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bruit que le Cardinal Grimaldy alloit loger à Chaillot; et soubs ce prétexte, ce que vous auiez de plus précieux à Paris, fut transporté de ce costé là, soit à Ruel ou plus loin; mais on trouuera bien tout auec le temps. On sçait bien que lors de la sortie de M. d'Emery de la Surintendance, vous empruntastes de tout le monde, iusques à Desbournais qui vous presta dix mil liures. Les François ne sont point si dupes que de croire que vous ayez esté à cette extrémité; et l'orsque vous distes à Madame la Duchesse d'Aiguillon que vostre père auoit emprunté douze mil liures pour les funérailles de votre frère le Prescheur1, il me souuient qu'elle vous fist response qu'il valoit mieux que l'on crust que vous auiez douze millions que d'auoir esté réduit à cette extrémité d'emprunter vne si modique somme. Cela seroit-il bien possible que cela fust?

Si la coustume estoit en France de mettre les testes à prix, où dormiriez-vous en seureté? y a-t-il aucun de vos valets en qui vous vous puissiez confier? vous les auez si mal récompensez qu'il n'y en a aucun qui ne s'efforçast de l'auoir de cette sorte. Mais la France a des loix bien plus douces; ses formes ne se changent point; et le Parlement veut que son Arrest soit exécuté. Le Duc de Bouillon qui a tant souffert depuis qu'on luy promet de liquider son affaire de Sédan; Monseigneur le Duc de Beaufort après vne prison si violente de tant d'années iniustement passées au bois de Vincennes; le Mareschal de la Motte, dont l'on ne peut assez admirer la vertu après auoir receu vn si rude traitement de vostre Eminence, et tant d'autres braues gens que vous auez consommez de patience, en seront les exé

' Pierre Mazarin, cardinal de Sainte-Cécile.

cuteurs; ils feront la perquisition de vostre personne aux quatre coins et au milieu du Royaume; et si vous les échappez, ie l'iray dire à Rome. Vous pensez estre en grande seureté proche la personne du Roy. Détrompez vous, ie vous prie; la France en l'estat qu'elle est, a besoin d'vn autre Ministre; et le Roy d'vne autre personne pour veiller à son éducation.

Combien auez-vous leurré de personnes de condition pour les engager au seruice de l'éducation de Monseigneur, frère du Roy, ie m'en rapporte à Monsieur de Fontenay, que vous engageastes en l'Ambassade de Rome pour vn peu de temps, au braue comte de Cesy, qui en a receu mille lettres et qui en cette qualité a esté logé dans le chasteau de Fontainebleau. Pensez-vous auoir fait vn grand bien au Précepteur du Roy1, de luy auoir donné l'Euesché de Rhodez, pour le prieuré de Poissy que vous auez donné à l'abbé de la Machoire. Cela s'appelle escroquer vn bénéfice. Toutes ces façons vous décrient fort en France. On ne trouue pas fort estrange que vous ayez bienné l'abbé de la Riuière du Chapeau de Cardinal; cela s'appelle en langage Badaudois pain beny. Ie vous enuoye vn Rondeau qu'on a fait sur ce suiet, après que i'auray finy ma lettre; car aussi bien depuis que son Altesse de Conty a fait donner les passeports pour les Messagers, i'auray beaucoup de lettres à faire pour les Seruantes de Paris qui sont en peine de leurs bons amis les soldats des Gardes, que l'on dit que vous auez enuoyé à Saint-Denis pour estre noyez. Il est vray que l'argent que vous leur auez fait donner, ne les fera point couler à fond.

L'abbé de Beaumont de Péréfixe.

A la Riuière auint cas fort nouueau,

Et très fâcheux quand on luy dit : «< tout beau,
Vous n'estes pas encor du consistoire; »
Car pour sa teste vn Capelan doit croire,
Qu'vn chapeau rouge est vn trop lourd fardeau.
Vn prince veut en affubler sa peau;
D'y résister vous passeriez pour veau;
Et comme vn asne on vous meneroit boire
A la riuière

Quoy vous ranger dans le sacré troupeau,
Vous dont le père et le gris de bureau
Dedans Montfort gauloit et pomme et poire!
Rentrez chez vous, pédant à robe noire;
Ou l'on renuoye et l'homme et le chapeau
A la riuière.

A trompeur, trompeur et demy, Seigneur Iules. Puisque vous auiez trouué vne bonne place en France et que les peuples estoient accoutumez d'auoir vn Cardinal, vous vous y deuiez tenir et ne rien entreprendre. Ie vais dresser vn petit discours pour vous faire voir vos fautes, afin de vous donner moyen de faire vne bonne confession générale; car on dit que ce que vous auez de plus court, est la mémoire. Ressouuenez-vous du Proverbe de votre pays,

Ché ben sta, no si moue.

C'est assez vous dire vos fautes; mais prenez garde à vous; car les Arrests de la Cour du Parlement sont d'vn grand poids'; et très-difficile de les éuiter. Quoyque mon style soit de très-bas pris, néanmoins ie vous diray ce petit passage d'Horace :

Raro antecedentem scelestum

Deseruit pede pœna claudo.

Monsieur, vostre seruiteur et bon amy,

Les Triolets du temps, selon les visions d'vn petit fils du grand Nostradamus, faits pour la consolation des bons François et dédiés au Parlement [3359] '.

(4 mars 1649.)

Parisiens, ne resuez pas tant.
La défense est tousiours permise.
En ce malheureux accident,
Parisiens, ne resuez pas tant.
Ça, ça, vite; il faut de l'argent.
Donnons tout, iusqu'à la chemise.
Parisiens, ne resuez pas tant.
La défense est tousiours permise.

Suiuons nostre illustre Pasteur2.
On ne peut après luy mal faire.
C'est vn maistre prédicateur.
Suiuons nostre illustre Pasteur,
Cet autre Paul, ce grand Docteur
Que toute l'Eglise réuère.
Suiuons nostre illustre Pasteur.
On ne peut après luy mal faire.

le veux moi mesme aller aux coups,
Moi qui ne suis qu'homme d'estude.

* On les attribue à Jean Duval, auteur du Parlement burlesque de Pontoise [2701].

* Jean François Paul de Gondy, archevêque de Corinthe et coadjuteur

de Paris.

Pour donner bon exemple à tous,

Ie veux moi mesme aller aux coups.
S'il faut mourir, ie m'y résous,
Encor que la mort soit bien rude.
le veux moi mesme aller aux coups,
Moi qui ne suis qu'homme d'estude.

Qu'ils prient bien, nos ennemis,
S'ils ont la piété dans l'âme.
Ce saint deuoir leur est permis.

Qu'ils prient bien, nos ennemis,

Sainct Germain, Sainct Cloud, Sainct Denys;

Nous auons pour nous Nostre Dame.

Qu'ils prient bien, nos ennemis,

S'ils ont la piété dans l'âme.

Nos greniers sont remplis de blé.
Qu'on en fasse de la farine.
Le peuple a tort d'estre troublé.
Nos greniers sont remplis de blé.
On ne sçauroit estre accablé,
D'vn an entier, de la famine.
Nos greniers sont remplis de blé.
Qu'on en fasse de la farine.

Les cabarets sont tous ouuerts.
Chascun y boit; chascun y mange.
On y trouue des vins diuers.
Les cabarets sont tous ouuerts.
Et c'est là que i'ai fait ces vers
Qui sentent la saulce à l'orange.
Les cabarets sont tous ouuerts.
Chascun y boit; chascun y mange.

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