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Requeste présentée à Monseigneur le Prince par les vignerons de son gouuernement de Bourgogne, en vers burlesques [3501].

(3 juin 1649.)

Vous supplient très humblement
Ceux de vostre Gouuernement
Dont la main façonne la vigne,
D'auoir audience bénigne.
La grandeur que vous possédez,
Fait
que si vous nous accordez
De parler auec hardiesse,

Nous vous appellerons Altesse

Et tous les autres plus beaux mots
Qui peuuent rehausser vn los;
DISANS que toute nostre troupe
Qui ne met de l'eau qu'en sa sou pé,
Honoroit vostre géniteur,
Qui l'aymoit aussi de bon cœur,
Puisqu'il chinquoit à tasse pleine,
A longs traits et perte d'haleine,
Dedans Paris et dans Dijon,
Nostre vin qu'il trouuoit si bon;
Que depuis la meschante guerre
Que le Diable mit sur la terre
Le matin d'après le Roy boit,
Aucun batelier on ne voit
Ramer pour Paris sur Yonne,
Afin de luy vendre la tonne
De nos vins plus délicieux
Et rapporter des escus vieux.

Que Bacchus, fasché contre vous,
Nous fait ietter à vos genous;
Qu'il dit que iamais vostre père
Contre luy ne fut en colère;
Qu'il n'empeschoit point ses bateaux
De porter ylà ses tonneaux,
Ny mesme sa douce moutarde
Dont le Badault se papelarde

Alors qu'il mange, le matin,
De la saulcice ou du boudin,
Ou bien quelque fameuse andouille,
Faisant la nique à la patrouille;
Et de plus il estoit tant bon
D'y porter du bois et charbon....

Qu'aussy nostre main libérale
Dessous l'autorité Royale

Luy payoit tousiours promptement
Son plat et son appointement;
Que ce prince estoit politique;
Qu'il sçauoit mesme la pratique;
Qu'il estimoit les Parlemens;
Qu'il calmoit les soulèuemens;
Qu'il estoit déuot à l'Esglise

Où Sainct Pierre a sa chaire mise;
Qu'il aymoit les religieux

Et faisoit des actes pieux;

Qu'il ne vuidoit point leur besace;

Qu'il aymoit la dame Fricace
Qui faisoit bien les saupicquets;
Qu'il haïssoit les affiquets
Et toutes les femmes infâmes;
Qu'il prisoit les honnestes dames;
Que, sans iurer le nom de Dieu,
Il iuroit seulement Mebieu;

Qu'il payoit tousiours le salaire
De monsieur son apothicaire,
Estant encor sur le bassin,
Aussi bien que son médecin;

Qu'en son temps on voyoit nos filles,
Belles, honnestes et gentilles,
Danser sous l'orme à petits bonds
Ainsi que de petits moutons;
Que nos gars plus remplis d'audace
Se faisoient souuent la grimace,
Estans l'vn de l'autre ialoux

Qui seroit plustost leur époux;
Qu'ils estoient en bonne posture
Auec beaux gants, belle ceinture,
Auec du volet au chapeau
Et des toufets au renouueau;
Que la fluste alloit en cadence;
Que si dans ou dehors la danse
Quelqu'vn vouloit de son grouin
Choquer le muzeau de Catin,
L'ayeul y prenoit bientost garde,
Encore mieux la mère moucharde
Qui les contenoit dans l'honneur;

IL VOUS PLAISE, braue Seigneur,
Remettre la France en honneur
Et dans Paris, la grande ville,
Ramener nostre Roy pupille,
Sa mère Régente et la Cour....
D'oster l'impost et le péage
Qui ne sont de l'ancien vsage;
De prier Dieu soir et matin;
Ne point hanter le libertin;
Garder la loi que Dieu nous donne;
Honorer la triple Couronne;

Prendre le conseil des vieillars;
Écarter ces ieunes raillars

Qui ne sont propres qu'à la danse
Et qui font vn Dieu de leur panse....

Le Branle-Mazarin dansé au souper de quelques vns de ce parti là chez monsieur Renard où monsieur de Beaufort donna le bal [605]'.

(18 juin 1649.)

L'affront en est encore vne fois demeuré aux Perturbateurs du repos public. Ie les nomme ainsi puisqu'au milieu du calme et de la paix ils recueillent par leurs insolences et leurs discours iniurieux vne querelle où ils n'ont eu et n'auront iamais que de la confusion.

Monsieur de Beaufort, ce Démon Tutélaire de Paris, ce Père du peuple, inaccessible aux offres aduantageuses, inesbranlable dans les périls et modéré dans les victoires; ce Prince, dis ie, qui a despouillé d'honneur les brouillons de l'Estat, en donnant du pain à Paris, vient de soustenir l'honneur de Paris en ostant le pain et quelque chose auec à ces brouillons.

Mais ie voudrois bien demander à ces Messieurs là en

'C'est le pamphlet qu'Omer Talon et Mailly citent sous le titre inexact de le Branle des Mazarins, dans la maison de Renard et fait par M. le duc de Beaufort. Il y a sur le même sujet la Relation de ce qui s'est passé aux Tuileries entre M. le duc Beaufort, etc. [3123], la Nappe renuersée chez Renard, etc. [2525], la Soupe frondée [3704], le Grand Gersay battu, etc. [1510], la Déroute des cabalistes au iardin de Renard, etc. [1048], le Combat généreux de Mgr le duc de Beaufort, etc. [714].

quoy consiste l'honneur et la vertu, et quels Généraux sont dignes de mespris, ou ceux de Paris, ou ceux de Sainct Germain.

Si nous raisonnons en Chrestiens sur ce fondement

que la Charité est la Reyne des vertus, et le niueau sur lequel tournent toutes les bonnes actions, nous trouuerons que les Généraux de Paris en protégeant l'innocent et le foible, en donnant du pain à des millions de personnes, en deffendant les Autels et les Vierges contre l'insolence du soldat, méritent bien plus d'honneur et de louange que ceux de l'autre party, qui ont commis toutes les inhumanitez et toutes les barbaries.

Si nous passons des vertus Chrestiennes aux Morales, y auoit il rien de plus lasche parmy les Payens que d'abandonner la Patrie à l'esclauage et à la Tyrannie? y auoit il rien de plus honteux que de préférer son intérest particulier au bien public? et rien de plus infâme que de renoncer à sa conscience et à sa raison pour suiure aueuglément les passions d'autruy?

Mais pour iuger de la cause par les effects, qu'ont fait ces généraux de Sainct Germain ? Ils ont exposé l'authorité Royale; ils ont conceu vne montagne et n'ont accouché que d'vne souris; ils ont pris Charenton et Brie; ils ont forcé les cabanes des pauures villageois et les Vierges désarmées', et ont perdu tant d'honneur, qu'il ne leur en reste que ce que nous leur en auons voulu laisser.

Les Généraux de Paris ont sauué l'authorité Royale, protégé les Autels et la Iustice, soustenu auec de mauuaises troupes tous les efforts d'vne armée Royale, et

'On peut voir plus haut la Lettre du père Michel, etc.

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