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« Sur sa flotte en débris précipiter le vent,

« Et sur un roc aigu le clouer, lui vivant!

<< Et moi, moi, femme et sœur du maître du tonnerre, <«< Je traîne avec ce peuple une impuissante guerre!

<< Oh! qui voudrait encor s'abaisser à Junon,

<< Et perdre son encens en invoquant ce nom? »

De ces brûlans chagrins l'ame entière remplie,
La haineuse Junon descend en Eolie;

Empire des autans, Éole en est le roi :

C'est lui qui les contient sous sa puissante loi,

Qui refoule aux cachots, qui comprime de chaînes

Les indociles vents, les tempêtes hautaines.

Ces captifs indignés, par leurs rugissemens,

Font murmurer le mont dans ses creux fondemens.

Éole étend sur eux son sceptre tutélaire,

Dompte leur turbulence, assoupit leur colère ;

Sinon, ils sortiraient par bonds séditieux,

Broyant, comme un chaos, l'eau, la terre et les cieux: Mais Jupiter, craignant ces fureurs convulsives, Accumula sur eux des montagnes massives,

Et les rendit sujets d'un maître souverain,

Ad quem tum Juno supplex his vocibus usa est :
Eole (namque tibi divum pater atque hominum rex
Et mulcere dedit fluctus, et tollere vento),
Gens inimica mihi Tyrrhenum navigat æquor,
Ilium in Italiam portans, victosque Penates :
Incute vim ventis, submersasque obrue puppes;
Aut age diversos, et disjice corpora ponto.
Sunt mihi bis septem præstanti corpore Nymphæ,
Quarum, quæ forma pulcherrima, Deïopeam
Connubio jungam stabili, propriamque dicabo ;
Omnes ut tecum meritis pro talibus annos
Exigat, et pulchra faciat te prole parentem.

Æolus hæc contra: Tuus, o regina, quid optes
Explorare labor; mihi jussa capessere fas est.

Tu mihi quodcumque hoc regni, tu sceptra Jovemque
Concilias; tu das epulis accumbere divum,

Nimborumque facis tempestatumque potentem.

Qui lâche avec prudence, ou resserre leur frein.

Junon lui fit entendre une voix qui supplie:

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Toi, par qui la mer gronde, ou retombe amollie,

Éole! car le roi des dieux et des humains

Déposa ce pouvoir entre tes sages mains;

Écoute: Un peuple impie et digne de ma haine

Navigue en ce moment sur la mer de Tyrrhène,

<< Portant dans l'Italie, à travers les rescifs,

<< Sa patrie exilée et ses dieux fugitifs:

« Déchaîne donc tes vents, frappe, engloutis, disperse

« Et leur flotte maudite et leur race perverse.

« Des quatorze beautés qui décorent ma cour,

« Je promets Déiopée à ton brûlant amour;

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L'hymen t'en fera maître, et des fils beaux comme elle,

<< Orgueil de tes vieux ans, pendront à sa mamelle. »>

<< Ordonne, dit Éole, et tes vœux sont ma loi.

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<< Mon sceptre, ma faveur, mon rang, tout vient de toi; << Par toi l'Olympe s'ouvre et m'invite à ses fêtes; << Par toi je suis le roi des vents et des tempêtes. >>

Hæc ubi dicta, cavum conversa cuspide montem Impulit in latus: ac venti, velut agmine facto, Qua data porta, ruunt, et terras turbine perflant. Incubuere mari, totumque a sedibus imis

Una Eurusque Notusque ruunt, creberque procellis Africus; et vastos volvunt ad littora fluctus.

Insequitur clamorque virum, stridorque rudentum.
Eripiunt subito nubes cœlumque diemque
Teucrorum ex oculis : ponto nox incubat atra.

Intonuere poli, et crebris micat ignibus æther:
Præsentemque viris intentant omnia mortem.

Extemplo Æneæ solvuntur frigore membra :
Ingemit, et, duplices tendens ad sidera palmas,
Talia voce refert : O terque quaterque beati
Queis ante ora patrum, Trojæ sub moenibus altis,
Contigit oppetere! O Danaum fortissime gentis
Tydide, mene Iliacis occumbere campis

Non potuisse, tuaque animam hanc effundere dextra,
Sævus ubi Æacidæ telo jacet Hector, ubi ingens

Sarpedon, ubi tot Simoïs correpta sub undis

Scuta virum galeasque et fortia. corpora

volvit !

Il dit, lève le sceptre, et dans ses vastes flancs, Heurte le roc; soudain, en bataillons sifflans, L'Eurus, le vent d'Afrique, au vol prompt et rapace, L'Aquilon, tous les vents bondissent dans l'espace : Ils tourmentent la mer jusqu'en ses noirs limons, Et roulent sur ses bords des flots comme des monts. Le jour fuit; des vaisseaux que l'ombre noire accable Sortent des cris, mêlés au grincement du câble : La voûte des cieux gronde, et chaque éclair qui sort Illumine partout l'image de la mort '.

Tout à coup un frisson saisit le corps

d'Enée ;

II pousse un long soupir, et l'ame consternée,
Les deux bras étendus vers le ciel désastreux,
Il s'écrie : « O trois fois et quatre fois heureux®,
« Ceux qui, devant Pergame encor non asservie,
<< Sous les yeux paternels ont exhalé leur vie!
« O le plus belliqueux de tous nos ennemis,

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« Diomède! le sort ne m'a donc pas permis <«< De finir mon destin par ta lance guerrière, « Dans les champs d'Ilion, dans la même poussière

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