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peices ; manie inconnue aux Grecs, & qui prouve que dans chaque pays on ajoutoit, ou on retranchoit toujours quelque chofe au culte qu'on recevoit de quelqu'autre Peuple.

Plufieurs Antiquaires croyent que le Bacchus des Gaulois étoit le même que le Cernunnos dont nous avons parlé, fondés fur ce que l'un & l'autre avoient des cornes; mais comme d'autres Dieux en avoient auffi, je ne crois pas que cette raison suffise pour les confondre.

I

CHAPITRE X.

Cerès, Proferpine, Diane & la Lune, Ifis & Telefphore.

L arrive quelquefois qu'au défaut d'autorités on se sert de la découverte de quelques monumens dans un pays, pour prouver que les Dieux qu'ils repréfentent y étoient honorés; quoiqu'il foit poffible que ces monumens, portés d'ailleurs, y ayent été affemblés par la chute des maifons & des Temples où ils étoient depofés, foit à deffein ou autrement ; c'est ce qu'on doit penfer de Cerès honorée dans les Gaules. Dom Bernard de Montfaucon a fait deffiner dans le fecond Tome de fon Antiquité Expliquée, un Autel, fur une des faces duquel eft une Cerès avec une torche à chaque main, fymbole qui fait allufion, comme nous l'avons dit dans fon Hiftoire, aux foins qu'elle prit de chercher fa fille que Pluton avoit enlevée.

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Il est vrai que dans une petite Ifle près des côtes de la grande Bretagne, étoit un Temple de Cerès & de Proferpine, & que le culte de ces deux Divinités, au rapport (1) Geogr. temidore cité par Strabon (1), participoit aux cérémonies de celui que leur rendoient les Samothraces; mais comme anciennement les Gaulois n'avoient point de Temples, il en faut conclure qu'ils n'avoient eu connoiffance de ces Dieux que depuis la conquête des Romains.

Liv. 4.

Diane.

1. 4. pag. 441

DIANE étoit fort honorée par les Gaulois, fur-tout dans la forêt d'Ardenne, d'où lui étoit venu le nom d'Arduina fous lequel ces Peuples la connoiffoient. Cette forêt, autrefois immenfe, lui étoit confacrée, & étoit proprement fon Temple. En effet, dit l'Auteur de l'Hiftoire de la Religion des Gaulois (1), on peut juger de l'antiquité du culte de, (1) Tom. I. Diane dans les Gaules, par l'ancienneté de fon nom; car on ne fçauroit douter que le nom Celte Arduenna, mot compofé de Ar, & de Duen, qui veut dire, noir, fombre, & qui convient en cela aux forêts, ne foit tiré de la forêt que les Romains appelloient Arduenna. Or il eft conftant qu'elle portoit ce nom long-temps avant que les Romains fussent maîtres des Gaules. Quoiqu'après leur arrivée les Gaulois euffent accommodé leurs idées touchant leurs Dieux avec celles de leurs vainqueurs, le culte qu'ils rendoient à cette Déeffe fe foutint encore. long-temps, & elle ne changea pas pour cela de nom; ceux mêmes qui quittoient les Gaules pour aller s'établir ailleurs, le lui confervoient toujours : ainsi fideles à leurs anciennes coutumes, ils les obfervoient religieufement au milieu des étrangers; & c'eft de quoi font foi quelques Infcriptions trouvées en Italie, où Diane eft toujours nommée Arduina.

Au refte, les Gaulois penfoient pour le fond fur leur Diane à peu près comme les Grecs & les Romains, & ils la regardoient comme une Déeffe chafte & vierge, qui faifoit de la Chaffe fon unique occupation. Comme rien n'eft plus difficile à abolir que les anciennes coutumes de Religion, le culte d'Arduina dura dans les Ardennes & dans les pays voifins du Rhin jusques bien avant dans le Chriftianifme, où plufieurs Saints, ou Evêques, ou Religieux, eurent toutes les peines du monde à l'abolir.

La Lune.

QUOIQUE l'Antiquité ait fouvent confondu Diane avec la
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Tome II.

Lune, comme je l'ai prouvé dans l'hiftoire des Dieux du Ciel, il eft fûr qu'on les diftinguoit encore plus fouvent ; & foit que les Gaulois euffent reçû des Perfes une partie de leur Religion, ou de quelques autres Peuples de l'Orient, ils diftinguoient comme eux ces deux Divinités. L'Auteur de l'Hiftoire de la Religion des Gaulois prouve par un grand nom(1) Tom. II. bre de témoignages (1), que le culte de la Lune étoit répan du dans toutes les Gaules, & pour ne pas le copier, j'y renvoye les Lecteurs.

1. 4.

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C'étoit, felon lui, cette Déeffe qui étoit particulierement honorée dans l'Ifle de Sain, fituée fur la côte méridionale de la baffe Bretagne, vis-à-vis la province de Cornouaille; quoique M. de Valois prétende (2) que c'étoit Mercure qui étoit le Dieu de cette petite Ifle. Il eft vrai que Pomponius Mela (3), qui parle de l'Oracle qui étoit dans cette Ifle, ne nomme pas la Divinité qui le rendoit; mais il y a tant de preuves que c'étoit la Lune, qu'on ne peut pas fe refufer au fentiment du fçavant Benedictin que je viens de nommer. Au refte, c'étoient des filles qui deffervoient çet Oracle: elles étoient neuf, quoique dans le commencement elles ne fuffent que fix. Ces filles, Druydeffes de profeffion, vouoient une chafteté inviolable à la Déeffe qu'elles fervoient, & vivoient à peu près comme les Veftales des Romains.

A en croire les Auteurs qui en ont parlé, elles étoient fouvent confultées, fur-tout pour la navigation, & on étoit perfuadé que le beau ou le mauvais temps dépendoit d'elles, & que les vents & les tempêtes étoient en leur pouvoir. L'idée qu'on avoit qu'elles pouvoient, quand il leur plaifoit, s'élever dans les airs, difparoître à leur gré, & fe faire voir enfuite, ne contribuoit pas peu au grand crédit qu'elles s'étoient acquifes. On ne parloit que de leurs affemblées nocturnes, des prodiges qu'elles operoient : en un mot, on les regardoit comme de veritables forcieres qui tenoient le Sabath. Rien n'eft plus célebre dans les Anciens que ces prétendues Magiciennes de l'Ifle de Sain, qu'ils défignoient par le nom de Gauloifes.

Au refte on les nommoient Sena, foit parce qu'elles n'é

toient d'abord qu'au nombre de fix, foit que ce nom fût Celte d'origine, & fignifiât refpectable, venerable. C'eft de ce nom que l'Ifle où elles habitoient fut nommée l'Ile de Sain.

Ifis.

QUOIQUE je fois bien éloigné de donner dans l'idée de la plupart des Auteurs des Antiquités de Paris, qui prétendent que le nom de cette ville vient d'Ifis, para-Ifidos, il eft für cependant que cette Déeffe fut fort honorée dans les Gaules. Sa ftatue, qui étoit autrefois dans l'Eglife de S. Germaindes-Prez, & que le Cardinal Briçonnet qui en étoit Abbé, fit abbattre & réduire en poudre ; une Infcription trouvée à Soiffons; la ville de Melun, qui en recevant le culte de cette Déeffe, changea fon nom de Melodunum, en celui d'Ifeos, ou d'Ifea; le bourg d'Iffi, près de Paris, dont le nom femble évidemment tiré de celui d'Ifis; la ftatue déterrée chez M. Berrier, qui reffemble autant à celle d'Ifis qu'à celle de Cybele, fi toutefois Cybele & Ifis n'étoient pas une même Divinité; enfin le culte de cette Déeffe établi en Germanie (1), (1) Voyez principalement chez les Suéves, dont la Religion avoit tant de rapport avec celle des Gaulois, qui avoient la même origine qu'eux tout cela prouve fans replique qu'Ifis étoit honorée dans les Gaules (a).

Telefphore.

Si une Médaille des Ségufiens, qu'on croit avoir été frappée avant l'arrivée de Cefar dans les Gaules, & qui repréfente d'un côté la ville capitale de ces Peuples, & de l'autre un Hercule avec une petite figure, couverte depuis les pieds jusqu'à la tête; fi, dis-je, cet enfant eft Telefphore, comme le croyent quelques Sçavans, ce fera une preuve que les Gaulois rendoient quelque culte à ce Dieu de la Santé; & je le place ici d'autant plus volontiers, qu'Ifis étoit auffi prise (a) On recherchera, en parlant de la Religion des anciens Germains, d'où ils pouvoient avoir reçû le culte de cetre Déeffe.

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le Livre fui

vant.

pour une Déeffe qui y préfidoit, fous le nom d'Ifis Medica comme on l'a dit dans fon histoire.

CHAPITRE XI.

Autres Divinités Gauloifes, Villes Déifiées, &c.

SUR

UR le Portail de l'Hôtel-Dieu de Clermont en Auvera gne, étoit autrefois une figure fort finguliere, qui repréfentoit une Divinité Gauloife, & que Gabriel Simeoni fit deffiner dans fon Hiftoire de la Limagne d'Auvergne. Cette figure eft une tête de femme, avec deux ailes éployées audeffus, & deux larges écailles qui fortent de l'endroit où font les oreilles ; cette tête eft environnée de deux ferpens, dont les queues vont fe perdre dans les deux ailes.

Simeoni à la vue de ces deux ferpens prit cette tête pour celle de Medufe. Elle eft en effet celle d'une jeune & belle perfonne, telle qu'étoit cette Gorgone avant que fon crime eût merité l'indignation de Minerve qui métamorphofa fes beaux cheveux en ferpens; mais ici la tête a fes cheveux bien arrangés, & les ferpens ne paroiffent pas en faire partie.

L'Auteur de l'Hiftoire de la Religion des Gaulois qui appelle Onuava la Divinité que cette tête repréfente, eft perfuadé que c'eft la Venus Ĉelefte, ou la Derceto des Pheniciens, que Diodore de Sicile dit avoir été adorée à Afcalon fous une figure qui avoit la tête d'une femme, & dont le refte (1) Voyez du corps fe terminoit en poiffon (1). Cet Auteur ajoute le Liv. 7. du que comme cette figure n'eft qu'un bufte, on n'a pas pû y représenter le refte du corps; mais que les; écailles dont on vient de parler, font affez entendre ce qu'il auroit été, fi on avoit voulu représenter la figure en entier. Puis rapprochant ce que l'Antiquité nous apprend fur Oannès, Oen, & autres monftres marins (a), dont le bas du corps étoit

Tom. I.

(a) Voyez ce qui en a été dit dans le Livre III. du premier Tome.

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