ページの画像
PDF
ePub

le pamphlétaire est un témoin qui souvent dépose contre lui-même.

Cette utilité des pamphlets pour la critique historique a été sentie dès les premiers jours de leur apparition. Charles IX n'était pas à la moitié de son règne que déjà Pierre Estiart imprimait à Strasbourg le Recueil des choses mémorables faites et passées pour le faict de la religion et estat de ce royaume depuis la mort du roy Henry II jusqu'au commencement des troubles.

Quatre ans après, le protestant La Popelinière terminait au bruit des joyeuses acclamations de la paix de 1570 et publiait à la Rochelle l'Histoire de notre temps ou Recueil des choses mémorables passées en France depuis l'édit de mars 1568. Ce sont en quelque sorte les pièces justificatives de sa grande histoire des guerres de religion.

Puis vinrent les Mémoires de l'estat de France sous Charles neuvième en 1576; les Mémoires de la Ligue; le Recueil des pièces les plus curieuses qui ont été faites pendant le règne du connestable M. de Luyne, dont la première édition est de 1622; en 1637, Diverses pièces pour la défense de la reyne mère du roy trèschrétien Louis XIII, faictes et revues par Mathieu de Morgues; enfin en 1640 le Recueil de diverses pièces pour servir à l'histoire que Duchâtelet a publié pour la défense du cardinal de Richelieu.

Vers le milieu du XVIIe siècle, le premier de tous ces recueils fut refondu et augmenté par Secousse, continué par Lenglet Dufresnoy sous le titre de Mé

moires de Condé; et les Mémoires de la Ligue reparurent avec des augmentations considérables de l'abbé Goujet.

Ainsi depuis Henri II jusqu'à Louis XIII inclusivement, nous avons une suite à peu près non interrompue de recueils de pamphlets qui touchent à tous les grands événements de ces règnes successifs. Sans doute ce n'est pas tout ce que la passion politique a écrit ou publié; il y manque beaucoup de pièces et des meilleures. Pourtant les recueils sont à ceux qui veulent étudier sérieusement l'histoire, d'une trèsréelle utilité.

Pour continuer à suivre l'ordre des temps, il y avait à recueillir dans la volumineuse collection des MAZARINADES un certain nombre de pièces les plus curieuses par les faits qu'elles contiennent, les meilleures par l'habileté de la composition ou par l'éclat du style. C'est ce que j'ai essayé de faire.

Dès 1649, après la paix de Saint-Germain, des libraires réunirent sous un titre général les pamphlets que le public avait semblé recevoir avec le plus de faveur; et on vit paraître presque en même temps le Recueil de toutes les pièces faites contre le cardinal Mazarin sur l'enlèvement du roi, le Recueil de ce qui s'est passé contre le mauvais gouvernement de Jules Mazarin, le Recueil de plusieurs pièces curieuses tant en vers qu'en prose, le Recueil des pièces imprimées durant les mouvements de l'année 1649 et d'autres encore; mais tous ces recueils ont été faits sans intelligence, sans critique; ils ne comprennent guère d'ail

leurs que les trois premiers mois de la Fronde; enfin ils sont très-rares.

Obligé de me renfermer dans un cadre assez étroit, j'ai d'abord écarté toutes les pièces officielles : arrêts, édits, ordonnances, déclarations. On les trouve dans l'Histoire du temps de Du Portail et dans le Journal du parlement. Je me suis ensuite attaché aux pamphlets qui font plus particulièrement connaître les opinions et les intérêts des partis, les caractères et les situations des personnages. Quand à l'intérêt historique ou politique ils n'ont pas joint un certain mérite littéraire, je me suis contenté de les publier par extraits.

C'est à l'année 1649 que j'ai emprunté le plus grand nombre de pièces par deux raisons : la première est que les griefs de l'opinion contre la personne et l'administration du cardinal Mazarin sont exposés d'une manière plus complète et plus détaillée dans les pamphlets de cette date; la seconde que pendant le blocus de Paris les intérêts individuels se sont plus effacés devant les intérêts collectifs et que la fronde y a conservé mieux un caractère apparent d'unité. On sait comment les partis se sont divisés après la paix de Saint-Germain.

La Fronde n'a certes pas inventé le pamphlet en vers. Elle ne l'a pas même perfectionné; il est constant qu'elle n'a rien de plus hardi, de meilleur, de plus fameux que la Miliade de 1638; mais elle lui a donné un développement qu'il n'avait pas eu auparavant, qu'il n'a plus eu après. Tout alors s'écrivait en vers: les controverses comme les récits. Il s'est rencontré

des poëtes pour traduire en vers le Courrier françois et le Théologien d'estat. C'est le titre d'un pamphlet en vers (la Mazarinade), qui est devenu le nom générique de toutes les pièces qui pendant quatre ans ont été publiées pour et contre le cardinal Mazarin.

Cet usage, je dirais volontiers cet abus de la poésie, est un des caractères extérieurs de la Fronde; et à son tour la poésie de la Fronde a un caractère propre : elle est burlesque. Par cette double raison j'ai cru que je devais donner aux vers burlesques une large place dans le recueil des MAZARINADE .

J'ai la confiance que, même réduit aux proportions sur lesquelles j'ai dû le mesurer, ce recueil suffira. Après tout on pourra toujours recourir à la Bibliographie des Mazarinades où j'ai réuni tous les titres de ces pamphlets, autant que les recherches les plus patientes m'ont permis de le faire, et qui contient des citations plus courtes, il est vrai, mais plus nombreuses et plus variées. Je ne puis qu'y renvoyer le lecteur désireux de pénétrer plus avant dans les secrets de la Fronde. La Bibliographie des Mazarinades a été conçue de manière à suppléer au dépouillement des collections les plus volumineuses pour ceux qui n'ont pas besoin de se livrer à une étude approfondie de cette époque. Pour les travailleurs qui sont jaloux de remonter aux sources, elle sera un guide fidèle, je l'es père, nécessaire, j'en suis certain.

AVERTISSEMENT.

Les numéros qui suivent les titres entre crochets, tant dans le texte que dans les notes, sont ceux des pamphlets dans la Bibliographie des Mazarinades.

Les dates exprimées à la suite des titres ne sont pas exactement celles des pièces. J'ai mieux aimé rappeler les dates des groupes dans lesquels les Mazarinades sont rangées dans la liste chronologique à la fin du troisième volume de la Bibliographie. Il m'a semblé qu'en renvoyant ainsi le lecteur à cette liste, je lui fournirais un moyen utile de diriger et de compléter ses recherches, s'il en avait le désir.

« 前へ次へ »