VARIÉTÉS BIBLIOGRAPHIQUES

DE L'ESPRIT DU DROIT CRIMINEL

AUX DIFFÉRENTES ÉPOQUES

DANS L'ANTIQUITÉ, DANS LES TEMPS MODERNES

ET D'APRÈS LES NOUVEAUX PRINCIPES DE LA SCIENCE PÉNITENTIAIRE

Par M. RENÉ ROLAND

Docteur en droit, avocat à la Cour d'appel de Dijon.

Paris, Arthur Rousseau, libraire, 14, rue Soufflat.

FOREIGH

BODLILIDR)

SIODICALS

Ce titre annonce un ouvrage sérieux qui exige de son auteur, une vaste érudition et un grand esprit philosophique. Aussi, en prenant le volume, je me disais l'oeuvre ne répondra pas au titre, car l'auteur est un jeune docteur à peine sorti des bancs de l'École. Eh bien! à ma grande satisfaction, j'ai été trompé, je l'avoue.

J'ai lu le travail de M. Roland avec le plus vif intérêt et un intérêt soutenu. Ce livre, grand in-8°, de près de six cents pages, vous semble trop court lorsque vous en terminez la lecture, tant l'écrivain vous devient sympathique par son esprit juste et vraiment chrétien, son rare talent d'exposition, son style toujours clair et élégant. II est rare de pouvoir adresser ce compliment å un jurisconsulte. On dirait que nos légistes prennent à tâche de se rendre illisibles par la monotonie et l'obscurité de leur langage la forme n'est rien à leurs yeux, c'est ce qui explique en partie ·

l'éloignement que l'on éprouve pour les livres de Droit, toujours consultés mais rarement lus.

M. Roland débute par une remarquable introduction où il trace le plan et la méthode qu'il a suivis. Il divise son traité en trois parties. La première intitulée : De l'Esprit du Droit pénal dans l'Antiquité, la deuxième, de l'Esprit du Droit pénal dans notre ancienne France, la troisième, de l'Esprit du Droit pénal d'après la science pénitentiaire.

Dans la première partie M. Roland expose l'histoire et les principes des Législations criminelles des peuples de l'Antiquité, des Egyptiens, des Juifs, des Grecs et des Romains, il analyse ces législations diverses, les compare entre elles, pour lui, la plus parfaite, la plus équitable est celle des Hébreux.

« L'œuvre de Moïse, dit-il, n'est pas l'ouvrage des siècles et ‹ des générations, c'est l'ouvrage d'un homme; je ne veux pas ◄ nier que l'étude de la civilisation Egyptienne n'ait pu le pré« parer au rôle qui lui avait été réservé; mais ce que je veux « affirmer, c'est qu'il a fait non pas une copie, mais une œuvre « originale, et qu'à défaut de l'inspiration divine que je lui recon<< nais, mais que d'autres lui refusent, il a eu le génie.................. »

« Et maintenant si j'avais à apprécier d'une manière générale « le Droit que consacre le Pentateuque, je le ferais d'un mot. Si « au xviie siècle de notre ére chrétienne, il y a moins de cent « ans, par une brusque révolution notre loi pénale avait été << abolie et remplacée par la législation de Moïse, appliquée dans « toute la pureté de son texte et dans sa rudesse primitive, j'af<firme que c'eût été, à bien des points de vue un immense pro« grès pour l'humanité et la civilisation. »>

Après avoir analysé avec une grande clarté toutes les lois de procédure criminelle des Romains sous la Royauté, la République et l'Empire, il signale l'action du Stoïcisme et du Christianisme sur ce droit pénal, il déplore que les règles du droit impérial aient prévalu; e'est ce droit, selon lui, et il le prouve d'une manière irréfutable, qui a exercé la plus triste influence sur les législations modernes au point de vue de l'arbitraire et de l'excessive sévérité des peines.

Dans la seconde partie, se déroule l'histoire de la législation

de la France depuis l'époque Druidique et Gallo-Romaine jusqu'à nos jours en passant par les périodes, barbare, féodale et royale, de la révolution et des gouvernements qui ont suivi.

La dernière partie est un exposé complet de la science pénitentiaire et de ses applications, ce qui donne lieu à l'auteur d'indiquer les réformes nécessaires pour mettre notre législation pénale au niveau de nos besoins et en harmonie avec nos mœurs et nos idées, prévenir autant que possible le crime et ramener au bien le condamné, par le traitement auquel il sera soumis pendant la durée de sa peine.

<< Nos mœurs, dit M. Roland en terminant, devenues plus << douces semblent réprouver ces terribles expiations que peut « seule maintenir la nécessité sociale, qui seule aussi les justifie. « Il n'est qu'un moyen d'en avancer le terme : c'est d'exercer sur <«<les hommes qui sont en état de révolte contre nos lois, une « action morale tellement efficace, qu'elle permette à la répres«sion de se renfermer dans de plus étroites limites et à la justice humaine de déposer son glaive. »>

Le livre de M. Réné Roland est l'oeuvre d'un excellent esprit, d'un homme de bien et d'un jurisconsulte éclairé, toujours maître de son sujet. Le Moniteur Universel et la Gazette des Tribunaux en ont fait l'éloge, l'Académie de législation de Toulouse lui a décerné une médaille d'or. Le traité de l'Esprit du Droit criminel figurera dignement à côté des ouvrages de nos criminalistes les plus distingués.

HENRI CHEVReul.