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que

pour recevoir d'eux le sujet communément dit d'expérience, il voulut bien encore aller au-devant de cette difficulté. Comme le prétexte qui la faisoit naître étoit de nature à trouver beaucoup de partisans, c'étoit en agir sagement que d'empêcher qu'on le débattît avec éclat, et de mettre hors de cause ceux qui seuls étoient à portée de le faire valoir. Il consistoit à dire la réunion ordonnée par S. M. de tous ses peintres et sculpteurs par brevet au corps de l'Académie l'étant purement et simplement, et sans condition quelconque, c'étoit à l'Académie aussi bien qu'à eux, brevetaires, à se conformer littéralement à cet acte de la volonté du roi, et qu'elle ne pouvoit exiger d'eux nulle sorte de soumission sans y roger formellement, leur supériorité dans l'art étant constatée par un titre aussi respectable qu'étoit leur brevet. Ce sophisme n'eût pas été bien difficile à combattre, et la seule révocation des brevets le renversoit de fond en comble. M. Le Brun évita de s'y arrêter, afin de ne lui pas donner cours, et fut lui-même trouver ceux des habiles qu'il en savoit le plus entêtés. Il s'offrit d'être leur présentateur à l'Académie; il les assura qu'un mérite aussi considérable que le leur y trouveroit une exemption honorable de tout examen et de toute autre formalité semblable. Bref, il fit si bien qu'il les ramena tous.

Mais comme l'exemple d'une telle exemption pouvoit être d'une dangereuse conséquence pour l'avenir, il prit la précaution de s'y faire autoriser par une espèce d'ordre supérieur, applicable déterminément à l'occurrence du jour. Il engagea donc M. Colbert à déclarer, dans une audience qu'il eut de ce ministre avec plusieurs autres députés, que l'intention du roi étoit que, pour consommer sans délai la réunion au corps académique de tous les artistes capables de rendre service à Sa Majesté, la compagnie passât outre pour cette fois, et sans tirer à conséquence, à la réception des peintres et sculpteurs brevetaires du roi, en les dispensant, là où elle le jugeroit à propos, des formalités accoutumées. Par cet expédient, M. Le Brun trouva le moyen de concilier tout, et de rompre les séditieux projets des jurés et de leurs hormis suppôts, n'y ayant aucun brevetaire, M. Mignard et son conjuré, qui ne se tînt plus honoré de la qualité de simple académicien que de tout ce que la maîtrise pouvoit offrir de grades plus relevés ou plus bouffants.

Disons tout cependant. Si l'Académie, en s'assurant ainsi de la totalité presque complète de cette jonction, se procuroit un accroissement considérable du côté du nombre, il s'en falloit beaucoup que celui de sa réputation, fondé sur le mérite réel et supérieur, en résultât également. Du

rant plusieurs mois, elle ne fut presque occupée qu'à la réception de ces privilégiés. Comme la plupart des brevets avoient été accordés fort légèrement, il se trouva parmi ces récipiendaires un certain nombre de sujets d'une assez médiocre capacité. Mais l'Académie, ayant eu forcément à opter de celui de ces deux inconvénients celui qui lui paroîtroit le moins considérable, s'étoit déterminée pour le dernier, persuadée que lenuage qu'il pourroit répandre pour un temps sur l'excellence de sa constitution n'empêcheroit pas qu'elle ne reprît bientôt son premier éclat, par le redoublement de ferveur avec lequel elle se promettoit de suivre cet objet.

Tandis que ces choses se passoient de la sorte, les nouveaux statuts avoient été expédiés de l'exprès commandement du roi, sous la date du 24 décembre 1663, et les lettres patentes confirmatives signées sous celle des mêmes mois et an et scellées en la forme ordinaire, et le tout avoit été envoyé par duplicata, avec les lettres d'adresse, nécessaires aux trois cours souveraines, pour y être vérifié et enregistré. L'Académie, loin d'avoir eu aucune démarche à faire pour obtenir une si prompte expédition, ne l'apprit que par l'avis que lui en donna M. du Metz. Il l'exhorta en même temps de faire, sans différer, toutes les diligences convenables pour consommer cette affaire dans les cours et sur

tout au parlement. Les attentions de cet admira-. ble ami alloient donc encore jusqu'à nous soulager de la légère peine de solliciter cette favorable expédition. Quant à la chose même, ce que les trois premiers hommes de l'état, M. le chancelier, M. de La Vrillière et M. Colbert, y montrèrent, comme à l'envi, d'amour et d'ardeur pour gratifier et obliger l'Académie, fournit l'époque peut-être la plus glorieuse de son histoire, et sûrement la plus touchante. Le souvenir lui en doit être à jamais précieux, et doit être gravé en nos cœurs et en ceux de nos descendants ou successeurs en caractères ineffaçables.

L'affaire des enregistrements fixa aussitôt toute la sollicitude de M. Le Brun et des autres chefs académiques, non seulement par déférence pour les sages avis de M. du Metz, mais parce qu'ils la considéroient comme le terme final de leurs travaux et de leurs plus tendres youx. Personne n'étoit plus capable de la suivre et d'en diriger les diverses opérations que le secrétaire de la compagnie. Elle lui en confia le soin d'un vœu unanime, et le pria d'avertir M. Le Brun et les autres officiers du temps où il faudroit qu'ils commençassent à agir auprès des premiers magistrats et des membres particuliers des trois compagnies de qui ils pouvoient être bien voulus, afin de les instruire à fond de la justice et de l'utilité de l'ar

rangement en question. M. Testelin se chargea de la commission avec un zèle et une joie dignes de lui. Aimant l'Académie comme il faisoit, il se trouvoit, en la servant, au comble de ses souhaits.

En même temps, elle crut devoir se mettre en règle sur la nouvelle forme de son administration et règlement. Par l'article 10 des nouveaux statuts, il étoit ordonné que les quatre recteurs de l'Académie seroient à l'avenir perpétuels, et seroient choisis et nommés par le roi. Pour satisfaire à cette disposition, elle procéda, en la manière accoutumée, à l'élection de ceux que la pluralité des suffrages déclaroit les plus dignes d'être présentés à Sa Majesté et plus propres à remplir ces places-là. Elle en usa de même à l'égard des autres officiers académiques, et dressa une liste générale des sujets ainsi élus et de l'événement du scrutin à l'égard de chacun d'eux. Cette liste fut présentée par une députation à M. Colbert, qui, en ayant rendu compte, l'approuva de la part du roi, la signa, et ajouta au bas que l'intention de Sa Majesté étoit que, sans tirer à conséquence et jusqu'à ce qu'il en fût autrement ordonné, l'une des quatre places de recteurs demeurât amovible sur le pied des précédents règlements. Cette exception à la nouvelle loi eut pour objet la réunion de quelques maîtres recommandables par la supé

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