ページの画像
PDF
ePub

donner le calme, et que d'ailleurs le Parlement ait contentement, tant pour luy que pour les peuples et les Princes qui le protègent. Il n'y a personne qui doute que ceux qui se sont rangez de son party, ne l'ont fait qu'en considération du repos public et de l'auersion qu'ils ont pour le mauuais Ministère. Le rang que les Princes vnis tiennent à la cour, ne leur permet pas de penser à vn changement d'Estat, comme ceux de Sainct-Germain publient. Ils ne peuuent prétendre au dessus de ceux qui tiennent le party des Ministres, comme aussi ils ne peuuent estre plus bas qu'au second lieu; tellement que la Reyne peut dissiper tous les orages qui s'en vont fondre sur elle, en donnant satisfaction au Parlement et aux Princes. Que si elle suit ses mauuais conseillers, elle met le Royaume en vn danger imminent, et l'expose en proye. Quand l'on s'embarque en de semblables affaires, l'on n'en voit point les issues. Il n'y a que Dieu seul à qui tous les momens sont présens, qui les connoisse. Tout ce que la prudence humaine nous enseigne, est de préuenir les mal-heurs tant que nous pouuons, et de ne nous pas engager en haute mer, quand nous voyons la tempeste qui s'appreste. La Reyne défuncte fournit d'vn puissant exemple, pour faire appréhender à la Reyne Regente pareil traitement qu'elle a receu. Cette leçon luy deuroit estre utile, et luy apprendre, que quand le Roy sera maieur, il peut auoir vn Ministre semblable au Cardinal de Richelieu, qui luy pourra faire souffrir les mesmes rigueurs qu'il fit souffrir à la défuncte. Et si cela est, à qui aura-t-elle recours? aux Ministres d'auiourd'hui ? c'est vne folie de croire qu'ils subsistent, quand par impossible on les lairroit en France iusques à ce temps là. Il n'y a point d'enfant qui ne soit bien aise de

sortir de dessous la férule de ses maistres; et quelque traitement que fasse le Cardinal au Roy, qu'il tasche d'obséder par des charmes de libertinage et de contentement, quand il sera capable d'agir de luy mesme, ce sera le premier dont il se défera; ioint que dès à présent il est très mal en son esprit, et que bien qu'il n'y ait que ses émissaires auprès de luy, ils ne sçauroient empescher qu'il ne tesmoigne le mescontentement qu'il en a, et le peu de plaisir qu'il prend à entendre parler des défaites imaginaires des troupes Parisiennes, qu'on publie incessamment à ses oreilles. Aura-t-elle les Parlemens et la Iustice de son costé? elle ne le peut espérer, puisqu'elle contribue de toutes ses forces à les destruire. Sera-ce point les peuples? hélas, elle en est bien éloignée! l'affection qu'ils ont eu pour elle, quant ils l'ont veue dans l'oppression d'vn insolent Ministre, s'est changée en vne estrange auersion; ouy en auersion, si ie l'ose dire, puis qu'au lieu du soulagement qu'ils espéroient d'elle, ils ne voyent que des surcharges d'oppression de sa part, et que comites à leurs portes qui les traittent comme des forçats.

le crois avoir suffisamment montré que la Reyne ne risque rien en faisant mettre bas les armes à ses Ministres. Voyons maintenant à quel danger s'exposeroit le Parlement, s'il faisoit, comme on demande, le premier pas, et s'il se soumettoit encore vne fois après tant d'autres. Quelle seureté y auroit-il pour luy? le peu de fidélité qu'on a expérimenté dans les Ministres, deià par deux fois, ne permet pas d'en tenter vne troisiesme. Ce ne seroit pas faire en gens prudens, que de rechercher les précipices qu'ils ont éuitez. Après la victoire de Scipion sur les Carthaginois, l'on proposa dans le Sénat ce qu'il

en falloit faire. Cn. Cornelius Lentulus fut d'auis de les ruiner tout-à-fait, parceque de tous les traittez qu'on auoit fait auec eux, ils n'en auoient pas obserué vn; qu'ils ne demandoient iamais la paix, que quand ils n'en pouuoient plus, et que puisque l'on ne leur pouuoit oster la perfidie qui leur estoit naturelle, au moins leur falloitil oster la puissance de nuire. Et quoy que cet aduis ne fust pas suiuy pour l'heure, néanmoins l'on y fust obligé après, à cause de ce qui arriua depuis, c'est à dire à cause de la foy qu'ils violèrent après tant de traittez, et qu'ils violoient sans cesse. Aussi quel traitté peut-on faire auec les Ministres qui font comme on tient que faisoient Alexandre sixiesme, et son neueu le comte de Valentinois, que Machiauel met pour le parangon des Princes? car quelque paix ou accord qu'ils fissent, il n'y auoit iamais de seureté, d'autant qu'Alexandre ne faisoit rien de ce qu'il disoit, et que le Comte ne disoit rien de ce qu'il faisoit. L'histoire marque les grands sermens qu'il fit pour asseurance de la paix auec les Princes qui s'étoient liguez contre luy, lesquels après auoir attirez sous ombre de bonne foy, il fit après cruellement mourir; sur quoy Alexandre dit en riant, qu'il auoit ioué vn tour d'Espagnol; leçon aux Princes vnis de ne se fier iamais à des infracteurs de la foy publique, imitateurs encore en ce point de Maximilien premier, qui disoit qu'il ne faisoit iamais de traitté avec Louys douziesme, que pour l'abuser et l'amuser, et pour se vanger de dix-sept iniures qu'il prétendoit auoir reçues des François. Et quoy, Messieurs, les Princes oseront-ils donner leur foy à des gens qui n'en ont point? Et si vous entendez à vn accord, croyez-vous qu'ils le tiennent, eux qui ont de grands intérests à prendre

leurs seuretez? Pensez-vous qu'il iouent à des ieux d'enfans? Et les Prouinces qui sont pour vous, que diront-elles? Et celles qui ne sont pas encore déclarées, le voudront-elles faire, si elles entendent que vous traittiez de paix? C'est vn artifice, ne vous y fiez pas; et tout ce que prétendent les Ministres, est de vous oster l'appuy que vous auez en l'vnion qui vous rend inuincibles. Puisqu'il n'y a donc point de foy, à quoy pensent ceux qui concluent aux voyes de douceur et à des articles si plastrez? N'en a-t-on pas fait de bouche et par escrit ? Qu'a produit la soubmission du Parlement, sinon des traittemens qu'on ne receuroit pas mesme du Turc? Il n'en faut pas espérer d'autres à l'auenir; n'en doutez point.

Preuues que la

faire.

Mais quoy, sera-t-on tousiours en guerre? Et si la Reyne ne veut faire mettre bas les armes, y aura-t-il paix ne doit se moyen de subsister? Le peuple sera-t-il tousiours dans l'oppression? Pourrons-nous voir emporter ou rompre leurs meubles, et eux-mesmes traisner comme des scélérats à la queue des cheuaux, sans estre touchez? véritablement, quant aux peuples, cela est digne de compassion, particulièrement pour le menu de Paris et des enuirons; mais quelque chose qu'il perde, il ne s'en plaint pas sur l'espérance qu'il a que vous le protégerez comme vous auez commencé. Il est tout persuadé qu'à des maux violens qu'il souffroit, il faut endurer de violens remèdes. Cela ne sert qu'à l'aigrir tous les iours contre la milice Cardinale, qui est plus en hazard par la campagne chez les paysans, qu'elle n'est entre les mains de nos soldats; au contraire, quand ils voyent ceux-ci, tout leur est ouuert; l'on n'entend que des bénédictions sortir de leur bouche, et que des prières à

raison est que

Dieu que vos bons desseins réussissent. Vous deuez vous seruir de cette affection pendant qu'elle dure, et en faire vostre profit. Ils ayment mieux perdre leur bien pour la deffense de la iustice, et souffrir tout d'vn temps la dernière violence des Ministres, que de languir perpétuellement sans mesmes oser se plaindre.

Mais ie dis plus : il n'est pas possible de faire paix auec le Conseil de la Reyne; premièrement, parcequ'on n'en sauroit faire qui ne soit honteuse; secondement, parce qu'elle ne se peut faire du tout. Permettez moy, Messieurs, de vous faire voir les trois raisons dont se seruit autrefois Cicéron en pareille occasion contre MarcAntoine, fauteur de la tyrannie, d'où les Romains ne faisoient que sortir après la mort de César. Le Sénat fit force procédure contre luy et mesme le déclara Perturbateur du repos public et ennemy de la Patrie; nonobstant quoy, il se trouua des Sénateurs accomodans, La première qui firent plusieurs ouuertures de paix; et Cicéron qui cette paix est des prévoyoit de loing le carnage que ce Barbare tyran auhonneste. 7, Phi- roit exercé, si les esprits de la Cour se portoient à les entendre, s'y opposa vertement et en remonstra les conséquences par ces raisons: premièrement, il fait voir que cette paix seroit honteuse, parce que les Arrests du Sénat deuoient être sacrez et inuiolables, et que la légèreté et l'inconstance estant blasmables en qui que ce soit, elles le sont encore beaucoup plus dans vn si auguste corps quelle apparence y auroit-il donc de casser les Décrets qui auoient esté faits contre luy, ce qu'il estoit nécessaire de faire pour en venir à vn accomodement? quelle honte ne seroit-ce point au Sénat de receuoir celuy qu'il venoit de déclarer ennemy du public, et dont il auoit loué et récompensé les ennemis? Messieurs, vous

lipp., n. 44.

« 前へ次へ »