ou cas qu'ilz ne pourroient venir à leur conclusion contre les Escossois, et que si, et en cas encores qu'ilz ne pourroient obtenir ne faire leur voulenté, ilz feroient tant que la paix seroit faicte entre lui et le roy de France. Et oultre lui deissent que, ou cas qu'ilz ne pourroient obtenir que s'il y avoit aucunes terres sur la mer ou ilz voulsissent faire aucunes demandes, ou ilz prétendent aucun droit, qu'ilz feroient tant qu'ilz seroient contens. Et lui deissent encores comment, par défaulte de justice, ilz venoient devers lui pour avoir raison de la mort du duc d'Orléans, et comment à roy, par le nom qu'il porte, lui appartient de faire et aider justice, et que ce seroit à lui et aux siens ung très grant bien et honneur perpétuel, à lui faire et bailler aide, mesmement de tant noble sang comme estoit le duc d'Orléans. Et si lui deissent que tous les dessusnommez le serviroient de tout leur povoir, lui et ses enfans, et aussi les siens, ou temps avenir. Laquelle chose ilz porroient bien faire contre tous les plus puissans et les plus nobles de ce royaume de France. En oultre, pour avoir aide contre ledit duc de Bourgongne, requeissent lesdiz ambaxadeurs audit roy d'Angleterre d'avoir trois cens lances

et trois mille archers, lesquelz on paieroit pour quatre mois'.

Et après fut monstré par ledit chancelier d'Acquitaine ung petit advisement, lequel ledit frère Jaques Petit avoit fait sur le gouvernement de ce royaume, contenant plusieurs articles; et fut leu publiquement. Entre lesquelz estoit que sur ung chascun arpent feust imposé ung aide qui seroit nommé Fons de terre. Et que pareillement qu'on a greniers à sel en ce royaume, on ait aussi greniers à blé et d'avoine, au prouffit du Roy. En oultre que toutes les maisons ruineuses et terres inutiles feussent réparées et cultivées, ou autrement feussent forfaites et acquises. En oultre que tout homme qui ne seroit noble feust contraint à ouvrer et labourer, ou qu'il soit bouté hors du royaume. Et aussi que en ce royaume ne ait qu'une mesure et ung pois. Item, que les duchez de Luxembourg et de Lorraine feussent conquestées, et aussi les contez de Prouvence et de Savoye. Item, que l'Université soit

1. Walsingham parle dans deux de ses ouvrages (Brev. hist., p. 425, Ypodigma Neustrix, p. 178) de cette négociation du parti Orléanais avec l'Angleterre. Il dit que le roi Henri IV envoya au duc d'Orléans, Thomas, duc de Clarence, Édouard, duc d'York, et Thomas, comte de Dorset, et que les Anglais, ne trouvant pas le duc d'Orléans à son rendez-vous, commencèrent à ravager les terres de leurs nouveaux alliés; mais qu'enfin, après une entrevue du duc de Clarence et du duc d'Orléans, les Anglais consentirent à aller prendre leurs quartiers d'hiver dans l'Aquitaine. Comme restait alors auprès du duc de Bourgogne une partie des troupes que lui avait amenées le comte d'Arondel, notre auteur en prend occasion de faire cette réflexion sur la politique à double face suivie alors par les Anglais. Unde succrevit multis admiratio, qualiter tam repentina facta sit mutatio, ut sub temporis tantilli spatio contingeret Anglos velut duo contraria confovere.

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