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CHOIX

DE

MAZARINADES.

Agréable récit de ce qui s'est passé aux dernières barricades de Paris, descrites en vers burlesques [56]1.

(1648.)

Ie veux chanter les barricades 2

Et les populaires boutades

Dont tout Paris fut alarmé,
Alors que le badaud armé
Donna de si belles vezardes
Au braue régiment des gardes,
Et fit voir que le batelier
Est dangereux sur son paillier.
Raconte-moy, muse grotesque,

D'où vient cette humeur soldatesque.

Apprens-moy de ces mouuemens

1Cette pièce est attribuée au baron de Verderonne, un des gentilshommes du duc d'Orléans. Naudé la met au-dessus des meilleures poésies burlesques de Scarron. La version que j'en donne a été établie sur la comparaison des trois éditions de 1649.

2 Du 26 août 1648.

Quels furent les commencemens,
Et quel succès eut la furie
De la nouuelle Iaquerie.

Depuis tantôt cinq ou six ans
L'auarice des Partisans,

Traitans, soutraitans, gens d'Affaire,

Race à notre bonheur contraire,

Pilloit avec impunité

Les biens du peuple en liberté ;
Et sous prétexte du Tariffe 1
Rien ne s'échappoit de leur griffe.
Ce mal nous alloit deuorant;

Et comme l'on voit vn torrent
Tombant du sommet des montagnes,
Se répandant sur les campagnes,
Étendre partout sa fureur,

Porter la crainte et la terreur
Dans les villes, dans les villages;
Ainsi l'excez de leurs pillages,
Comme celuy de leur pouuoir,
Nous réduisoit au désespoir,
Quand le bon Démon de la France,
Touché de voir nostre souffrance,
Fit que, perdans le jugement,
Ils se prirent au Parlement,
Se promettant que leur malice
Triompheroit de la Iustice,
Et que ce grand corps atterré,
Leur repos seroit assuré.

La Polette fut la machine 2

'D'octobre 1646. Il comprenait toutes les marchandises qui entraient à Paris, soit par eau, soit par terre.

2 On appelait ainsi le droit du soixantième, que Charles Paulet, secrétaire de la chambre du roi, avait, au commencement du siècle, imaginé de faire mettre sur le prix des offices de justice et de finance. Moyennant

Destinée pour sa ruine;
Et le piège que l'on tendit
Aux officiers, certain édit
Lequel mettoit en apparence
Leurs Offices en asseurance 1.
On demandoit par cet Arrest,
Comme par manière de prest,
Quatre années de tous leurs gages.
Mais lorsque l'on vint aux suffrages,
Il parut, et non sans raison,
Dessous ce miel quelque poison,
Dont la liqueur estoit mortelle
A la santé de l'escarcelle.

En mesme temps de tous costés,
Des autres corps les Députés 2,
Attaquez de pareilles craintes,
Arriuent, parlent, font leurs plaintes
Contre la persécution,

Implorent la protection

De ceux qu'ils appellent leurs Pères,
Disent l'estat de leurs misères

Et que sans doute ils sont perdus

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le payement annuel de ce droit, les officiers pouvaient, durant l'année, vendre leurs charges aux successeurs qu'ils se choisissaient, avec l'agrément du roi cependant.

'Le droit du soixantième se renouvelait tous les neuf ans. Cette fois l'édit de renouvellement portait que les compagnies souveraines autres que le parlement abandonneraient au roi quatre années de leurs gages par manière de prêt. Il est du commencement de mai 1648.

2 De la chambre des Comptes, de la Cour des Aides, et du Grand Conseil.

Cette affaire mise en balance
Fut trouuée de conséquence;
Et comme il ne faut sottement
S'embarquer, ni légèrement,
L'vnion très-fort balottée
Ne fut pas d'abord arrestée.
Les registres sont apportez
Et soigneusement consultez.
On lit, on voit, on examine
La loy ciuile et la diuine;
Mais enfin pour conclusion
Les voix furent à l'vnion 1.
Les partisans, par cette voye,
Voyant éuanouyr leur proye
Et leur fonds estre diuerty,
Duquel ils auoient fait party,
Et, s'il faut dire, quelque auance,
Baptisent cecy d'insolence,

Qui fait brèche à l'authorité

De la Royale Majesté,

Ainsy qu'aux droits de la Couronne.

De tous costez cecy résonne;
Et le Conseil faict vn Édict
Qui l'vnion leur interdit 2.
Le Parlement demeura ferme.
Et la chose estant en ce terme,
On mit par auis du Conseil
Au mal vn second appareil.
Et, pour dissiper cet orage,
Quelques-vns furent mis en cage 3.

'Le 13 mai 1648.

2 Du 12 juin.

* On avait enlevé, le 28 mai, Turgot et d'Argouges du Grand Conseil, qui furent conduits à Mézières. Le surlendemain deux conseillers de la Cour des Aides, Guérin et Cheselier, furent exilés à Nancy; Lottin, président du Grand Conseil, et Dreux, conseiller, à Pont-à-Mousson.

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