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que

que,

leur repos; tellement s'ils le troublent eux mesmes, ils cessent d'être Roys, et les subiets d'être subiets. Aussi voyons-nous que, quoique les Romains n'eussent rien tant à cœur que d'estendre leur seigneurie et de faire de nouuelles conquestes, néanmoins ils n'ont iamais au- thorisé les réuoltes des subiets contre leurs princes légitimes qu'en cas d'une iniuste oppression; et est certain que les Peuples ont plustost eu recours à eux, qu'eux aux Peuples pour faire chasser les Roys qui abusoient de leur authorité; tesmoin les villes de la Grèce qui leur enuoyèrent des Députés pour les prier de les aller secourir contre leurs tyrans. Il est vray qu'ils estoient bien aises de rencontrer des occasions et des prétextes si fauorables; car comme ils croyoient que c'eust esté vne iniustice d'exciter vne réuolte et de corrompre des subiets, aussi s'imaginoient ils qu'ils eussent commis vne lascheté trop grande s'ils les eussent laissez dans vne oppression iniuste quand ils auoient recours à eux; tant il est vray que les subiets ne sont obligez aux Roys qu'autant qu'ils sont Roys et qu'ils n'abusent pas de leur authorité. Il n'en va pas de mesme dans la Monarchie Seigneuriale, où les subiets sont bien obligez par serment au Monarque, sans que le Monarque s'oblige à rien s'il ne veut; et de quelque violence qu'il en use enuers eux, ils n'ont iamais de iustes suiets de se rebeller (ie parle icy selon le droict des gens, et non pas selon les maximes du Christianisme). La raison est parceque le Monarque ne se défait iamais de la qualité de Seigneur, et qu'vn Seigneur, à prendre le mot en sa rigueur, n'a point d'autre loy que son espée, pouuant de droict quand il veut, rauir et biens et vies de tous les subiets, faire d'autres colonies et de nouuelles peuplades, comme il se

pouuoit quand il les a premièrement assuiettis par la voye des armes.

Il faut donc que le Prince d'vne monarchie Royale soit soumis à ses subiets et qu'il n'ose faire ce qu'il voudroit bien, crainte de les offenser? Nullement; mais le Roy et ses subiets ayans vn mesme Dieu pour maistre, ses loix et ses commandemens doiuent estre la règle de leurs actions. Les grands Politiques oseront ils dire que Traian' ne se comporta pas en Empereur quand il fit Licinius Sura préfet du prétoire, et qu'en luy donnant l'espée nue qui estoit la marque de sa charge, il luy dit : «<ie te donne cette espée, Sura, dont tu me seruiras fidèlement si ie te commande quelque chose selon le droit et l'équité; sinon, ie te dispense de ton obéyssance, et seray bien aise que tu t'en serues contre moy-mesme.» Pensons nous qu'Alexandre Seuerus eust moins de pouuoir et d'authorité que Caligula et qu'Héliogabale parcequ'il n'en abusoit pas comme eux? que Tacitus fust moins Empereur que les autres parcequ'il ne vouloit rien faire sans l'aduis et le consentement du sénat? et pour parler de nos Roys, Louis XII, qui estoit les délices du peuple et qui faisoit conscience de leuer quelque chose sur luy, crainte de le faire crier, estoit il moins Roy et moins absolu que n'estoient ses deuanciers? Henry IIII a-t-il eu moins d'authorité que Louis XIII pour n'auoir pas fait sauter la teste à des Montmorency, à des Marillac, à des de Thou, à des Cinq-Mars, et pour n'auoir pas fait tant emprisonner et exiler de Conseillers et de Présidens qu'il y en a eu sous le règne précédent, et depuis la Régence? Mais le malheur est qu'on ne fait iamais con

' Dion en la vie de Traian. N. D. T.

Le Parlement cause du malheur par sa conniuen

ce.

ceuoir aux Roys ce qu'ils doiuent, mais ce qu'ils peu-
uent et combien leur authorité a d'étendue, contre la
maxime et l'instruction que donnoit le grand Théodose
à son fils.

1 Nec tibi quid liceat, sed quid fecisse decebit,
Occurrat, mentemque domet respectus honesti.

D'où viennent donc tous ces désordres? C'est de vous, Messieurs, pardonnez moy, si je le dis; car si vous vous opposiez vertement à ces iniustes et tyranniques procédures dès leur naissance, on ne les verroit esclore qu'à la confusion de leurs autheurs et à l'honneur de vostre compagnie. N'y a t'il pas lieu de s'estonner que vous qui estes les dépositaires de ce qu'il y a de plus sacré dans nos loix, ayez si longtemps toléré le trafic infâme du sang des subiets du Roy? l'ay cent fois ouy dire dans les Prouinces que tout le mal ne venoit que de vous, qu'on ne demandoit pas mieux qu'à secouer ce ioug insupportable des Ministres Partisans, pourueu que vous donnassiez le bransle, puisque vostre Parlement est sans contredit le premier mobile de la France; et ie puis adiouster auec vérité que vous estes complices de tout le mal qui s'est fait depuis tant d'années, hormis le mois de May dernier, que vous commençastes enfin à vous réueiller d'vne malheureuse léthargie qui vous a si longtemps tenus sans poux et sans mouuement.

Il me souuient à ce propos, de certains discours qu'on dit que tint le Plaisant, autrement le bouffon du Roy, sur le suiet des duels du grand Boutheuille, qui auoit desià tué seize Gentilshommes au combat d'homme à

Claudian av. 4. Cons. d'hom, N. D. T.

homme; et comme on demandoit au Roy sa grâce pour le seixiesme et que le Roy n'en vouloit point ouyr parler, à cause de tant de meurtres qu'il auoit commis, ce fou lui dit que Boutheuille n'en auoit tué qu'vn et que le Roy auoit tué les autres; parce que, s'il l'eust puny dès le commencement, selon les ordonnances, il il n'en eust pas tué dauantage. I'en puis dire autant de vous, Messieurs, et prendre la liberté d'vn fou qui estoit sage, en vous remonstrant que si vous auiez chastié dès le commencement les brigandages du règne passé, nous n'en serions pas où nous sommes maintenant.

A qui pensez vous que les peuples puissent adresser leurs plaintes, si ce n'est à vous? Iront ils au Conseil du Roy, où l'on ne met quasi plus que des Partisans, pour se plaindre des extorsions qu'ils font? c'est à dire, iront ils deuant des Iuges qui sont parties? Il n'y a pas d'apparence; et le peu de iustice qui s'y rend, fait mesme appréhender aux plus iustes d'en auoir des Arrests à leur aduantage. Pourquoy vérifiez vous les Édits du Roy? Est ce par forme seulement et par vne vieille coustume? ou bien si c'est parceque vous seruez de barrière à cette authorité Royale et que vous auez droit d'examiner s'ils sont iustes? Vous sçauez mieux que moi que les peuples n'ont aucune voix délibératiue en tout cela, si ce n'est par vous qui estes comme leurs Députez; et quand i'ay dit qu'ils estoient parfois exempts de l'obéissance, ie n'entends pas que les particuliers se puissent arroger le droict; autrement ils se feroient iustice à eux mesmes selon leur caprice, ce qui ne se peut pas ; mais bien quand ils sont authorisez par vos Arrests qui tiennent lieu d'Estats et d'ordonnances.

Souuenez vous donc, s'il vous plaist, que depuis que

Response du Parlement.

les Parlemens sédentaires sont instituez pour rendre plus complétement la iustice aux subiets du Roy, l'on n'a tenu les Estats que pour remédier aux désordres qui arriuent de temps en temps en l'administration; qu'on leur a donné les Ordonnances, comme en dépost, pour les faire exécuter en leur forme et teneur, et qu'ils en sont chargez tant de la part du Souuerain que des Subiets; si bien que l'on peut conclure conformément à ma proposition, que toute la corruption qui arriue dans l'administration de l'Estat, ne prouient que de la lasche tolérance des Parlemens et que les Roys et les peuples leur peuuent demander raison d'vne iustice si mal administrée.

Ie sçay bien que vous me direz que vous estes trop près du soleil pour ne cligner pas les yeux, qu'il se trouue trop peu d'aiglons parmy vous qui puissent en supporter les rayons, que la violence d'vn costé et la diuision de vostre compagnie de l'autre vous a forcez de faire des choses que vous sçauiez estre contre la iustice, qu'il y a peu de Catons en ce siècle qui aillent au Palais au trauers des picques et qui fassent trembler les armes sans armes, comme fit l'ancien d'Vtique celles de son collègue qui le Response à la vouloit empescher de parler pour le bien public. Voilà, ce me semble, ce que vous pouuez répliquer à ceux qui vous accusent de trop de conniuence. Mais parlons, ie vous supplie, sérieusement: est ce là faire l'office de sages et de sages souuerains? Si vous n'estes establis que pour faire la volonté du Roy à l'aueugle, à la bonne heure; mais en ce cas là il n'a que faire de vous; et les peuples encore moins; le conseil d'en haut suffit, puisqu'aussi bien l'on n'a point d'autre raison, sinon que, sic volo, sic iubeo, sit pro ratione voluntas. Qu'est il

response.

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