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Bouillon veut Sédan; et serois-tu si enragé que de contribuer à donner vne entrée seure aux ennemis uager la Champagne par leurs courses et venir iusqu'à tes portes quand l'enuie leur en prendroit ? Le Coadiuteur veut se venger de ce qu'on a rabattu le vol trop hautain qu'il prenoit, voulant ioindre le commandement temporel au spirituel, c'est à dire le gouuernement de Paris à l'Archiepiscopat. Ce sont là les arboutans qui appuyent ta désobéissance. Le motif de leur mescontentement est parce qu'ils veulent des places. Cependant si ie ne me trompe, il me semble que le Cardinal, qu'ils deschirent et noircissent tant, n'en a aucune, et qu'il s'en est deffendu tousiours aussi viuement que les autres les ont recherchées. Ie vois bien qu'il a sceu contribuer à accroistre le royaume de places et de Prouinces entières; mais il n'a sceu encore donner les mains à prendre aucun establissement pour luy; et il fait voir vn exemple de modération iusqu'à présent incogneu dans cet estat qu'vn premier Ministre, après six ans d'heureuse administration, ne se treuue auoir ny charge de la Couronne, ny gouuernement de Prouince, ny place, ny autre bien que quelques Abbayes pour soustenir sa dignité. Cependant ie remarque que ceux qui sont si emportez contre luy, et qui trauaillent tant à animer les peuples, n'en ont autre suiet que la fermeté qu'il a eue à ne pas conseiller au Roy qu'il se laissast despouiller de son authorité et de ses places. Ie considère aussi qu'il n'a iamais fait mal à personne qu'aux ennemis de la France; et sans cette douceur qui luy est naturelle, tu ne verrois

beuf, Gouuerneur de la Prouince de Picardie, dont cette ville dépend, donneroit ordre à la seureté de ladite place, selon qu'il verroit en estre besoin., Le Courrier françois, etc. [830] 11° arrivée.

pas auiourd'huy ny le Duc de Beaufort, ny le mareschal de La Mote à la teste de tes troupes rebelles. Enfin, peuple abusé, dessille tes yeux. Ceux qui ont le principal intérest au bien de l'Estat, te monstrent assez ce que tu dois faire. Tu ne sçaurois faillir de marcher dans le chemin où tu vois le Duc d'Orléans si auant engagé, si constant et si zélé, où tu vois le Prince de Condé le seconder de tout son pouuoir. Il faut bien que les Conseils du Cardinal soient bons, puisque ces deux personnes-là les approuuent. Crois-tu, quand le Cardinal seroit esloigné, que le Duc d'Orléans et le Prince de Condé, qui ont exposé si gayement leur vie pour releuer l'authorité Royale et la gloire de nos armes, voulussent iamais donner les mains à la ruine de l'Estat et receuoir la loy de quatre hommes du Parlement qui, pour se rendre les maistres, prétendent de renuerser tous les fondemens de la monarchie? Considère combien l'estat où tu te trouues, est différent de cette opulence qui t'a rendue la ville du monde la plus heureuse. Prends garde à ce qu'est deuenu ton commerce; que tu es à la veille de crier à la faim; qu'il n'y aura plus de rentes payées; que tu vas tomber en vne entière désolation; que ta grandeur est ta foiblesse; que tu es desià exposée à la mercy et au pillage de la canaille et des vagabons; qu'on te saignera de tous costez iusqu'à l'agonie; que tu entretiendras les deux partis à tes despens; que les troupes dont tu prétends tirer ta deffense, te rongeront elles mesmes iusqu'aux entrailles; mais considère plus que tout cela que pour plaire aux factieux du Parlement, tu te iettes dans la rebellion; que tu prends les armes contre le Souuerain que Dieu t'a donné, et que tu cours risque de perdre son amour et peut-estre ton bonheur. Le Désintéressé à Paris.

A qui ayme la vérité [8] '.

(11 février 1649.)

Le Parlement veut despouiller le Roy de son authorité pour s'en reuestir. Les Princes qui se sont vnis au Parlement, voudroient bien s'accommoder de son bien et de ses places'.

Et vous, pauures Bourgeois de Paris, sacrifiez vostre repos, hazardez vostre vie, vuidez le fonds de vos bourses, vous réduisez à la faim, prenez les armes contre vostre Roy et ne trauaillez qu'à vostre ruine pour apuyer, sans le sçauoir, les iniustes prétentions des vns et des autres. C'est bien se tourmenter pour se rendre criminels et malheureux toute vostre vie, quoy qu'il arriue; car ou le Roy demeurera le maistre, comme il y a grande apparence, et si auant cela vous ne réparez vostre crime, et ne regaignez son affection par quelque marque de la vostre, il vous fera seruir, vous et vos familles, d'exemple à la postérité par vn chastiment mémorable de la rébellion que vous commettez; ou le Parlement et les Princes auront le dessus (ce qui fait horreur, seulement à le penser, à tout bon François), et au lieu d'vn Roy, d'vn légitime Souuerain qui vous chériroit auec tendresse et ne songeroit qu'à vostre soulagement et à vous rendre heureux, vous aurez quatre cens tyranneaux qui vous deschireront et vous opprimeront de mille taxes, comme ils ont desià commencé; et vostre opiniastreté n'aura seruy

' Second billet de Cohon, distribué par le chevalier de La Valette. 2 Voyez plus loin les Demandes des princes et généraux, etc. [997).

qu'à allumer et nourrir vne guerre ciuille qui rendra la France la proye de ses ennemis, et changera vostre ville, la plus belle du monde et la plus heureuse, en vn théâtre d'horreur et de misères.

Le Cardinal est vn meschant homme parce qu'il n'a pas voulu consentir à la destruction de la Royauté, où aucuns du Parlement visent pour gouuerner eux mesmes. C'est vn perturbateur du répos public parcequ'il n'est pas d'accord de contenter Nouion, Blancmesnil, Viole, Broussel et autres, ny les Princes dans ce qui leur estoit venu à la teste de prétendre. Il trouble le Royaume, luy qui a incessamment trauaillé et auec force à le conseruer en tranquillité pendant toute la Régence, et à la procurer au dehors. Il n'a, ny luy ny aucun de ses parens, place, ny charge, ny gouuernement, ny establissement; et c'est vn ambitieux, vn intéressé, vn perfide. Les autres prétendans n'ont rien contribué comme luy aux conquestes qui ont esté faites, et ne laissent pas de demander les meilleures places du Royaume et des grâces qu'ils n'ont point méritées.

Le Cardinal s'entend auec les Espagnols pour trahir l'Estat, pour les en rendre maistres. Il faut qu'il soit bien habile et qu'il les dupe bien finement de conseruer ainsi leurs bonnes grâces lorsque le Royaume s'accroist, toutes les années, de places et parfois de Prouinces entières à leurs despens. Si le bon Dieu nous assiste tousiours de Ministres si meschans, nous mettrons bientost en chemise le Roy d'Espagne de son consentement.

Le Cardinal est vn cruel, vn violent, vn sanguinaire. Cependant on voit la Bastille remplie depuis quinze iours de plus d'Officiers et seruiteurs du Roy qu'elle n'a esté de meschans et de criminels dans les six années de la Ré

gence; où ie ne sçay pas qu'il y ait eu autre sang répandu que celuy d'vn Italien qui donnoit des aduis aux Espagnols.

Le Cardinal est vn Croesus, vn voleur de deniers publics; il a englouty tout l'argent de France. Cependant nous aprenons qu'il n'a pas de quoy viure, et que sa Maison est tous les iours sur le point de renuerser. Il faut qu'il soit bien cruel à soy mesme de ne mettre pas ses trésors au iour dans cette occasion où il va du tout pour luy, et où il ne luy seruiroit de rien de les auoir sauuez s'il se perdoit1.

Enfin, les autres mettent tout s'en dessus dessoubs, font prendre les armes au peuple contre leur Roy. Cependant ils ne sont ny perturbateurs, ni meschans, ny gens qui se remuent pour autre intérest que pour le bien public. Pauure peuple, dessille tes yeux! Permettras tu d'estre sacrifié pour des intérests particuliers de nulle considération, et de plus pour des gens qui se mocquent de toy dans le temps mesme que tu sers à leurs fins? Ne sçais tu pas que ces braues Princes, passementez et brodez à tes despens, boiuent tous les iours, l'vn et l'autre, à la santé des badaus de Paris? L'vn d'eux disoit, il y a quelques iours, qu'il falloit prier Dieu qu'ils fussent longtemps dupes; l'autre, que c'est faire vne guerre bien commode d'auoir beaucoup d'argent, coucher dans de bons draps et ne se battre point. Où sont ces deux cens mil hommes qui deuoient sortir pour engloutir d'vn morceau les troupes qui t'affament ? Pour toutes les taxes qu'on a faites sur toy, dont le Roy auroit pu leuer cent mil hommes, qu'as tu encore que deux mil meschans

On peut lire à ce sujet une curieuse anecdote dans la Lettre d'vn secrétaire de saint Innocent, etc., qui suit.

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