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Ce qui fut fait '. La Cour ioyeuse
D'vne fin de guerre ennuyeuse,
L'enregistra, la publia,
Vérifia, ratifia,

Et quand elle fut publiée,
Registrée et vérifiée,

Dit qu'on priroit leurs Maiestez
De rendre à Paris ses beautez,
Sa splendeur et Son Eminence
En l'honorant de leur présence;
Ce qui ne se fit pas si tost
Qu'auroit désiré le courtaut;
Car le Roy partit pour Compiègne,
Où trois mois il tint comme teigne,
Et ne reuint de très longtemps
Au grand deuil de nos habitans.
Ainsi la paix nous fut donnée,
Et nostre guerre terminée.
Ainsi finit nostre blocus.
Ainsi ny vainqueurs ny vaincus,
Nous n'eusmes ny gloire ny honte.
Nul des partis n'y fit son compte.
Le vostre y souffrit moult ennuis,
Y passa de mauuaises nuicts

Dans vn si grand froid, qu'on presume
Qu'il y gagna beaucoup de rhume.
Le nostre en fut incommodé;

Le Carnaual en a grondé.

1 Enfin veux tu que ie te die?
Cher Lecteur, si ie ne poursuie,
Ie suis malade et ne puis;
Et s'il m'est permis de tout dire,
Il m'est impossible de rire,
Que du bout des dents, d'vne paix
Où deuient plus grand que iamais...
Mais brisons là.

Le Caresme en a fait sa plainte.
Philis, Cloris, Siluie, Aminte
Y perdirent tous leurs galands.
Le Palais n'eut plus de chalands.
Le procureur fut sans pratique,
Le marchand ferma sa boutique.
L'Arthamène fut sans débit ';
Et l'on pensa chanter l'obit
De Lybrahim, de Polexandre,
De Cléopâtre et de Cassandre,
Auec celuy de leurs autheurs,
Leurs libraires et leurs lecteurs.
Le sermon n'eut plus d'audience;
Le charlatan plus de créance.
L'hostel de Bourgogne ferma.
La trouppe du Marais s'arma.
Iodelet n'eut plus de farine
Dont il put barbouiller sa mine.
Les marchez n'eurent plus de pain;
Et chacun plus ou moins eut faim.
Mais sitost que par sa présence
La paix nous promit l'abondance
Que le Roy seul nous redonna,
Quant sa Maiesté retourna,
Aussitost disparut le trouble.
Plus de misère pour vn double.
Paris a repris sa beauté.
Tout est dans la Prospérité.
Le marchand est à sa boutique;

Le procureur à sa pratique;

Les hommes de robe au Palais;

Les comédiens au Marais;

L'Arthamène et l'Ibrahim sont de Me de Scudéry, Polexandre de

Gomberville, Cléopâtre et Cassandre de La Calprenède.

Les artisans à leur ouurage.

Les bourgeois sont à leur ménage;
Les bonnes femmes au sermon.
Cormier est à son Galbanon;
L'apothicaire à sa seringue;

Et vous, le vainqueur de Nortlingue,
De Rocroy, de Fribourg, de Lens,
L'effroy de tous les Castillans,
Estes dans le bois de Vincenne.
Dieu vous y conserue et maintienne
En santé.

Manifeste de madame la duchesse
de Longueville [2363]'.

(9 mai 1650.)

Puisque la Paix de la France, la liberté des Princes, le maintien de l'authorité des loix et des dernières déclarations, le soulagement du peuple, la conseruation du royaume et le repos de la Chrestienté, à quoy le Cardinal Mazarin s'oppose et qui ne peuuent désormais s'obtenir que par les armes, m'ont obligée à les prendre, puisque l'ay esté portée par le conseil des gens de bien de repousser auec force la violence de la Tyrannie de ce Ministre, et qu'on a cru nécessaire d'arrester le cours de ses noires perfidies par la bonne foy d'vn traitté qui se propose pour sa fin des biens si grands et si souhaitables, seray fort aise de rendre compte au publicq de la con

ie

Mme de Motteville ne doute pas que cette pièce ne soit de Mme de Longueville elle-même. Villefort se contente de dire que si la duchesse ne l'a pas faite, elle était bien capable de la faire.

duitte que i'ay tenue pour y arriuer, et de faire connoistre à tout le monde de quelle sorte, ayant tasché autant qu'il m'a esté possible, d'apporter de plus doux remèdes aux calamités de l'Estat et aux malheurs de nostre Maison, voyant mes efforts rebuttez, vne partie de la famille royalle sur le bord du précipice et la France si proche de sa ruine, il a fallu par la grandeur de ce mal et par l'extrémité de la persécution qu'on fait souffrir à nostre Maison et ensemble au reste du Royaume, mettre le fer dans des blessures enuenimées afin de les guérir, et armer contre la domination illégitime d'vn ennemi public, l'équicé des loix qui seules ne pouuoient protéger nostre innocence ny remédier à la perte de l'Estat; ne souhaittant rien d'auantage des personnes qui verront comme les choses se sont passées depuis la détention de Messieurs mes frères et de Monsieur mon Marry, jusques au temps où l'ay conclu auecques le Roy d'Espagne les desseins de leur liberté et de la paix des deux couronnes et où M. de Turenne est marché à la teste d'vne armée pour les faire réussir, sinon qu'examinant ces choses sans préoccupation, ils fassent généreusement ce que leur conscience et ce qu'ils doiuent à leur patrie leur conseillent.

La nuict mesme1 que le Cardinal Mazarin, renuersant les loix fondamentales de nostre monarchie, commist son funeste attentat sur la personne du Prince, m'estant heureusement desrobée à sa fureur, comme elle estoit preste de m'arracher d'entre les bras de Madame ma Mère, ie me retirai dans le gouuernement de Monsieur mon Marry, résolue d'employer, pour remédier à nos misères, le seul

1 Du 18 janvier 1650.

secours des loix et de la bonté de leurs Maiestez. Mais ny la députation du Parlement de Rouen à qui mes bonnes intentions estoient connues', ny les protestations réitérées d'obéissance que i'enuoyay faire à la Reyne, ny le calme que ie maintins dans la Normandie, ny la soummission de la Noblesse dont i'arrestay les ressentimens, ny tant de places que i'ai sacrifiées, sans les défendre, à l'ambition du Cardinal Mazarin, ne l'ayant pu empescher de faire marcher vne armée dans cette Prouince et d'y exposer le Roy au milieu de la peste, afin de nous en oster le gouuernement; et mon innocence, ny mon sexe, ny mon rang n'ayant pu me garantir chez moy dans la solitude d'vne maison de Campagne où ie m'estois retirée; la passion déréglée que ce Ministre apportoit à couronner sa vengeance par nostre entière ruine, le poussant aueuglement à me perdre ou à me bannir, je fus contrainte de quitter la France; et m'estant embarquée de nuict en vne rade difficile, pendant l'hyuer, par vn mauuais temps et auec vn péril extrême, je vins chez les Alliez de la Couronne chercher la tranquillité dont les crimes d'vn estranger m'empeschoient de jouir dans mon païs. Ainsi donc après auoir esté battue d'une furieuse tempeste, i'arriuay en Hollande; mais la persécution du Cardinal Mazarin m'y suiuit. La fureur et les caballes de ses Émissaires ne purent pas seulement souffrir qu'on me fît les ciuilitez qu'on deuoit à ma naissance, et obligèrent les Estats de manquer en ma personne au respect qu'on rend partout au sang de nos Roys. Vn pro

1

Requeste de Mme la Duchesse de Longueuille au parlement de Rouen [3473].

2 Le Roi partit de Paris le 2 février.

* De Dieppe.

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