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Il approche; avec lui les tempêtes s'avancent,

Et les vents en grondant volent et le devancent:

Tel s'avançoit Énée; ainsi devant ses pas

Ont volé la terreur, le trouble et le trépas.
Des bataillons troyens la formidable élite
Forme ses rangs, se presse, et s'élance à są suite;
Le fier Thymbrée envoie Osiris à Pluton,
Gyas égorge Ufens, Achate immole Éplon,
Mnesthée Archétius; Tolumnius lui-même,
Infracteur des traités, voit son heure suprême.
Des cris frappent les cieux, on voit de tout côté
Le Rutule à son tour s'enfuir épouvanté :
Ou de quelques guerriers si la fière imprudence
Ose d'Enée encore affronter la vaillance,

11 passe avec dédain; pour de plus grands combats,
Pour un plus grand rival il réserve son bras;
Parmi les flots poudreux, dans ce vaste carnage,
C'est Turnus, Turnus seul, que demande sa rage;
Ses yeux, sa voix, ses traits respirent la fureur.
Juturne en a pâli: sa prudente frayeur,
Pour guider de Turnus la course téméraire,
Renverse Métiscus, écuyer de son frère;
Et, tandis que poussant un cri mal entendu
Le char le laisse au loin sur la terre étendu,
La nymphe, poursuivant son adroit stratagême,
Prend sa taille et ses traits : c'est Métiscus lui-même;
Et les coursiers trompés par le son de sa voix
De leur vieux guide encor pensent suivre les lois.

Et nunc porticibus vacuis, nunc humida circum
Stagna sonat: similis medios Juturna per hostes
Fertur equis, rapidoque volans obit omnia curru;
Jamque hîc germanum, jamque hîc, ostentat ovantem ;
Nec conferre manum patitur; volat avia longè.
Haud minùs Æneas tortos legit obvius orbes,
Vestigatque virum, et disjecta per agmina magnâ
Voce vocat. Quoties oculos conjecit in hostem,
Alipedumque fugam cursu tentavit equorum,
Aversos toties currus Juturna retorsit.

Heu! quid agat? vario nequidquam fluctuat æstu:
Diversæque vocant animum in contraria curæ.
Huic Messapus, uti lævâ duo fortè gerebat
Lenta, levis cursu, præfixa hastilia ferro,
Horum unum certo contorquens dirigit ictu.
Substitit Æneas, et se collegit in arma,
Poplite subsidens: apicem tamen incita summum
Hasta tulit, summasque excussit vertice cristas.
Tum verò assurgunt iræ; insidiisque subactus,
Diversos ubi sensit equos currumque referri,

Multa Jovem et læsi testatus foederis aras,
Jam tandem invadit medios, et, marte secundo
Terribilis, sævam nullo discrimine cædem

Suscitat, irarumque omnes effundit habenas.

Juturne cependant conduit le char docile;
Et telle qu'en son vol une hirondelle agile,
Qui, d'un maître opulent partageant le séjour,
Suspendit à ses toits le fruit de son amour,
Va, vient, revient, parcourt d'immenses galeries,
Rase tantôt la rive et tantôt les prairies,
Et, portant à son bec son modeste butin,

De son nid babillard revient calmer la faim:
En cent lieux à la fois la nymphe ainsi voltige;
Ainsi, trompant les yeux par un heureux prestige,
Aux ailes, dans le centre, errant de rang en rang,
D'un cours toujours rapide et toujours différent,
Montrant partout Turnus et traversant l'armée,
Elle échappe aux combats dont elle est alarmée;
Et cherchant qui l'évite, évitant qui la suit,
Se montre et disparoît, reparoît et s'enfuit.
Cependant le Troyen, que son adresse irrite,
Sur les pas de Turnus redouble sa poursuite;
Et des rangs sous sa trace entassant les débris,
Il le cherche des yeux, il l'appelle à grands cris.
Vains efforts! chaque fois qu'il rencontre sa vue,
Chaque fois, éludant sa poursuite imprévue,
S'échappe comme un trait le char insidieux.
Que faire? que tenter? mille contraires voeux

Combattent à la fois dans son ame incertaine.
Messape alors paroît sur cette horrible scène;
Il tient en main deux dards; l'un des deux est parti,
Le heros menacé le voit fondre sur lui,

Quis mihi nunc tot acerba deus, quis carmine cædes Diversas, obitumque ducum quos æquore toto

Inque vicem nunc Turnus agit, nunc Troïus heros,
Expediat? Tanton' placuit concurrere motu,
Jupiter, æternâ gentes in pace futuras!

Æneas Rutulum Sucronem ( ea prima ruentes
Pugna loco statuit Teucros) haud multa moratus
Excipit in latus, et, quà fata celerrima, crudum
Transadigit costas et crates pectoris ensem.
Turnus equo dejectum Amycum fratremque Dioren
Congressus pedes, hunc venientem cuspide longâ,
Hunc mucrone ferit; curruque abscissa duorum
Suspendit capita, et rorantia sanguine portat.
Ille Talon, Tanaïmque neci, fortemque Cethegum,
Tres uno congressu, et mæstum mittit Onyten,

Son bras au trait qui vole oppose son égide,
Et sa tête baissée échappe au fer rapide;

Mais il atteint son casque, et de son front altier
Détache et jette au loin son superbe cimier.
Las de perdre Turnus à travers la poussière,
Après avoir aux dieux adressé sa prière,
Attesté les sermens et la foi des traités,

Ces traités solennels par lui seuls respectés,

Il part, vole, et, de morts jonchant ces tristes plaines, A son libre courroux lâche toutes les rênes.

Ah! qui retracera tant de scènes d'horreur? Que de chefs, de héros, moissonnés dans leur fleur, Ensanglantent la plaine et deviennent la proie Ou du héros d'Ardée, ou du héros de Troie ! Quel démon l'un par l'autre égorgeoit tour à tour Ceux qu'un jour doit unir un éternel amour? Terminez, justes dieux ! cette lutte sanglante. Partout Turnus, Énée, apportent l'épouvante. Un Rutule (Sucron est son nom malheureux ) Le premier du Troyen sent le bras valeureux; Sa mort aux Phrygiens à rendu le courage: A l'endroit où des os le robuste assemblage Recouvre sa poitrine, un homicide acier, Abrégeant son trépas, s'est plongé tout entier. Amycus renversé, Diorès qui s'élance, L'un d'un coup de poignard, l'autre d'un coup de lance, Sont percés par Turnus; même après le trépas, Ces frères malheureux ne se séparent pas.

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