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soit, qui prendra en main la cause de l'Estranger, s'en trouuera mal et en receura le chastiment1; chastiment qui semble, au langage du mesme, ne deuoir estre autre que la nudité et la dépouille : Ostez le vestement à celuy qui se porte plège et caution pour l'Estranger2.

C'est vn Dieu qui parle, MADAME, et qui nous authorise dans nos demandes et dans nos plaintes, auxquelles vos propres intérests vous obligent autant d'estre fauorable que nostre propre vtilité. Nous ne vous assiégeons plus par des maximes politiques et des raisons d'Estat, mais par la parole, la Loy et la volonté de Dieu, qui en a moins pour nous le dire que pour se faire obéyr. Obéyssez donc, MADAME, à celuy qui vous a donné en main de quoy vous faire des suiets et des obéyssans; reiettez du Tabernacle ce profanateur des choses sainctes; exterminez du Sanctuaire ce perturbateur du repos public; mettez hors de vostre Royaume cet ennemy commun et du Prince et du suiet. Nous sommes semblables à ces ouailles dont il est parlé dans S. Iean: nous ne suiurons pas le mercenaire et l'Estranger'; nous ne cognoissons point ses voyes; et nous n'entendons point sa parole. Nous voulons bien des Ministres, mais qui relèuent auec nous d'vne mesme Couronne, qui soient auec nous suiets d'vn mesme Prince, et que le droict naturel engage si fort dans les intérests du Royaume qu'ils ne fassent rien qu'à l'aduantage de celuy qui en est le Souuerain; ce qui n'est pas naturel à ceux qui ne sont pas Fran

1

Affligetur malo qui fidem facit pro extraneo. Prou., XI.

2 Tolle vestimentum eius qui fideiussor extitit alieni. Prou., xx.

3 Alienum autem non sequuntur. Ioan., x.

* Non audimus vocem alianorum. Ioan.... 1.

çois; car si cela estoit, celui-cy dont nous demandons l'exclusion, auroit-il fait tant de mal sans départir aucun bien? auroit-il emprisonné les grands, banny les gens de bien, abaissé les vertueux, esleué les meschans, authorisé les vices, protégé les Athées et les impies, enseigné les trahisons, semé la ialousie entre les Princes, refusé les aduantages de la paix1, désolé les familles, estably des partisans et des traistres, empoisonné nos Sénateurs, gourmandé nos Parlemens, anéanty l'authorité Royale, ruiné ses fondemens et ses appuis, mis en proye tout le Royaume et confondu également et la Religion et l'Estat, pour s'esleuer aux dépens de tous les deux sur la dépouille de nos Temples et les débris de nos fortunes

Et partant, MADAME, que vostre Maiesté, puissamment éclairée du malheur qui nous arriue de l'éléuation d'vn tel homme et de la nécessité qu'il y a de l'exclure par l'Arrest et l'Anathème que Dieu a fulminé mesme contre les Estrangers indifférens, suiuant l'exemple de ses ancêtres, dont elle porte et le Sceptre et la Couronne, se réglant aux maximes et aux pratiques de sages maieurs (qu'elle ne dira pas auoir manqué en ce poinct), de Childéric premier, de Charles le Sage, de Charles six, son fils, de Louys second, et de Charles septiesme, obéyssant aux Édits de ses pères, qui luy ordonnent expressément ce que nous luy demandons; mais surtout se soumettant auec respect au Dieu de ses pères et rendant vne obéissance autant aueugle que raisonnable à ses volontez et à ses ordres, accorde à nos humbles supplications, accompagnées de nos gémissements et de nos larmes

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Il a été répondu à ce reproche par la publication de plusieurs pièces dont la liste se trouve à l'article des Causes du retardement de la paix, etc.

[657.]

cette grâce dont elle est redeuable à ses propres intérests, si elle ne veut que Dieu se fasse luy-mesme Iustice et n'exécute l'Arrest couché dans le Liure des Nombres : Si quelque Estranger, dit-il, prend en main le Ministère, il périra; ie le feray mourir1. C'est ce qu'appréhendent dauantage,

De Vostre Maiesté,

MADAME,

Les très-humbles, très-obéissans et très-fidelles seruiteurs et Suiets.

Les souhaits de la France à Monseigneur le duc d'Angoulesme [3700] 2.

(11 janvier 1649.)

Grand Prince, ie sçay que vous compatissez à ma disgrâce, et que vous meslez de bon cœur vos larmes auec les miennes; et puisqu'il vous fasche extrêmement de me voir auiourd'huy réduite au plus déplorable estat où ie pouuois iamais estre, ie m'adresseray à Vostre ALTESSE pour l'entretenir de ma douleur, et pour luy demander quelque remède aux maux qui m'accablent et qui infailliblement me vont faire périr si vous n'accourez à mon

secours.

Vous auez vne longue et triste expérience des calamitez que i'ay endurées; et sans vous obliger de relire les guerres que i'ay eues auec les Anglois et contre Charles

1 Externus qui ad ministrandum accesserit, morietur. Num., III.

• Naudé signale cette pièce comme une des meilleures.

le Quint et Philippe II, il me suffit de vous dire que vous estes venu au monde durant les troubles des Religionnaires et dans la plus fascheuse saison de cette monarchie. Vous auez veu naistre la Ligue et les autres guerres qu'elle a produites; et ie m'asseure que vostre esprit frémit encore des spectacles d'horreur qui ont paru en ce temps-là sur mon théâtre. La félicité du Règne de Henry IV en auoit réparé toutes les pertes; et les François ne se souuenoient plus des maux soufferts et des disgrâces passées. Sous Louys XIII, les misères publiques ont repris de si profondes racines qu'elles subsistent encore. Et les peuples, extrêmement lassés et autant affoiblis par les victoires que par les pertes, estoient à la veille de respirer et de iouir d'vn bienheureux repos.

Vn malheur qui n'a point d'exemple dans l'Histoire, va r'ouurir toutes mes blessures et mettre en pièces mes pauures entrailles; va auec le fer et le feu se répandre par toutes mes Prouinces, et va causer le plus grand embrasement qui ait iamais paru dans le monde. Et ce qui m'estonne et me surprend, est qu'on n'a point veu de guerre qui n'ait eu quelque fondement ou du moins vn légitime prétexte, et dont la fin n'ait regardé l'intérest de quelques particuliers. Les troubles de la Religion ont fomenté l'ambition des Princes qui vouloient, à quelque prix que ce fust, gouuerner l'Estat et posséder par force et par violence les bonnes grâces des Roys. La Ligue auoit pour but I'vsurpation de la monarchie; et elle vouloit esteindre et coupper la racine de la Maison Royale. Mais dans cette fatale et cruelle conioncture, on ne respire que le bien général; on ne trauaille qu'à maintenir l'authorité souueraine; on ne cherche que la félicité publique; et on ne demande au Ciel que le bonheur

de tous mes suiets; et la Cour est en cela d'accord auec le Palais; et tous les François crient vnanimement : VIVE LE ROY!

Il n'y a pas mesme quasi lieu de se plaindre; et si les désordres ou les nécessitez publiques ont déuoré plusieurs millions, et si les dispensateurs des deniers publics ont eu des mains, ils ne seront pas exempts de la répétition et recherche qui s'en doit faire. Vn bon règlement fermera la bouche à tout le monde et réunira tous mes enfans. Et après tout, GRAND PRINCE, est-il iuste que pour réparer vne faute, il faille employer vn remède pire mille fois et plus fascheux que le mal mesme, et que les François versent tout leur sang les vns contre les autres pour puis après deuenir les esclaues de leurs ennemis et faire changer de face à la plus redoutable et la plus florissante de toutes les monarchies. Que diront les amis et les alliez de cette Couronne? Que ne feront point les ennemis? Quelle gloire et quelle réputation produira vne telle leuée de boucliers? Quel iugement en feront les autres nations? et qu'en croira la postérité? Estrange aueuglement! que ceux qui sont auiourd'huy les Maistres et les Arbitres de la Chrestienté soient peut-estre obligez demain de se soumettre, et que des victorieux ayent la honte et la confusion de receuoir la loy des vaincus!

La Reine ne demande que de l'obéissance; et ceux de Paris n'ont point d'autre pensée que de luy en rendre ; et sans entrer plus auant dans de grandes irruptions, ny faire des actes inouïs d'ostilité, ne vaut-il pas mieux se réconcilier de bonne heure et n'attendre pas que le désordre soit monté à vn excez qui le rende irréparable?

Faites, GRAND PRINCE, qu'vn fauorable accord ou vne heureuse Amnistie préuienne vne infinité de pillages,

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