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très-vraisemblablement à des artistes italiens, le manuscrit en est d'autant plus curieux à étudier sous le rapport de l'art. On y rencontre à chaque page l'écu des Rochechouart (fascé ondé d'argent et de gueules de six pièces).

Nous avons parlé de manuscrits où la chronique de Monstrelet se trouve plus ou moins abrégée. La Bibliothèque impériale en possède deux. L'un, portant le n° 8344, est un beau volume in-folio, vélin, relié en maroquin rouge. Il est écrit à deux colonnes et contient 407 feuillets, y compris la table des chapitres qui est en tête. Il est orné de petites miniatures assez bien traitées, l'une surtout (folio 52) qui représente le meurtre du duc d'Orléans; avec les détails de la main coupée et du page allemand couché sur son maître. Il commence : «< Premièrement, dit Enguerran de Monstrelet pour donner congnoissance aux lisans dont vindrent les haynes et divisions qui furent en France durant le regne d'icelluy roy Charles VI, dont sy grans maulx vindrent en son royaume que c'est pitié du recorder. » Il s'arrête à la descente du comte de Salisbury en France, l'an 1428. L'écriture nous paraît être de la fin du xve siècle.

L'autre Monstrelet abrégé est un volume in-4, dont le papier est au filigrane d'un écu de France, et relié aux armes et au chiffre de Charles IX. Il a 387 feuillets numérotés à l'encre rouge, non compris 14 autres non numérotés, en tête, contenant la table des chapitres. Au premier feuillet on lit la rubrique : « Cy commence le premier livre de la cronique que fist Enguerran de

Monstrelet, qui traicte des guerres et divisions de France et d'Angleterre, depuis l'an mil quatre cens jusques à l'an mil cinq cens vingt deux, c'est à sçavoir jusques au trespas du roy Charles de France. » puis les mots : « Prohème dudit livre. » Et enfin le texte commence par ces mots : « Extrait des histoires et croniques faites et compilées par noble homme Enguerran de Monstrelet demourant à Cambray. Commençans icelles croniques, etc. » Au verso du folio 384 on lit la rubrique «< Cy fine le premier livre que fist en son temps Enguerran de Monstrelet. » Le folio 385 est en blanc, le folio 386 manque. Enfin au folio 387 et dernier, on lit, d'une main de la fin du xvr° siècle :

« Ce présant livre appartient à moy Crestophe Hesselin demourant en la rue des Bourdonnoys à Paris. Qui le trouvera, si luy rende, et il paira voluntiers le vin à la St.-Martin.

Qui me trouvera, soit gueux ou mille,
Je luy supplie de cuer enclin

Me rendre à une belle fille,

Son nom Marguerite Hesselin.

Nous n'avons reproduit ceci que pour montrer la bizarre destinée de ce livre, qui, des mains de Charles IX tombe dans celles d'un bourgeois de la rue des Bourdonnais. Ce manuscrit n'est, comme on le voit, qu'un abrégé de Monstrelet, et encore du premier livre seulement.

Quant aux deux manuscrits de la Bibliothèque de l'Arsenal, nous n'en dirons que peu de chose, leur im

portance disparaissant tout à fait devant la plupart de ceux dont il vient d'être question. Le premier, qui porte la cote Hist. 147, est un volume in-folio, papier à deux colonnes et à rubriques, de 387 feuillets. C'est un abrégé des deux premiers livres de la chronique de Monstrelet. L'écriture peut remonter au temps de Henri II. Il a appartenu à la famille de SaintGelais, comme le prouve la mention de la naissance de plusieurs personnes de cette famille, qui se trouve au dernier feuillet. L'autre manuscrit de l'Arsenal, Hist. 146, est encore un abrégé, mais qui n'embrasse pas même tout le premier volume, puisqu'il s'arrête au traité de Pouilly-le-Fort du 18 juillet 1419. C'est un in-folio, papier à deux colonnes et à rubriques, d'une écriture de la fin du xv° siècle.

Toutes les éditions de Monstrelet, à l'exception de la dernière, celle de Buchon, s'accordent à donner trois livres à la chronique de Monstrelet. On a vu que les manuscrits complets donnaient également ces trois livres. Cependant Ducange1, et après lui Dacier, avaient conçu des doutes sur l'authenticité de ce troisième livre. Comme il s'étend de l'année 1444, où finit le second, jusqu'à l'année 1467, il y avait, rien que dans cette dernière date, une objection invincible, Monstrelet étant mort en 1453. Aussi Buchon, lorsqu'il donna son édition de Monstrelet en 1826, prit, par d'excellentes raisons, assez mal présentées au reste dans

1. Notes et observations sur Monstrelet. C'est une plaquette de 10 p. conservée à la Bibl. imp. Ms. Ducange 1218. Nous la citons sous la rubrique Notes de Ducange.

sa première préface, le parti de n'admettre comme
appartenant en propre à notre chroniqueur que les
deux premiers des trois qui avaient jusqu'alors passé
sous son nom, restituant ce troisième livre à Mathieu
de Coucy. Et, en effet, ce dernier dit positivement
qu'il commence sa chronique là où finit celle de Mon-
strelet, c'est-à-dire en 1444. Aussi la difficulté n'est-
elle
pas de savoir s'il faut, oui ou non, retrancher de
la véritable et authentique chronique de Monstrelet ce
troisième livre, mais bien d'expliquer comment toutes
les éditions et tous les manuscrits complets l'y ont fait
entrer. Voici, suivant nous, comment on pourrait ex-
pliquer le fait. Les manuscrits de Monstrelet, qui con-
tiennent seulement les deux livres, arrêtent le récit par
ces mots : « Comme il sera dit dans mon tiers livre, »
phrase qui, à la vérité, démontre bien le projet qu'avait
Monstrelet de donner, un troisième livre, mais qui
n'implique pas nécessairement qu'il ait écrit ce troi-
sième livre, ni surtout qu'il l'ait publié. Un autre ar-
gument dont Buchon ne s'est pas servi, et qui pourtant
nous semble assez fort, c'est que dans toutes les édi-
tions et dans tous les manuscrits, chacun des deux
premiers livres est précédé d'une préface, tandis que
le troisième n'en a pas. On ne voit pas bien pourquoi
Monstrelet aurait ainsi abandonné une méthode bonne
en soi, et que d'ailleurs il semblait affectionner. Disons
donc qu'il n'a vraiment fait, ou du moins mis au jour,
que ses deux premiers livres. Quant au troisième, voici,
selon nos conjectures, ce qui a pu arriver. Les pre-
miers éditeurs se seront servis de manuscrits n'ayant

que les deux premiers livres, et ils auront mis, au lieu du troisième qu'ils y trouvaient annoncé et qu'ils n'avaient pas, le premier manuscrit traitant des mêmes matières et pouvant servir de continuation, qu'ils auront eu sous la main. Si l'on nous objecte l'existence des manuscrits aux trois livres, nous répondrons qu'on bien pu faire là ce qu'on avait fait pour les imprimés, et qu'en copiant un manuscrit à deux livres ayant le renvoi au troisième, on aura suppléé, de la même manière que pour les imprimés, à l'absence de ce troisième livre. En résumé, nous ne regardons comme parfaitement authentiques que les deux premiers livres de Monstrelet, c'est-à-dire celui qui commence à 1400 et qui finit à 1422, et celui qui, reprenant à l'avènement de Charles VII, s'arrête assez brusquement à l'année 1444. Ce sont donc ces deux livres seuls que comprendra notre édition, comme celle de Buchon.

Pour le premier livre, qui s'étend de 1400 à 1422, notre texte est la reproduction littérale du manu̟scrit 8347. Nous n'y avons absolument rien changé, si ce n'est que nous écrivons les chiffres en toutes lettres, et aussi que nous avons cru nécessaire de suivre dans le numérotage des chapitres l'ordre des imprimés, qui en donnent 268 pour ce premier livre, tandis que notre manuscrit n'en donne que 258. Comme nous l'avons déjà dit, c'est toujours la même quantité de texte, seulement différemment coupé. A ce texte de notre manuscrit 8347 nous joindrons, à leur place voulue, à la fin de chaque volume,

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