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troubles présens, pour y apporter le remède aux Estats généraux que nous touchons1, les trouuent dans cet abus de la Iustice, lequel l'ayant rendue arbitraire et remis en la liberté des Cours Souueraines de se dispenser de la Loy et de l'Ordonnance, a mis l'honneur, la vie et les biens des hommes en leur puissance; ce qui les ayant fait craindre et respecter d'vn chacun, les Compagnies dont le ressort s'est trouué grand, comme celuy de Paris, se sont tellement enflez de ce pouuoir excessif que ne se contentant pas de voir les particuliers assuietis à leurs volontez, dont par ce moyen ils dépendent, elles ont voulu étendre leur domination iusques sur Leurs Maiestez et sur leur Conseil.

A ces Mouuemens encore n'a pas peu serui le prix excessif où l'ambition des hommes en cette considération a fait monter leurs Offices, qui n'en vaudroient pas le quart, s'ils les exerçoient selon leur institution et conformément aux Ordonnances. Et comme au payement de ces sommes immenses, plusieurs d'entr'eux se sont obligez au delà de leur bien et de celuy de leurs femmes, le mauuais estat où se trouuent leurs affaires, les rend, comme dit Saluste en la coniuration de Catilina, autant amateurs de changemens dans l'Estat que les autres de la tranquillité publique : qui est aussi l'vne des causes de la dissention qui se trouue dans ce Corps, la plus saine partie estant contrainte de céder à l'autre : qui les a fait assembler plusieurs fois contre les défenses expresses de Leurs Maiestez et prendre des résolutions dans leurs assemblées, lesquelles si elles n'eussent tendu, comme elles deuoient, qu'à supplier le Roy et son Conseil de rémé

1 Les États généraux étaient convoqués pour le 15 mars.

dier aux désordres qu'ils trouuoient en ses Finances, et aux autres abus dont ils se plaignent, ils ne les eussent pas fait imprimer et publier', comme ils ont fait, auant que la Déclaration du Roy y fût interuenue; dérobant par ce péculat à Sa Maiesté l'affection de ses peuples pour se l'appliquer par vn moyen infaillible de se faire agréer de tout le monde, c'est à dire en publiant qu'il ne faloit plus payer.

Moyen d'autant plus lasche que ce Corps l'employa en vn temps où la crise des affaires mettoit l'Estat en péril, et se seruit de l'auantage qu'vn ennemi généreux n'auroit pas voulu prendre sur son ennemi, si occupé et affoibli par vne si longue maladie dans la minorité de son Roy, lorsque l'Espagnol puissamment armé sur la frontière estoit prest d'entrer en France, comme il eust fait si la mémorable victoire de Lens ne luy eust fait obstacle.

Le Conseil du Roy, bien qu'il connust la mauuaise intention des demandes de ce Corps, ainsi faites à contretemps, n'ayant pas laissé de les luy accorder sur la promesse de cesser ses assemblées, elles n'ont pas laissé de continuer; et tant s'en faut que le Parlement en ait tesmoigné satisfaction que les Barricades se firent en mesme temps; et sans en plus parler, puisqu'elles sont condamnées à vn éternel oubli, il n'a pas depuis voulu permettre que le Roy tirast du secours présent de ce qu'on luy auoit laissé de son reuenu après vne si grande lar

gesse.

Car les grandes despenses de la guerre ayant consumé, dès le viuant du feu Roy, deux années de son

1 Récit de ce qui s'est passé en l'assemblée des cours souueraines, assemblées en la chambre de Saint-Louis [2989].

reuenu par auance, et la continuation des mesmes frais n'ayant pas permis qu'on les ait remplacez, on auoit tousiours esté contraint de traiter pour l'auance qu'il faloit fournir pour l'année courante et la suiuante. Que font ces Messieurs? ils l'empeschent et le font empescher.

Voilà où se trouuoient réduites les affaires du Roy lors de sa sortie de Paris, sans vous parler des médisances publiques, iniures atroces et libelles diffamatoires, précurseurs et compagnons inséparables de la réuolte, beaucoup moins excusable à la Ville de Paris qui ne s'est énorgueillie au point de reiimber contre son Maistre que par l'abondance que sa présence luy auoit acquise après l'auoir enrichie de la dépouille des autres, tous les Seigneurs et gens de condition tant soit peu remarquables y estant iusques alors venus manger les trois quarts du reuenu de leurs villages, au lieu qu'ils l'employent maintenant à leur faire la guerre, comme les Bourgeois, ce qu'ils auoient gagné auec eux.

Despence qui acheuera bientost de les ruiner, si le repentir ne succède promptement à leur faute, de laquelle ils trouuent autant de marques qu'il y a d'endroits où ils peuuent ietter leur veue.

Regardent-ils le Louure ou le Palais Cardinal, demeures de leurs Maiestez? Ils leur représentent la mesme horreur que fait le corps du Soleil éclipsé, présages des changemens ordinaires qui le suiuent; auiourd'huy aussi déserte de Noblesse, comme tous leurs quartiers qu'elle peuploit; ou s'il y en reste, ce sont des gens armez contre le Roy, qui piafent à leurs dépends, en attendant qu'ils soient admis à poursuiure la rémission de leurs crimes, s'ils ne se hastent de l'abolir par l'amnistie que la bonté Royale leur présente.

Iettent-ils les yeux sur le Palais destiné à rendre la Iustice? Il ne sert plus que de cohue aux brigues des factieux; l'appellant et l'intimé n'y ont plus affaire, les plus iudicieux ne se voulant pas trauailler inutilement à soliciter leurs procez deuant des Iuges qui ont bien d'autres affaires en teste et dont les Arrests aussi bien n'ont plus de force, comme ayant esté interdits et leur pouuoir osté par celuy qui le leur auoit donné1.

Leurs marchands après auoir débité quelques baudriers à leur nouuelle milice pour des espèces qu'ils peuuent aisément reconnoistre, parce qu'elles sont toutes sorties de leurs bourses, ont loisir d'aller à la garde sans crainte de perdre leurs chalans, ne s'y faisant plus d'emplète, tout le commerce estant interrompu, leurs lettres d'eschange protestées, et en vn mot tout leur crédit perdu.

Portent-ils leur vue dans la campagne de dessus les murailles de leur ville? Tout y fume d'embrâsemens; tout y est désolé de saccagemens. Ils y ont appellé par leur désobéissance les Alemans, les Polonois et autres nations estrangères, qui leur apprennent la pratique de la guerre, qu'ils n'auoyent auparauant veue que dans les Gazettes; ce Royaume seul s'estant trouué iusques à présent garanti du logement d'ennemis par la sage conduite et préuoyance de nos généraux et de ce Cardinal qu'ils blasment tant, aussi bien que ses prédécesseurs.

Voilà tous les auantages que la Ville de Paris a iusques à présent receus de la réformation du Parlement. Le temps leur apprendra le reste. Car pour la ruine qu'ils

1 Déclaration du roi portant suppression de toutes les charges et offices dont sont pouruus les gens cy-deuant tenant la cour de parlement de Paris, etc.

ont causée à vingt mil familles, ie n'en parle point, puisqu'il suffit à leur dire que c'estoyent des Partizans ou de leurs amis et alliez; de sorte qu'ils ont démenti la maxime de la Physique, qui veut que la génération de I'vn vienne de la corruption de l'autre ; et le prouerbe, I'vn ne perd point que l'autre n'y gagne, ne pouuant montrer qui a gagné à leur réformation qui a causé tant de pertes.

que

D'où il me semble desià voir que non seulement le simple bourgeois, mais le Parlement a honte de cette équippée; mais comme il est plus malaizé de se retirer d'vn mauuais pas que d'y glisser, ils trouuent de la peine à en sortir.

Courage néantmoins, mes chers compatriotes; perdez cette fausse opinion qu'il y ait du déshonneur à quitter son erreur. Leurs Maiestez font la moitié du chemin. Elles ont plus d'intérest en vostre conseruation qu'en vostre perte. Ne résistez pas plus longtemps à leurs tendresses. Ayez seulement enuie d'estre sauuez; vous le serez. A plus forte raison serez-vous exempts de mal puisque ceux qui vous l'ont procuré, sont receus en grâce. Ouurez vostre cœur à vostre Roy qui y veut venir loger. Dieu mesme, tout bon qu'il est, ne sçauroit habiter chez nous, si nous ne l'y voulons receuoir; et cette réception ne se fait pas sans vne préparation précédente. Toute celle que leurs Maiestez requièrent de vous, c'est la mesme affection qu'elles vous offrent. Refuserez-vous vn si précieux trésor à si bon marché? Ie ne le puis croire.

Sur tout après la funeste catastrophe qu'a naguères eu le soulèuement du Parlement d'Angleterre contre son Roy, pour lequel les Anglois disoyent au commencement

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