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mais avec une mémoire célèbre éternisée par d'Aurat, Ronsard et les premiers de son siècle; mais un autre écrivain du même temps qui n'avoit probablement pas eu part aux générosités de Jean Brinon, a attribué à sa ruine encore d'autres motifs.

L'usurier serre tout d'une dextre taquine,

En peu d'ans un Brinon s'est acquis sa ruine,
Quant de cent mille escus son esprit despensier
Aux femmes, masques, jeux ne sauve un seul denier.
Tout extreme est donc vice et la vertu divise

Les deux bords vitieux dans le meilleu assise.

C'est ainsi que s'exprime André de Rivaudeau, poëte poitevin, aujourd'hui d'autant meins connu qu'il n'existe, selon toute probabilité, qu'un seul exemplaire de ses œuvres (1). Remarquons toutefois, qu'il n'habitoit pas Paris, qu'il a pu être mal informé de la vie de Jean Brinon, et d'ailleurs, si nous profitons du conseil qu'il nous donne dans ses deux derniers vers, si nous cherchons la vérité entre les extrêmes, nous conclurons que Jean Brinon, très-libéral pour les savans, le fut aussi pour lui-même et pour la satisfaction de ses désirs.

Jean Brinon mourut en 1554, sans avoir été marié et sans avoir été reçu à une charge de maître des requêtes qu'il avoit obtenue (2). Eu lui s'éteignit la branche aînée des Brinon, qui portoit d'azur au chevron d'or et au chef dentelé de même. Il habitoit, à Paris, un hôtel faisant le coin des rues du Chaume et de Paradis et dont l'emplacement est aujourd'hui compris dans la grande cour des Archives. Il l'avoit acquis, moyennant huit mille cinq cents francs, de Guy, comte de Laval,

(1) A la bibliothèque de l'Arsenal. — Poitiers, 1560, in-4o. Épître à Albert Babinot, fo Z vo. J'avois d'abord: pensé qu'il s'agissoit ici d'Yves Brinon, délateur de Coconas, homme ruiné, dénonciateur par nécessité et par métier, dont il est parlé dans De Thou (VII, 49) et dans les Mémoires de Castelnau (II, 364); mais les paroles de Rivaudeau ont dû plutôt s'appliquer à Jean Brinon mort quand il`écrivoit qu'à Yves Brinon, vivant en 1574,

(2) Blanchard, p. 69.

A

le 19 novembre 1545. 1 le donna (1), j'ignore pour quel motif (2), au célèbre cardinal de Lorraine, qui en fit don, à son tour, le 11 juin 1556, à François de Lorraine, duc de Guise, son frère.

Il est probable que Medan fut également donné au cardinal de Lorraine; il est au moins certain que ce prélat le posséda de 21554 à 1556. En effet, le 30 juin de cette dernière année, Jacques Bourdin, seigneur de Villaines (3), fit hommage au roi, entre les mains du garde des sceaux, de la terre et seigneurie, haute, basse et moyenne justice de Medan mouvant du roi, à cause de sa châtellenic de Poissy et déclara l'avoir acquise du cardinal de Lorraine par échange (4).

Jacques Bourdin, fils de Jacques Bourdin, notaire et secrétaire du roi et de Catherine Brinon, appartenoit à une famille influente. Son frère Gilles, avocat très-distingué, étoit devenu procureur général au parlement. Quant à lui, il devint, en 1549, secrétaire des finances, après avoir été attaché à Guillaume Bochetel, secrétaire d'État, dont il avoit épousé la fille. Il fut

(1) Sauval, III, 660. On ne conçoit donc pas que dans le cours de son livre il parle deux fois d'unc vente faite en 1556 par Briṇon au cardinal.

(2) Il me paroît évident que l'épitaphe suivante, donnée dans les Bigarrures du seigneur des Accords, s'applique à Jean Brinon, et dans ce cas elle contiendroit une accusation grave contre le cardinal de Lorraine. Je n'ai rien trouvé à ce sujet dans la Légende du cardinal, ouvrage dans lequel on a cependant dû réunir tout ce qui lui a été reproché. Voici le passage de Tabourot : « L'on m'a donné ce suivant d'un bon compagnon digne toutefois de plus heureuse fortune, car il aimoit les lettres et chérissoit uniquement les lettrez :

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(3) La terre de Villaines lui advint-elle de la même manière ou l'eut-i coinme représentant Catherine Brinon, sa mère, tante de Jean Brinon? (4) Archives P. III, cote 961.

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chargé de dresser les instructions des envoyés du roi au concile de Trente, et on trouve une grande partie de ces dépêches dans le recueil publié sur ce concile par Dupuy, en 1654, in-4°. C'est encore lui qui, avec M. de Morvillier, évêque d'Orléans, négocia le traité, conclu à Troyes, le 9 avril 1564, qui enleva définitivement Calais à l'Angleterre, malgré les réserves de cette puissance. Il mourut le 6 juillet 1567, assisté par Claude d'Espence. On lit dans Moreri, qu'il demanda, par son testament, à être enterré sans pompe, et voulut que son corps fût porté dans la fosse publique de l'hôpital de la Trinité, rue Saint-Denis, précédé d'une lanterne seulement. Il seroit bien possible que ces dispositions bizarres, qui sont identiquement celles que prescrivit Guillaume Budé dans son testament, lui aient été attribuées sans fondement. Ses armes qui étoient (d'azur) à trois têtes de cerf (d'or) se voient aux voûtes de l'église de Medan.

Marie Bochetel, sa veuve, dont il avoit eu deux enfans, se remaria, en 1569, avec Jacques de Morogues, sieur de Lande, gouverneur de la Charité, gentilhomme du duc d'Alençon, et ensuite chambellan ordinaire de Henri IV, lequel étoit encore vivant en 1595. Tous deux embrassèrent la religion prétendue réformée, probablement par suite des liaisons du duc d'Alençon avec le parti protestant. Jean de Morvillier, évêque d'Orléans, oncle de Marie Bochetel, irrité de ce second mariage et de l'abjuration qui le suivit, déshérita sa nièce lui léguant pour tous droits de succession la somme de cent écus (1).

Les biens de Jacques Bourdin paroissent être restés quelque temps indivis entre ses deux fils Nicolas et Jean et même sa veuve. L'aîné de ses fils (Nicolas), secrétaire du roi, avoit épousé Marie Fayet, fille d'un trésorier de l'extraordinaire des guerres. Il semble qu'il dissipa sa fortune, car ses biens furent décrétés, et une partie fut achetée avant 1606 par sa femme alors séparée de lui.

Jean Bourdin, second fils de Jacques, ne s'étoit pas marié.

(1) Mémoires de Castelnau.

Le 13 mars 1597 (1) il fit hommage pour lui de la moitié et pour Marie Fayet sa belle-sœur du quart des terres et seigneuries de Medan et Mignoz, mouvans de Poissy (il est probable que l'autre quart étoit resté à Nicolas Bourdin), le tout provenant de la succession de son père, et de l'acquisition que lui et Marie Fayet en avoient faite de dame Marie Bochetel leur mère. Le 31 juillet de la même année il fit hommage, en son nom, au roi, de la moitié de Villaines, de la haute justice moyenne et basse de Villaines, Marolles, Beaulieu, Meigneaulx et Medan, et au nom de sa belle-sœur, pour un quart des mêmes choses. Le 16 février 1599, Marie Fayet fit de nouveau hommage pour le quart de Villaines à elle, adjugé par décret du Châtelet, et la moitié des onze vingtièmes des terre et seigneurie de Medan avec les justices de Villaines, Medan et Mignotz. (2)

Ultérieurement un partage paroît avoir eu lieu. Marie Fayet et son fils nommé Nicolas comme son père, paroissent avoir possédé Villaines, Migneaulx, Villiers et Fauveau (3), tandis que Médan étoit resté à Jean Bourdin.

Ce dernier, mourant sans enfants, laissa tous ses biens à Guy de Morogues, son neveu utérin, fils d'Alexandre de Morogues, sieur du Sauvage et petit-fils de Marie Bochetel sa mère, à la charge de prendre son nom et ses armes. (4)

On peut d'autant plus s'étonner, que Jean Bourdin ait préféré Guy de Morogues aux enfants de son frère, que ce Guy étoit loin d'être un homme distingué. Tallemant des Réaux en a parlé sans le nommer, mais en le désignant suffisamment

(1) Arch. P. IV, 1244.

(2) Arch. P. XVII, 6543 et 6545.

(3) Aveux du 20 décembre 1606, rendus par Marie Fayet. Archives. P. LXXXV, cotes 109, 109 bis et 110. Il est parlé dans le dernier de ces aveux des vestiges de l'hôtel seigneurial de Migneaulx, autrement appelé Beaurepaire, et dans le n° 109 d'un droit singulier des seigneurs de Villaines sur la navigation de la Seine.

(4) Castelnau III, 198,

dans son article sur Arnauld le Péteux, dont Guy de Morogues avoit épousé en 1636 la nièce Marie L'Hoste « Le premier gendre (1) (écrivoit-il vers 1665 à propos de Marie Arnauld, femme d'Hilaire L'Hoste, secrétaire du roi, seigneur de Montfermeil), est bien meilleur homme, car quoiqu'il n'ait touché guère d'avantage (de dot de son beau-père), il ne demande rien. Il est fort riche, mais un peu fou et quelquefois jusques à être lié. Il dit d'une maison qu'il a sur un coteau au bord de la Seine (Medan vers Saint-Germain), chose étrange! plus on monte à ma maison, plus on a belle vue! (2)

Guy de Morogues-Bourdin eut de son mariage avec Marie L'Hoste quatre filles dont la dernière nommée Louise, épousa en 1683 Pierre de Narbonne-Caylus, baron de Faugères (3). Il eut encore un fils, Jean-Alexandre de Morogues, vicomte d'Elcourt, seigneur de Medan (4), de Beaulieu et du Sauvage, qui fut lui-même père d'une fille unique nommée Anne, mariée à François de Morogues, seigneur de Guichy, son cousin-germain. Lachesnaye-des-Bois (5) les fait vivre en 1679, date qui pourroit bien être fautive, car Anne de Morogues auroit été dans ce cas mariée au moins quatre ans avant sa tante. Ils ne aroissent pas avoir laissé d'enfants. En tout cas, JeanAlexandre de Morogues est le dernier de cette famille qu'on trouve qualifié seigneur de Medan.

Cette terre passa vers cette époque dans la famille Gilbert des Voisins. Pierre Paul Gilbert des Voisins, président au parlement en 1746, mort à Soissons le 15 mai 1754, à l'âge de trenteneuf ans étoit seigneur de Medan. Il avoit épousé en 1739 Marie

(1) Le second Jean d'Houdetot (et non Héquetot comme le dit Tallemant) seigneur d'Aluinbusc et de Grosmesnil, mort en déc. 1653, avoit épousé Jacqueline L'Hoste en 1648. Père Ans. VIII, 22.

(2) T. IV, in-12, p. 64.

(3) Père Ans. VII, 770. (4) Castelnau, III, 198. (5) T. X, p. 508.

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