Ce iour, il arriva deux hommes De la capitale des pommes, Qui disoient que leur Parlement Auoit enuoyé promptement A leurs Maiestés très chrestiennes Porter les très humbles Antiennes. Samedy, le bruict a couru Que l'Archiduc auoit paru Sur les asseurances receues De nos frontières despourueues ', Dont on tiroit des garnisons
Estant ces premiers Escheuins Accusez d'estre mazarins.
Ce iour, mon cœur estoit en ioye; Et fist la Cour de la Monnoye Arrest que ses maistres batteurs, Monnoyeurs et fabricateurs Payeront toutes choses faites
D'or massif, soit plats, soit assiettes, Bref tout marc d'or, quatre cens francs Ioincts à vingt et huict escus blancs; Pour les cuillers et les escuelles
Et toutes les autres vaisselles Qu'ils trouueront de bon argent, Ils payeront le marc content Vingt et six liures et demies; Entend qu'elles soient conuerties En des espèces du païs, C'est à dire de beaux louis; Commandement au Contre garde De l'escrire et d'y prendre garde; Et les Monnoyeurs les rompront Deuant ceux qui les porteront, Sur peine de payer d'amende Cinq cens liures, somme assez grande: Sur mesme peine leur enioint
D'en prendre et n'en refuser point,
Et de cette taxe susdite
Ne rabattre pas vne pite.
1 Par les ordres du Cardinal.
Pour faire au blocus des cloisons1.
Le Dimanche et le vingt quatre, Sortirent tous prests à se battre Force gens bien faits, gros et gras, Les cheueux frisez, le poil ras,
Monsieur le Féron, quand i'y pense, Fit vne très-belle ordonnance, Ce iour vingt et trois de Ianuier, Commandant à tout Officier Qui sera de garde à la porte, De faire par ses soins en sorte Que dans le Louure soit conduit Le bled qui passe et n'est pas cuit, Orge, Froment, Seigle, Farine, Pour estre durant la famine Deliurez par des Officiers
Aux boulangers et patissiers, Afin qu'incessamment ils cuisent,
Et que, si lesdits grains leur duisent,
Ils viennent tous les acheter
Au Louure où l'on les fait porter, Et ce que i'y trouue le drolle, Sans auoir crédit d'vne obolle ; Car l'Ordonnance dit exprès Qu'ils porteront argent tout frais, Outre qu'ils prometɗront de rendre Autant de pain qu'il s'en doit vendre Dans les ordinaires marchez; Deffenses d'auoir grains cachez, Ny sous ombre d'humeur ciuille En vendre aux habitants de ville; Que tel courtois sera pendu; Aux Bourgeois aussi deffendu D'en achepter d'eux sur la peine D'amender vne cinquantaine De pistolles ou de louis
Dont ils seroient peu réiouis. Aussi scachez la conséquence De cette prudente ordonnance : Le marché suiuant de pain eut Autant et plus qu'il n'en fallut.
24 janv. Journée de
Juvisy.
En souliers noirs, en bas de soye,
que ceux qui vont tirer l'oye. Gageons, Prince, que tu m'attens A nommer nos fiers habitans, Qui contre la pluye et l'orage N'auoient porté que leur courage, Et dont ils auoient peu porté Pour plus grande légèreté. Ouy, ie veux chanter la iournée La plus celèbre de l'année, Depuis ditte de Iuuisy, Alorsque le Bourgeois choisy, La pluspart la plume à l'oreille, Iurant Dieu qu'il feroit merueille, Et portant la fureur dans l'œil, Marchoit pour assiéger Corbeil, Si la maison du sieur Des Roches N'en eust empesché les approches. Sotte et misérable maison, Qu'on te maudit auec raison! Iuuisy, malheureux village, Où manqua si peu de courage Qu'ils en auoient apporté tous, Sans toy Corbeil estoit à nous. Le Bourgeois alloit en furie, Ioint qu'on auoit caualerie, Des fantassins et du canon.
Et puis tu me diras que non!
Ah! maison de Monsieur Des Roches,
Que tu nous coustes de reproches!
Pourtant la sortie eut effet.
Le Pont de Sainct Maur fut deffait,
Tandis que nos gens en désordre
Assez bons chiens s'ils vouloient mordre,
Le lendemain sont reuenus
Ayant la pluspart les pieds nuds; D'autres ayant perdu leurs armes; Et tous pinté comme des Carmes. Les vns admiroient le danger Où l'on vouloit les engager; Encor que de cette bataille Se sentit la seule futaille Qu'ils percèrent de mille trous, Et dont enfin à plusieurs coups Ils burent dans cette desroute Le sang iusqu'à la moindre goutte. Enfin plus mouillez qu'vn canard, Les enfans criant au Renard, Ils rentrèrent dans nostre ville En faisant vne longue file; Tantost formans vn entrechas, Tantost vomissans sur leurs pas,
Dont le grand Beaufort dans son ire Ne pouuoit s'empescher de rire.
Le lundy ne doit estre obmis Qu'on sceut qu'en Bretagne vn commis De Monsieur de La Mesleraye 1 N'auoit remporté qu'vne baye Ayant demandé six milliers, Tant Fantassins que Caualiers 2; Que la cour n'auoit fait response Sur la demande de ce Nonce; Ains deffendu que Chef aucun Leue soldats, ne fust ce qu'vn, Pour Monsieur de La Mesleraye Contre qui saigne encor la playe
1 De ce Mareschal fier à bras.
2 Pour seconder les sots desseins D'vn Cardinal plein de furie.
Et le trou qu'il fit au iabot
D'vn crocheteur; veut que Chabot 1 Qui sous main leuoit gens de guerre Ait à dénicher de la Terre,
Et cependant qu'aux droicts Royaux Soit reioint le droict des Billots 2.
Le Mardy, le sieur de Raillière Fut pris en nouant sa iartière Et mené comme vn espion.
L'on ne connoist que trop son nom. Il est monopoleur en diable,
1 Le duc de Rohan-Chabot.
2 D'où l'on dit que le tueur d'homme, Meilleraye, auoit tous les ans Plus que quatre cens mille francs.
Le mardy, vinrent quelques bandes,
Tant Polonoises qu'Allemandes, Au Bourg la Reine, près Paris. Dieux! quels cruels chariuaris! Que de mal, de bosse et de playe Faisoient-ils, lorsque La Boulaye, Braue Marquis, mit en morceaux Plus de trente de ces pourceaux; Outre
que ce chef de courage Ouurit vertement le passage A cent quatre-vingt et dix-neuf Charrettes de bled, sans le bœuf Qu'au nombre de deux cent soixante Ou de trois cens, que ie ne mente,
Il amena par son conuoy Malgré les ennemis du Roy.
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