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HISTORIQUE ET CRITIQUE

SUR

BARTHÉLEMI-ÉTIENNE MURILLO.

La multiplicité des peintres dont les tableaux décorent avec honneur les palais, les églises et les musées, n'empêche pas de voir que dans chaque école il se trouve un peintre d'un talent tellement supérieur, que son nom presque seul se retrouve dans tous les souvenirs. C'est ce qu'on peut remarquer à l'égard de Murillo, qui, dans l'esprit de plusieurs personnes, est le peintre espagnol par excellence, et se trouve placé à la tête de cette école, comme Raphael, Titien, Rubens, Rembrandt et Poussin le sont dans les écoles romaine, vénitienne, flamande, hollandaise et française.

Barthélemi-Étienne Murillo naquit à Séville, le 1er janvier 1618, et non pas à Pilas en 1613, comme l'ont écrit plusieurs auteurs. Sa famille vivait dans l'aisance, et son premier maître fut Jean del Castillo, son oncle. Ce peintre ayant été s'établir à Cadix, Murillo se trouva abandonné à lui-même, et il s'occupa à faire, pour la foire de Séville, de petits tableaux de pacotille. Il existe encore dans cette ville trois tableaux de cette époque: l'un est au Collège de la Reine, l'autre dans le couvent de Saint-François, et le troisième au collège de Saint-Thomas. Son travail alors était un peu sec, et on ne trouvait pas dans sa couleur ces tons suaves qu'il sut acquérir par la suite.

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NOTICE HISTORIQUE ET CRITIQUE

Pierre de Moya, élève de Van Dyck, s'arrêta quelque temps à Séville en revenant de Londres: Murillo, émerveillé du coloris que ce peintre avait puisé dans les leçons de Van Dyck, chercha tous les moyens de l'imiter; mais, cet artiste retournant à Grenade sa patrie, le jeune peintre eut à peine le temps de recevoir quelques conseils de lui.

Murillo, âgé de 24 ans, avait un vif désir d'aller en Italie; voulant se procurer les moyens de faire ce voyage, il revient à son premier travail, achète de la toile, la divise par carrés, qu'il imprime lui-même, peint dessus des compositions de piété, des fleurs, et quelques sujets de genre; les vend en masse à un chargeur qui allait en Amérique; puis avec ce produit il part sans communiquer son projet à sa famille. Arrivé à Madrid, Murillo va trouver Velasquez, son compatriote, et lui fait part de ses projets. Diégo Velasquez lui offre de lui procurer les moyens de copier à Madrid et à l'Escurial les beaux tableaux de Titien, de Paul Véronèse, de Van Dyck et de Ribera, qui s'y trouvaient réunis en assez grand nombre. Le jeune peintre se livra avec ardeur à cette étude, et après trois années de travail, renonçant à voir l'Italie, il retourna à Séville, en 1645. Murillo fut alors chargé de peindre, pour le petit cloître du couvent de Saint-François, onze tableaux relatifs à l'histoire de cet ordre. On fut étonné du talent, et surtout de la manière aussi inconnue que nouvelle qui décelait un grand peintre. Il donna même une preuve de la variété de ses études, puisqu'on retrouve le faire de Ribera dans le saint François en extase, celui de Van Dyck dans l'agonie de sainte Claire, et celui de Velasquez dans le tableau de saint Jacques donnant à manger aux pauvres.

Ces premiers succès amenèrent Murillo sur le chemin de la fortune; il en profita pour s'établir, et épousa, en 1648, Beatrix de Cabrera. Loin de se laisser éblouir par les éloges qu'on donnait à son talent, ce peintre parvint encore à améliorer son

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travail, et quitta son style un peu timide pour un autre plus vigoureux, plein de franchise, et tellement suave que cette troisième manière lui mérita le nom de Prince des coloristes. Murillo fit en 1655 les deux figures de saint Léandre et de saint Isidore, son frère, archevêques de Séville; ils sont tous deux vêtus de leurs habits pontificaux, et se voient dans la grande sacristie de la cathédrale. En 1656 il peignit, pour l'autel du baptistère de cette église, le célèbre saint Antoine de Padoue à genoux, les mains étendues, le saint semble s'apprêter à recevoir l'Enfant Jésus descendant du ciel, entouré d'une gloire d'anges, et brillant de la plus éclatante lumière. Le chapitre de Séville paya ce tableau 2500 francs, ce qui était une somme considérable pour l'époque et pour le pays.

En 1665, Murillo fut chargé, par le chanoine don Justin de Neve, de faire, pour l'église de Sainte-Marie-la-Blanche, quatre tableaux qui le placèrent au premier rang. On se rappelle encore avec admiration deux de ces tableaux qui furent apportés à Paris, et dans lesquels Murillo avait représenté la vision du patrice de Rome, et de sa femme, fondateurs, vers l'an 360, de l'église de Sainte-Marie-Majeure, à Rome.

Chargé, en 1667, de diriger les travaux de la salle capitulaire, Murillo retoucha les arabesques qu'avait composées Paul de Cespedes, et fit pour la voûte une superbe Conception, avec quatre saints archevêques dans les pendentifs. Il fit vers le même temps, et termina en 1674, ces travaux dans l'hôpital Saint-Georges, dit la Charité. Ces tableaux, au nombre de huit, sont tous des chefs-d'œuvre : on a vu à Paris celui de sainte Élisabeth d'Aragon donnant ses soins à de pauvres malades.

Les autres tableaux peints pour cet hôpital sont Moïse frappant le rocher, le Miracle des pains et des poissons, puis Abraham recevant les trois anges, gravé dans ce Musée sous le n° 271; Jésus-Christ à la Piscine, no 262; l'Enfant prodigue rentrant dans la maison paternelle, no 301; et enfin saint Pierre délivré de prison. Ces tableaux, d'un prix inestimable aujour

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