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Seigneur, malgré la brigue et la clameur pu blique,

Parmi les doctes Sœurs vous venez de placer,

La juste et la saine Critique. Elle vient s'établir dans l'Etat Poëtique, Pour y maintenir l'ordre et pour le policer. Je ne sçaurois, pour moi qui préside au Comique, Et qui tiens de ses traits mon plus grand agré

ment,

Donner à votre choix trop d'applaudissement.
Quel bonheur de la voir gouverner le Parnasse;
Elle qui par le vrai se regle uniquement,
Et ne fait à personne injustice ni grace,

Apollon.

Dans le monde on a d'elle une autre opinion;
Par un injuste effet de la prévention,
De tout le Genre humain on la croit l'ennemie
On croit que sans égard et sans distinction,
Elle condamne tout par une basse envie,

Pour détruire les faux Portraits,
Qu'a fait d'elle en tous lieux la noire calomnie
Il faut aux yeux de tous qu'elle se justifie,
Et dévoile au grand jour ses veritables traits.

Chacun viendra lui rendre hommage, Et la feliciter sur ses honneurs nouveaux; Elle doit faire voir que son goût toûjours sage, Sçait approuver le vrai, comme blâmer le faux;

Qu'elle

Qu'elle reprend sans fiel, et que son badi. nage,

Sans blesser la personne, attaque les deffauts; Elle ne prétend plus sur tout qu'on la co fonde,

Avec la Satyre, sa sœur,

Qui sous son nom, s'affichant dans
monde,

Lui fair partager sa noirceur;
-Elle sent trop qu'il est de son honneur
De démasquer cette même Satyre,
Qui dans sa maligne fureur

Ne reprend point par le désir d'instru
Mais par le noir plaisir qu'elle prend à m
Et de désavoier tous ces Auteurs obscurs
Dont la plume anonyme,
Jusques sur la vertu, répand ses traits in
Et qu'inspire en secret, sa sœur illégitim
Je dois moi-même les punir,
Et pour jamais bannir
Cette engeance coupable,

Four la gloire de l'Art qu'elle rend me
Dans la troisiéme Scene, C
s'applaudit d'un ouvrage qu'il a
pris; c'est la Critique du Public.
bleau présenté au Public lui -
sous les traits les plus ressemblans

morceau que nous n'avons pas cru devoir

ometre.

Apollon.

Le projet est nouveau, mais voudriez-vous bien Me détailler et m'apprendre

Ce que dans le Public vous trouvez à reprendre Soit dans ses actions, ou dans son entretien

Chrisante.

Mille travers, mille bévuës,

Son gout pour le Clinquant, dont il est le son tien,

Et pour la nouveauté qu'il porte jusqu'aux nnës,
Ou qu'il met au dessous du rien;
Car jamais il ne garde un milien raisonnable
Chez lui tout est divin, ou tout est misérable.
Sa fureur pour la mode et pour tout Charlatan
Tous les usages foux dont il est partisan,
Toutes ses politesses fades,
Ses visites, ses embrassades,
Et ses saluts du premier jour de l'an,
Du Carnaval ses Mascarades,
Du Mardy Gras son transport Calotin,
Et son air sot le lendemain,
Son exercice aux Thuileries",
Ses caracols, ses lorgneries;
Aux Spectacles, ses flots, ses vertiges frequens,
Ses battemens de mains donnez à contre-temps;
E Tou

Toutes ses moucheries,

Ses baillemens, ses crachemens

Aux endroits les plus beaux, les plus interess

:

sans;

Son ridicule étrange

De recevoir avidement

La plus insipide loüange,

Et d'applaudir toujours le banal compliment,

Qu'on lui retourne incessament;

Sa rage opiniatre,

De crier presqu'à tout moment,
Place aux Dames, place au Théatre;
Parlez plus haut; l'habit noir, chapeau bas
Paix, Monsieur l'Abbé, haut les bras;

Annoncez; bis, la Capriole,

Et pour tout dire, enfin, l'insupportable Rôle
Qu'il fait, dès qu'au Parterre il se trouve pressé,
Ce qui révolte l'ame, et fait hausser l'épaule
A tout homme de gout, à tout homme sensé.

Apollon.

Vous peignez là la multitude, Mere du tumulte et du bruit, Que n'arrête aucun frein, que l'exemple séduit; Qu'entraîne la coutume, ou l'aveugle habitude, Et non le vrai Public que la raison conduit, D'où part ce grand corps de lumiere, Qui me guide moi-même, et sans cesse m'é claire

Ce

Ce Public, en un mot, avec choix assemblé

Tel qu'on le voit paroître

Aux yeux d'un Théatre réglé.

Quand il écoute en Sage, et qu'il prononce en Maître

Ses Arrêts qui le font si dignement connoître, Et dont nul, avant vous, n'a jamais appellé.

Pour mettre le Lecteur en état de juger du Dialogue de cette Piece, voici le com mencement de la 6o Scene, entre la Cris tique et la Médisance.

Madame, je prens part, comme votre parente A votre fortune éclatante,

La Critique.

Pardon, j'ai de la peine à remettre vos traits J'ai beau vous regarder de près.

La Medisance.

J'ai poutant avec vous assez de ressemblance
La Critique ne devroit pas

Méconnoître la Médisance.

Et de moi dans le monde on fait assez de cas Pour m'avoüer d'abord sans nulle repugnance.

La Critique.

Si je vous méconnois, il n'est pas surprenant;

Le chemin que je tiens, est different du votre

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