ページの画像
PDF
ePub

mise hors de Paris, et qu'on en feist une nouvelle, pleine de preudommie 1.

Item, et y avoit plusieurs roles lesquelz ne furent point leuz, pour ce qu'ilz ne servoient de guères.

Et après ce que ledit chancelier eut récité ce que dit est, le prévost des marchans de Paris et les eschevins firent faire deux requestes au Roy par ung religieux de l'ordre Saint-Benoist, docteur en théologie. L'une, si fut qu'il pleust au Roy donner et octroier à ladicte ville de Paris la tierce partie des aides cueillies et levées en ladicte ville en la forme et manière qu'ilz avoient du temps du roy Charles, dont Dieu ait l'âme, à convertir et mettre seulement ès réparacions de ladicte ville et de la rivière. Et récita le prévost des marchans qu'il en estoit grant necessité et que c'estoit le bien du Roy et de sa bonne ville, et qu'il estoit très grant necessité d'icelle réparer. Et mesmement que les devantditz de Berry, d'Orléans, de Bourbon et d'Alençon l'avoient en hayne. Et récita oultre comment la ville de Tournay est la ville de tout ce royaume la mieux réparée et en bonne ordonnance mise, pour ce que ceulx de ladicte ville prennent retenue à le réparer et fortifier, et que si tous les ennemis de ce royaume estoient devant, ilz ne lui feroient jà nul mal. L'autre requeste fut qu'il feust recommandé au chancelier de France qu'il scellast les lectres d'une office donnée ou à donner vacant par ung Orléanois sans ce qu'on y mist opposicion, lesquelles on ne vouloit sceller. Auxquelles deux re

1. Ce détail touchant le plan de gouvernement du jacobin est d'autant plus précieux que Monstrelet est le seul auteur qui en parle.

questes fut dit que le jeudi ensuivant ilz auroient response.

En oultre requirent ledit prévost et eschevins audit chancellier de France, qu'il monstrast au Roy les lectres qui estoient venues à la congnoissance du duc d'Acquitaine, faisant mencion comment lesdiz de Berry, d'Orléans et d'Alençon vouloient faire ung nouvel roy et despoincter le Roy et le duc d'Acquitaine. Lequel respondi qu'il n'avoit fait relacion pour le présent, si non des lectres qui estoient oudit sac, et qu'il estoit vray qu'il avoit veu ces lectres et plusieurs autres faisans mencion de ce. Et certifia ledit d'Acquitaine au Roy, publiquement, que le grant maistre d'ostel, c'estassavoir sire Guichard Daulphin, chevalier, avoit escript audit duc de Bourgongne comment les dessus nommez de Berry, d'Orléans, de Bourbon et d'Alençon avec leurs autres aliez, estoient naguères tous assemblez à Bourges la cité, et là avoient renouvelé leurs seremens, en concluant de destruire le Roy et le duc d'Acquitaine, le royaume de France et la bonne ville de Paris, ou ilz seroient destruis en ce faisant. Et lors le Roy de son propre mouvement moult fort pleurant dist et respondi. « Nous voions bien leur mauvaistié, pour quoy nous prions et requérons à vous tous qui estes de nostre sang que vous nous vueillez aider et conseiller contre eulx, car il nous touche et à vous aussi, et à tout nostre royaume.»> Et pareillement en pria et requist à tous les autres là estans. Et adonc le roy Loys se leva et se mist à genolz devant le Roy et lui dist: «Sire, pour le bien et honneur de vous et de vostre royaume, je vous supplie qu'il vous plaise ceste besongne diligemment solliciter,

car il en est grant neccessité. ». Et pareillement s'agenoillèrent les ducs d'Acquitaine et de Bourgongne et tous les autres seigneurs, et se offrirent à servir le Roy de toute leur puissance. Et après toutes ces besongnes ainsi dictes et proférées, et que le conseil fut finé, toutes les matières dessusdictes furent publiées et divulguées parmy Paris, et à plusieurs baillées par escript. Dont plusieurs gens furent moult esmerveillez.

CHAPITRE LXXXVIII.

Comment Loys duc en Baviere, frère de la Royne de France, fu débouté de la ville de Paris, et depuis ses gens destroussez du cardinal de Cambray. Et la défense du roy d'Angleterre.

ce,

Item, en ces mesmes jours, Loys duc en Bavière, frère de la royne de France, estant à Paris, fut souspeçonné par les Parisiens d'avoir aucunement dit en secret au Roy et au duc d'Acquitaine aucunes paroles à la faveur des ducs de Berry et d'Orléans. Et pour doubtans que ce ne leur portast aucun préjudice ou dommage, sachans que iceulx les avoient en grant hayne, s'assemblèrent un certain jour en grant nombre, et de fait dirent audit duc en Bavière, qu'il estoit de la partie des dessusdiz ducs, et qu'ilz n'estoient point bien contens de lui; disans oultre, que puis qu'il vouloit estre de leur aliance, il s'en alast avecques eulx. Ausquelz fut respondu par icellui duc Loys en soy excusant, qu'il n'avoit vouloir de tenir autre partie que celle du Roy. Si demoura la besongne pour le présent en cest estat. Mais bien perceut qu'ilz n'estoient point bien contens de lui. Et pour ce, doubtant

qu'il n'eust aucun inconvénient, s'en ala secrètement au chastel de Marcoussis'. Mais avant son département fist charger, audit lieu de Paris, un chariot de ses meilleures bagues, avecques sa vaisselle et autres joyaulx, lesquelz en la compaignie de quatre gentilz hommes de son hostel, dont l'un estoit aagé de seize à vingt ans, bien noble homme de son pays d'Alemaigne, et aucuns varlets, fist partir pour le mener en la ville de Valenciennes, ouquel lieu il avoit entencion de aler tantost après. Mais ainsi que iceulx faisoient leur chemin pour aler où il leur estoit ordonné, advint que aucuns tenans le parti du duc de Bourgongne, meuz et pleins de grant convoitise et de grant cruaulté, c'estassavoir le bailli de Fouquencourt, Jacotin son frère, et Jaques de Braquencourt, et autres en leur compaignie, dont la plus grant partie estoient des marches de Picardie, sachans le partement dudit chariot et qu'il estoit ainsi furny de biens, et par la séduction de messire Morelet de Bétencourt, poursuivirent les dessusdiz et les rataingnirent entre la rivière d'Oise et celle de Somme. Si les envayrent soudainement, et sans y trouver aucune défense, en mirent à mort la plus grant partie. Et après prindrent tous les biens dessusdiz et le jeune escuier dont dessus est faicte mencion, et s'en vindrent tous loger en une abbaye de nonnains nommée Frémi, emprès la cité de Cambray. Ouquel lieu quant ilz y eurent esté deux ou trois jours, prindrent par nuit icellui jeune escuier et le menèrent hors de l'abbaye, et le occirent très inhu

1. Ce château, lors de la confiscation du grand-maître Jean de Montaigu, avait été donné à Louis, duc de Guienne, qui lui-même le donna à Louis de Bavière, par lettres du 3 décembre 1409.

mainement et puis le gectèrent en ung fossé plein d'eaue, et après ce qu'il fut mort, comme dit est, lui percèrent le corps d'un pieu de bois pour le atacher au fons du fossé, et en cest estat fut trouvé certain temps après par les varlets et famillers d'icelle abbaye, et de là fut porté et mis en terre saincte ou pourpris d'icelle église. Et depuis il y fut fait très noble service pour le salut de son âme, à la prière et despense d'aucuns de ses amis, qui en firent moult grant clameurs et lamentacions quant ilz en furent advertis. En oultre, les dessusdiz malfaicteurs firent fermer en queues' grant partie des biens dessusdiz et les mirent en l'ostel dudit Cambray, ouquel ils avoient accointance, et se partirent du pays de Cambrésis pour aler en autres lieux où ilz avoient à faire. Laquelle besongne venue à la congnoissance dudit Loys de Bavière, fut tant dolent que plus ne peut, et par espécial de la mort dudit jeune filz et de ses autres gens, et aussi de la perte de ses biens. Si en fit grant complainte au Roy et au duc d'Acquitaine, et aussi au duc de Bourgongne, à qui les dessusdiz se disoient. Lequel duc de Bourgongne lui promist à lui faire restituer, et de pugnir lesdiz malfaicteurs. Et aucun peu de temps après, icellui duc Loys se parti de Marcoussis, et fut conduit par l'ordonnance du Roy et du duc de Bourgongne et du vidame d'Amiens, très bien acompaigné, jusques

1. C'est à-dire renfermer dans des tonneaux. Il est question dans un registre du parlement de cette époque de pièces de procès entassées dans des queues et envoyés ainsi aux Grands-Jours de Troyes.

2. Il y a ici deux mots de passés. Il faut lire en l'ostel d'un bourgois dudit Cambray, comme au ms. Suppl. fr. 93.

« 前へ次へ »