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>> étoit suspendue sur leurs têtes; certains de >> succomber, ils ne songèrent plus qu'à » vendre cher le reste de leur vie. Cependant

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Godefroy se montroit sur le haut de sa >> tour, non comme un fantassin, mais comme » un archer. Le Seigneur dirigeoit sa main » dans le combat et toutes les flèches » qu'elle lançoit perçoient l'ennemi de part en part. Auprès de ce guerrier étoient Baudouin » et Eustache ses frères, de même que deux » lions auprès d'un lion: ils recevoient les >> coups terribles des pierres et des dards, » et les renvoyoient avec usure à l'ennemi. >> Tandis que l'on combattoit ainsi sur les » murs de la ville, on faisoit une procession » autour de ces mêmes murs, avec les croix, » les reliques et les autels sacrés (1). L'avantage demeura incertain pendant une par» tie du jour; mais à l'heure où le Sauveur » du monde rendit l'esprit, un guerrier » nommé Létolde, qui combattoit dans la

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(1) Sacra altaria. Ceci a l'air de ne pouvoir se dire que d'une cérémonie païenne; mais il y avoit apparemment dans le camp des Chrétiens des autels portatifs.

» tour de Godefroy, saute le premier sur les remparts de la ville: Guicher le suit, »ce Guicher qui avoit terrassé un lion; Go

defroy s'élance le troisième, et tous les » autres chevaliers se précipitent sur les pas » de leur chef. Alors les arcs et les flèches » sont abandonnés; on saisit l'épée. A cette » vue, les ennemis désertent les murailles, et » se jettent en bas dans la ville; les soldats du >> Christ les poursuivent avec de grands cris.

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» Le comte de Saint-Gilles, qui de son >> côté faisoit des efforts pour approcher ses >> machines de la ville, entendit ces clameurs. Pourquoi, dit-il à ses soldats, demeurons»> nous ici? Les Français sont maîtres de » Jérusalem; ils la font retentir de leurs » voix et de leurs coups. Alors il s'avance » promptement vers la porte qui est auprès » du château de David; il appelle ceux qui » étoient dans ce château, et les somme de » se rendre. Aussitôt que l'émir eut reconnu >> le comte de Saint-Gilles, il lui ouvrit la » porte, et se confia à la foi de ce vénérable » guerrier.

» Mais Godefroy avec les Français, s'efforçoit de venger le sang chrétien ré

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» pandu dans l'enceinte de Jérusalem, et vou»loit punir les Infidèles des railleries et des >> outrages qu'ils avoient fait souffrir aux pélerins. Jamais dans aucun combat il ne >> parut aussi terrible, pas même lorsqu'il com>> battit le géant (1) sur le pont d'Antioche; » Guicher et plusieurs milliers de guerriers » choisis fendoient les Sarrasins depuis la

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tête jusqu'à la ceinture, ou les coupoient par » le milieu du corps. Nul de nos soldats ne se » montroit timide; car personne ne résis» toit (2). Les ennemis ne cherchoient qu'à fuir; mais la fuite pour eux étoit impos»sible; en se précipitant en foule ils s'em>> barrassoient les uns les autres. Le petit nom» bre qui parvint à s'échapper, s'enferma dans » leTemple de Salomon, et s'y défendit assez long-temps. Comme le jour commençoit à » baisser, nos soldats envahirent le Temple; pleins de fureur ils massacrèrent tous ceux qui s'y trouvèrent. Le carnage fut tel, que >> les cadavres mutilés étoient entraînés par

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(1) C'étoit un Sarrasin d'une taille gigantesque, que Godefroy fendit en deux d'un seul coup d'épée, sur le pont d'Antioche.

(2) La réflexion est singulière!

>> les flots de sang jusque dans le parvis; les >> bras et les mains coupés flottoient sur ce sang, et alloient s'unir à des corps auxquels >> ils n'avoient point appartenu. »

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En achevant de décrire les lieux célébrés par le Tasse, je me trouve heureux d'avoir pu rendre le premier à un poëte immortel le même honneur que d'autres avant moi ont rendu à Homère et à Virgile. Quiconque est sensible à la beauté, à l'art, à l'intérêt d'une composition poétique, à la richesse des détails, à la vérité des caractères, à la générosité des sentimens, doit faire de la Jérusalem délivrée sa lecture favorite. C'est surtout le poëme des soldats : il respire la valeur et la gloire, et comme je l'ai dit dans les Martyrs, il semble écrit au milieu des camps sur un bouclier.

Je passai environ cinq heures à examiner ie théâtre des combats du Tasse. Ce théâtre n'occupe guère plus d'une demi-lieue de terrain, et le poëte a si bien marqué divers lieux de son action, qu'il ne faut qu'un coup d'œil pour les reconnoître.

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Comme nous rentrions dans la ville par la vallée de Josaphat, nous rencontrâmes la

cavalerie du Pacha qui revenoit de son expédition. On ne se peut figurer l'air de triomphe et de joie de cette troupe, victorieuse des moutons, des chèvres, des ânes et des chevaux de quelques pauvres Arabes du Jourdain.

C'est ici le lieu de parler du gouvernement de Jérusalem.

Il y a d'abord :

1°. Un Mosallam ou Sangiachey, com. mandant le militaire ;

pour

2o. Un Moula-Cady ou ministre de la police;

3o. Un Moufty chef des santons et des gens de loi.

Quand ce moufty est un fanatique, ou un méchant homme, comme celui qui se trouvoit à Jérusalem de mon temps, c'est de toutes les autorités la plus tyrannique pour les Chrétiens. 4o. Un Moutenely ou douanier de la mosquée de Salomon;

5o. Un Sousbachi ou prévôt de la ville. Ces tyrans subalternes relèvent tous, Â l'exception du moufty, d'un premier tyran; et ce premier tyran est le pacha de Damas. Jérusalem est attachée, on ne sait pour

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