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vrir au plus tôt l'école publique, l'objet de ses plus tendres désirs. Dès le.. février 1648, elle s'assembla chez M. de Beaubrun pour procéder à l'élection des douze anciens qui, aux termes des statuts, devoient diriger cette école, chacun pendant un mois, et avoir soin de la police et autres affaires de la compagnie.

Le mérite des sujets qu'elle choisit pour remplir ces fonctions lui fit beaucoup d'honneur : ce furent Messieurs Le Brun, Errard, Bourdon, de la Hire, Sarrazin, Corneille, Perrier, Beaubrun, Le Sueur, Juste d'Egmont, Van Opstal et Guillain. Elle élut aussi pour syndics les sieurs Lévêque et Bellot, ceux-là mêmes qui avoient été les objets de la dernière entreprise des jurés, et la cause accidentelle et par contre-coup de l'établissement de l'Académie.

M. de Charmois, qui avoit tant contribué à cet établissement, avoit été compris à la fin du dernier article des statuts en ces termes : « Et pour tenir la >> main à ce que dessus, Monsieur de Charmois, con» seiller d'état, a été élu chef de l'Académie. » Il continua, en cette dernière qualité, à donner tous ses soins pour consommer et soutenir son ouvrage. D'abord il songea à loger l'Académie; il emprunta, pour cet effet, un appartement de la maison de l'un de ses amis, située proche l'église Saint-Eustache. Le lieu et le quartier convenoient parfaitement: l'un étoit assez spacieux, l'autre étoit au centre de

la ville, et par là à portée de la plupart des gens d'art et de leurs élèves, qui avoient à le fréquenter journellement.

Afin d'obvier à toute difficulté touchant la préséance entre les douze anciens, l'Académie décida les mois de leur exercice, et même le rang que qu'ils tiendroient dans les assemblées, seroient réglés au gré du sort, ce qui fut exécuté sur-le-champ.

Par un nouvel effet de son heureuse étoile, la primauté échut à M. Le Brun; elle le chargea du soin de tout disposer pour faire au plus tôt l'ouverture des exercices publics. Peu de jours suffirent à son zèle pour mettre l'école en état et la pourvoir de toutes choses nécessaires. Ce ne fut pas tout; il songea au moyen d'établir un certain ordre et une certaine suite dans l'administration des affaires de la compagnie. Il régla pour cet effet le plan et la forme des registres qui devoient être tenus en exécution des articles 11 et 12 des statuts; il en fit faire deux, sur l'un desquels, de format et de reliure ordinaires, il porta les affaires communes et courantes c'étoit à proprement parler, le registrejournal. Dans l'autre, d'un plus grand volume et curieusement relié, il transcrivit les délibérations de la compagnie et autres actes d'une certaine importance. Les dispositions qu'il fit à ce sujet, et la tournure qu'il donna aux articles qu'il fut le premier à rédiger dans ces registres, furent trouvées si ju

dicieuses, qu'elles ont toujours depuis servi de règle et de modèle, sans qu'il ait été besoin d'y faire aucun changement. Peut-être seroit-il difficile d'en faire mieux l'éloge. M. Le Brun fit aussi graver un sceau aux armes de l'Académie pour sceller les provisions qu'elle voudroit expédier, et en fit lui-même le dessein; enfin sa tendre et vive passion pour ce nouvel établissement n'omit rien de tout ce qu'il crut propre à pouvoir en accélérer, faciliter et assurer le succès.

Les frais qu'occasionnèrent ces divers arrangements furent fournis en partie par les anciens, qui chacun y contribuèrent volontairement pour une certaine somme; le surplus se leva sur les nouveaux académiciens en qualité de récipiendaires, et par forme de droit imposé sur les lettres de provision, à raison de deux pistoles pour chacune; ce qui s'est toujours observé depuis.

L'ouverture des exercices publics de l'Académie fut faite par M. Le Brun le 1er février 1648, avec un concours extraordinaire de personnes de diverses conditions qui s'intéressoient à cet événement : c'étoient des amateurs des beaux arts, et parmi ceuxci il y en eut beaucoup d'un rang distingué; c'étoient des peintres et des sculpteurs du premier ordre, dont la célébrité et le zèle faisoient l'honneur et le plus ferme appui du nouvel établissement; c'étoient des brevetaires du roi, du nombre desquels

il y en eut beaucoup d'un rare mérite, et enfin des Jeunes étudiants, enfants ou élèves de ceux de ces deux dernières classes, considérés comme les objets immédiats de la prédilection et de la sollicitude académiques, et l'espérance ainsi que la gloire future des arts. Il vint de plus à cette même ouverture un renfort considérable de maîtres de la communauté, qui, y ayant renoncé volontairement, demandèrent qu'il leur fût permis de se joindre à l'Adémie et à être reçus au serment nouvellement prescrit; bien d'autres encore s'y vinrent présenter aux assemblées suivantes, en sorte qu'en très peu de temps le nombre des académiciens, ou du moins de ceux qui aspiroient à cette qualité, devint si considérable, que les écoles, toutes spacieuses qu'elles étoient, n'en pouvoient contenir qu'une partie.

Alors le conseil de l'Académie crut qu'il étoit temps de consommer son ouvrage et d'exécuter dans toute son étendue l'avis judicieux de M. de la Vrillière. Pour y parvenir, il y fut résolu : Qu'avant de passer outre à l'expédition et à la délivrance des lettres de provision nécessaires pour qualilifier Messieurs les académiciens, ceux qui aspireroient à ce rang seroient tenus de présenter à l'Académie quelques uns de leurs ouvrages pour y être examinés, etc. Par là, elle se mettoit en état de discerner ses sujets et de n'en recevoir que de véritablement académiques, et par un jugement en

forme, également séant et convenable à un corps qui désormais alloit être regardé comme le tribunal suprême des beaux arts.

Ceux d'entre ces aspirants qui, par une réputation déjà acquise ou heureusement commencée, se sentoient cette noble assurance si pardonnable au vrai talent, applaudirent à cette résolution et s'y soumirent sans hésiter; les autres, et en assez bon nombre, en redoutèrent l'événement, etse rendirent justice en se retirant d'eux-mêmes. De ces derniers il y en eut plusieurs qui avoient signé la requête sur laquelle étoit intervenu l'arrêt du 20 janvier précédent, qui avoient assisté aux premières assemblées de la compagnie, et qui même avoient payé d'avance les deux pistoles de droit de réception mentionnées ci-dessus : quelques uns de ceux-ci envoyèrent reprendre cette somme, comme n'ayant fait que la consigner conditionnellement; les autres, pour éviter de faire parler d'eux, l'abandonnèrent. Il y en eut beaucoup dont l'Académie regretta la médiocrité, par tout ce qu'elle leur reconnoissoit de sentiments d'honneur et de vertu; mais, dans la société qu'il s'agissoit de former, les mœurs étoient présupposées et le talent distingué y étoit indispensable.

Le logement qu'occupoit l'Académie ne pouvoit guère être regardé que comme une retraite provisoire, et, quoique pour l'y retenir l'ami de M.

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