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et des peuples de son Royaume, qui luy auoyent fait vne sanglante guerre sous le spécieux prétexte du bien public, et qu'il fust en de continuelles appréhensions des machines ouuertes et secrètes des Anglois qui estoyent alors les ennemis irréconciliables de cet Estat, si ne laissa-t-il pas parmy tous ces désordres et ses deffiances, de convoquer les Estats Généraux à Tours et de les faire Iuges des différens qu'il auoit tant auec le Duc de Normandie, son frère, qu'auec les Ducs de Bourgogne et de Bretagne qui avoyent diuisé tout le Royaume en factions contraires. En effet cette Assemblée fut si bien intentionnée pour le bien de l'Estat qu'elle se sépara auec cette prudente résolution: Que le Roy seroit très-humblement supplié d'octroyer à Charles, son frère, vn appanage conuenable à sa naissance et à sa dignité; que Monsieur seroit prié de s'en contenter; que le Duché de Normandie estant inaliénable et ne se pouuant démembrer de la Couronne, le Duc de Bretagne seroit sommé de rendre tout ce qu'il auoit pris dans cette Prouince; et au cas qu'il en fist refus ou qu'il fust certifié au Roy qu'il eust contracté alliance auec l'Anglois, ancien ennemy de la France, que le Roy retireroit ses villes à main armée et luy feroit la guerre; que pour cet effet les trois Estats promettoient de secourir et seruir Sa Maiesté à sçauoir les Ecclésiastiques de leurs prières et de leurs biens temporels, les Nobles et le Tiers-Estat de leurs biens, de leurs personnes et de leurs vies; enfin que le Duc de Bourgogne seroit admonesté de ne point fauoriser les ligues qui se faisoient contre Sa Maiesté et contre le repos de l'Estat, mais bien de contribuer comme Prince du Sang Royal et Pair de France à sa réformation par des voyes ciuiles.

SIRE, le bon succès de cette Assemblée, dans vne conjoncture de temps et d'affaires si semblables aux nostres, ne doit-il pas nous faire espérer toute sorte de bien de celle que nous réquérons de Vostre Maiesté? Et si Louis XI, qui estoit vn Roy assez peu aimé de ses suiets, reçut tant de satisfaction et d'accroissement en son authorité de la résolution de ces Estats Généraux, se trouuera-t-il des personnes assez soupçonneuses pour appréhender que l'innocence de Vostre Maiesté, si chérie de tous les Peuples, n'inspire pas aux députez des Prouinces des intentions aussi fidelles et aussi généreuses qu'il conuient pour le salut de l'Estat et le rétablissement de l'authorité Royalle?

Nous abuserions de la bonne volonté de Vostre Maiesté, SIRE, si nous lui racontions importunément tant d'autres Estats Généraux, dont les Roys vos prédecesseurs ont tiré de notables auantages:

Ceux qui furent encor tenus à Tours sous le mesme Roy Louis XI, par la résolution desquels, conformément à l'intention de sa Maiesté, le Duc de Bourgogne fut cité pour respondre au Parlement de Paris sur plusieurs faicts dont il estoit chargé;

Ceux qui furent conuoquez dans la mesme ville de Tours au commencement du règne de Charles VIII, sur le suiet de la Régence;

Ceux qui sous François Ier s'opposèrent vigoureusement à l'exécution du Traité de Madrid si désauantageux à cette Couronne;

Ceux qui sous Henry II luy fournirent le secours extraordinaire qu'il demanda après la perte de S. Quentin, pour soustenir la guerre que luy faisoient les Espagnols et les Anglois ioints ensemble;

Ceux qui durant le règne de François II furent ouuerts à Orléans, continuez depuis au mesme lieu dès le commencement de la minorité de Charles IX, et qui pourueurent au payement des debtes du Roy, qui montoient alors à plus de quarante millions de liures, somme qui estoit beaucoup plus excessiue, eu égard à la condition de ce temps-là, que tous les Emprunts qu'il a conuenu faire à Vostre Maiesté pour les dépenses extraordinaires de la présente guerre;

Enfin ceux qui furent tenus à deux diuerses foys à Blois sous Henry III, lesquels bien que meslez de quelques partialitez et accidens tragiques, ne laissèrent pas de donner des interualles aux troubles d'Estat et de Religion qui affligeoient alors ce Royaume; outre qu'ils nous ont valu cette belle Ordonnance de Blois, laquelle iointe à celle d'Orléans, nous fournit vn digeste admirable de toutes les Loys et Règlemens les plus authentiques de cet Estat.

Et nous ne pouuons oublier de représenter icy à Vostre Maiesté, SIRE, qu'encore que l'Assemblée des Estats Généraux d'Orléans semblast, lorsqu'elle fut proposée, aller directement à la destruction du crédit et de l'authorité de Messieurs de Guise, qui gouuernoient sous le règne de François II, si est-ce qu'ils la trouuèrent si raisonnable et si nécessaire au bien de l'Estat, qu'ils n'osèrent s'y opposer; et l'aduis de l'Admiral de Chastillon qui la demanda, fut généralement suiui de tous les Notables qu'on auoit assemblez à Fontainebleau, et qui opinèrent sur cette proposition.

SIRE, tous ces exemples, ioints aux considérations particulières de l'estat présent des affaires, furent sans doute les véritables motifs qui portèrent le Conseil de Vostre

Maiesté à luy persuader, il y a plus de deux ans, cette conuocation des Estats Généraux ; et les Lettres en ayant esté expédiées dès ce temps-là par toutes les Prouinces du Royaume, afin qu'on procédast à l'eslection des Députez et qu'ils se pussent trouuer au temps et lieu de l'Assemblée qu'on leur prescriuoit, nous ne pouuons pas comprendre ce qui peut auoir iusques icy empesché l'effet d'vne si sainte résolution; car tant s'en faut que les raisons et les nécessitez des Estats Généraux soyent cessées qu'au contraire elles sont deuenues et deuiennent tous les iours plus pressantes par le continuel accroissement de nos calamitez. Nous supplions donc très-humblement Vostre Maiesté, SIRE, et la coniurons par l'intérest et le salut de son Estat, de ne différer pas d'auantage l'exécution de ce qui a esté si iudicieusement résolu en son Conseil, les années passées, touchant cette conuocation des Estats Généraux et de commander de nouueau et très-expressément à tous les Baillifs, Sénéchaux et autres Magistrats des Prouinces de son Royaume d'eslire et enuoyer leurs Députez au lieu et dans le temps qui plaira à Vostre Maiesté de leur prescrire, afin que conspirant tous au bien et à la conseruation de l'Estat, ils proposent les moyens qu'ils iugeront les plus raisonnables et les plus vtiles pour le maintien de la Monarchie et le soulagement des peuples.

Déclaration des prétentions de la noblesse
assemblée aux Cordeliers à Paris [892].

(28 février 1651.)

La Noblesse ne demande que le bien de l'Estat et du public, et rien pour son intérest particulier, remettant

aux Estats généraux toutes les infractions qui ont esté faites contre leurs droicts, et les réduisant aux Ordonnances des Rois et arrestez des Estats généraux; et pour cet effect, elle demande qu'ils soient tenus au plustost dans la ville de Paris, qui est le principal lieu de la France, et le plus considérable pour y tenir vne si grande Assemblée. Ce dessein a esté trouué si iuste par Messieurs du Clergé qui est le premier Corps, qu'ils se sont ioints auec la Noblesse pour demander au plustost lesdits Estats; et l'on s'estonne que le tiers Estat, qui est le plus intéressé au désordre présent, tant par le retranchement, retardement et mauuais payement des rentes que par les violenles gens de guerre font dans les Prouinces faute de payement, ne se ioigne auec les deux autres Corps pour demander ensemble lesdits Estats, qui sont vn remède innocent pour empescher la suitte des maux qu'a causez le ministère du Cardinal Mazarin et que ceux de sa cabale s'efforcent tous les iours de continuer1.

ces que

'L'auteur de la Réponse des bourgeois de Paris à la Lettre écrite des prouinces, etc. [3415] dit : « Les Estats Généraux pourroient commencer par de la corruption et finir par de nouuelles surcharges. » N. Pasquier, conseiller et maître des requêtes ordinaire de l'Hôtel du Roi, a écrit dans les Remontrances très-humbles à la Reyne mère........ pour la conseruation de l'Estat pendant la minorité du Roy, son fils [3343]: « N'assemblez pas les Estats Généraux. Ils ne réduiroient pas vostre autorité, comme on le prétend; au contraire. Mais ils pourroient estre vn instrument de diuision et de trouble, Les Grands s'y feroient des partisans qui agiteroient les Prouinces. >>

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