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»ment. » Et voilà la première clause de l'arrêt et les motifs qui y ont donné lieu.

La seconde portoit sur la disposition des lettres patentes faite en faveur des élèves des académiciens qui se trouveroient dans le cas exprimé ci-dessus. Ces lettres avoient statué sur le sort de ces élèves, sans limitation de temps, en portant: que celui qu'ils auroient demeuré chez lesdits académiciens leur seroit compté pour parvenir à la maîtrise dans toutes les villes du royaume, et que le certificat de celui chez qui ils auroient demeuré, approuvé par le chancelier de ladite Académie, et contresigné par le secrétaire d'icelle, leur tiendroit lieu d'obligé. Le défaut de limitation de temps avoit été relevé par nos adversaires avec une mauvaise foi insigne. Si l'on eût voulu les en croire, nous nous l'étions ménagé avec grand soin, pour tenir nos élèves dans une dépendance absolument arbitraire. D'un autre côté, ils avoient beaucoup incidenté sur le prétendu inconvénient de la pluralité des élèves sous un même académicien. Les raisonnements qu'ils avoient employés pour soutenir cet étrange paradoxe ne pouvoient être ni plus foibles ni plus frivoles. Mais ils avoient eu l'adresse de les étayer de l'autorité de leurs vieux statuts, toujours un peu trop respectés dans les tribunaux, même les moins accessibles aux autres préventions. Avec cela, ce

dernier point avoit paru tenir si fortement à cœur à nos parties, ils s'étoient, pour l'emporter, donné des mouvements si vifs et si tenaces, que nos députés, honteux de l'indécente opiniatreté de ces débats, avoient mieux aimé de se relâcher un peu ici que de se mettre à portée d'en partager le blâme. Ce n'est pas qu'ils n'eussent bien démêlé le motif secret de cette âpreté des jurés, et qu'ils n'eussent connu parfaitement qu'en nous réduisant à n'avoir chacun qu'un seul élève à la fois, ils comptoient d'avoir trouvé le moyen de faire tomber l'Académie d'elle-même, en l'empêchant de se repeupler d'un assez grand nombre de sujets de distinction pour se pouvoir maintenir dans toute sa splendeur, et que la limitation du temps des études à trois ans tendoit au même but. Mais ils

avoient conçu trop de mépris pour la bassesse de ce motif,pour en redouter les suites et même pour le démasquer. De là seul, cette seconde clause de l'arrêt: « Qu'à l'égard des élèves de ceux qui com» posoient ladite Académie, que le temps de trois >> ans qu'ils auroient demeuré chez les académiciens » seroit réputé suffisant pour le temps d'apprentis»sage pour parvenir à la maîtrise desdits arts, en » toutes les villes du royaume, en rapportant par >> eux certificat de celui desdits académiciens chez » lequel ils auroient demeuré, renouvelé et visé » par chacun an, par le chancelier de ladite Aca

» démie, et contresigné par le secrétaire d'icelle, >> qui leur tiendroit lieu d'obligé, sans que lesdits >> académiciens pussent avoir chacun plus d'un » élève à la fois. »

N'oublions point une charge qui nous fut imposée par le même arrêt, savoir, celle d'instruire gratuitement aux arts de peinture et de sculpture les enfants des maîtres de Paris. Le droit exclusif qu'avoit désormais l'Académie de tenir école publique avec l'exercice du modèle rendoit cette disposition aussi juste que nécessaire, en même temps qu'elle abolissoit, quoique implicitement, mais par une conséquence inséparable, l'école nouvellement érigée avec tant de manége et de fracas par M. Mignard, laquelle, en effet, rentra aussitôt dans le néant.

Le détail où l'on a cru devoir entrer sur ce qui concerne les deux clauses ci-dessus fait voir évidemment l'attention scrupuleuse qu'apportèrent messieurs du parlement à peser et à faire valoir les raisons et les moyens de la maîtrise, et que, s'ils ne lui accordèrent rien du surplus de ses vastes et impérieuses prétentions, ce fut qu'ils en reconnurent pleinement l'injustice et l'erreur.

C'est ainsi que fut parachevée et consommée sans retour la grande restauration de l'Académie royale de peinture et de sculpture; sous le règne, de l'ordre exprès, et par la munificence du plus

glorieux et du plus magnifique de nos Monarques, sous la protection et par les nobles et sublimes inspirations du plus grand ministre qu'ait jamais eu la France, et par les soins et à la considération du premier et du plus illustre peintre de son temps, les délices de son prince, l'honneur de son art, l'amour des gens de bien et l'admiration de ses envieux mêmes, par l'inépuisable générosité et la solide aménité de son cœur et de son esprit. Puisse le même génie qui a préparé, déterminé et couronné une si digne entreprise, éclairer et régir toujours notre heureuse institution, la préserver de tout affaiblissement et de toute déchéance, et la maintenir inaltérablement dans sa splendeur et dans la paix! L'Académie respectera toujours ce génie et se respectera ellemême, tant qu'elle respectera la mémoire des sages auteurs de son élévation, et qu'elle cherchera à se pénétrer de leurs maximes et de leurs sentiments. C'est un hommage qu'elle leur doit à perpétuité et le plus pur qu'elle leur puisse rendre. Malheur à elle si elle se relâche sur ce devoir, et si, cédant à la bassesse des considérations et des condescendances particulières, vice ordinaire des associations énervées et déclinantes, elle perd de vue l'honneur et le bien général de nos arts, et cette vérité incontestable qu'elle ne se peut conserver dans son lustre et dans sa dignité

qu'autant qu'elle sera exacte à se comporter, à se composer et à se renouveler et repeupler digne

ment.

Tels sont les faits et les détails concernant l'établissement, la jonction et les deux restaurations de notre Académie, dont j'ai cru devoir rendre compte dans ces Mémoires. Il n'en est aucun qui ne me soit passé sous les yeux ou dont je n'aie eu une connoissance particulière et de la plus indubitable sûreté. J'en ai fait le récit avec toute la probité et toute la véracité dont le ciel a permis que je fisse toujours profession, et même avec toute l'impartialité dont je suis capable. Je ne dissimulerai point cependant que, touché d'un juste sentiment d'honneur, si naturel dans un homme aussi jaloux que je le suis de celui de son art, j'ai pu quelques fois appuyer un peu fortement sur nos anciens et implacables adversaires. En cela je n'ai fait que me livrer aux impressions de la plus exacte vérité. Devois-je dérober à ses vives lumières et à notre instruction la connoissance de tous ces incidents, de ces complots, de ces desseins et de ces procédés odieux, par la seule raison qu'ils furent tels, et qu'ils doivent couvrir d'opprobre et de blâme leurs injustes auteurs, eux qui n'ont point fait de scrupule de les produire au plus grand jour, et de s'en servir pour nous noircir et pour en imposer sans aucun

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