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On ne demeura pas d'accord que la suite de tous les desseins de M. le Coadiuteur pust estre la marque d'vne vertu inébranlable et que toutes les actions passées de M. le Prince eussent esté condamnées par toute la France; au contraire, on dit que l'on auoit veu souuent M. le Coadiuteur occupé à chanter des Te Deum pour les belles et glorieuses actions que M. le Prince auoit faites, mais que M. le Coadiuteur n'auoit point encore iusques ici obtenu de son chapitre vn seul Te Deum pour tout ce qu'il auoit fait.

On dit qu'il estoit vray que lorsque M. le Prince auoit demandé l'esloignement de ceux qui estoient dans les intérests du Cardinal, M. le Coadiuteur en auoit esté d'aduis, et que pour se faire encenser par le peuple, il auoit fait imprimer son opinion'; mais quelqu'vn adiousta qu'il auoit en cette occasion manqué à ce qu'il auoit promis à M. de Lyonne dans les secrettes conférences qu'il auoit eues auecque luy, et que dans la déli– bération qui se fit sur le mariage de M. de Mercœur, il auoit suiuy fièrement les conclusions de Messieurs les gens du Roy.

Dans l'endroit où il est dit que si M. le Coadiuteur consentoit au retour du Card. M. ou prenoit quelque secret engagement auec luy (comme il auoit desià fait autrefois, lorsqu'il l'auoit iugé nécessaire à ses intérests), il perdroit ce qu'il auoit acquis d'honneur et de crédit, on dit que malheureusement pour luy cela n'estoit desià que trop vray.

Avis de monseigneur le Coadiuteur... pour l'éloignement des créatures du cardinal Mazarin, etc. [506]. Le cardinal couvient en effet dans ses Mémoires que c'est lui qui le fit publier, après s'en être concerté avec la

Sur ce que l'on dit que pour décrier M. le Coadiuteur, on s'est aduisé depuis peu de publier qu'il alloit au Palais Royal, qu'on parloit de le faire Ministre et de le mettre dans les Conseils du Roy, on demeura d'accord que la chose estoit vraye; que Mme de Cheureuse auoit négocié son accommodement; qu'il auoit esté introduit secrettement chez la Reyne par Courtois; qu'il auoit respondu à Sa Maiesté de M. le Duc d'Orléans, du Parlement et du peuple; et qu'il estoit facile de iuger qu'il y auoit longtemps qu'il aspiroit au Ministère, quelque protestation qu'il fist du contraire; que la retraite qu'il auoit faite du Luxembourg n'auoit pas esté longue; et que se piquant d'auoir pour les grandeurs vn mesme esprit que Dioclétien et Charles Quint, il estoit comme le premier, bientost ennuyé de la vie contemplatiue, et comme l'autre, repenti d'auoir quitté la Cour le

cloistre.

pour

On ne demeura pas d'accord que durant le blocus de Paris, il eust refusé plusieurs fois le chapeau de cardinal et préféré la cause du peuple à cette éminente dignité; mais, au contraire, on dit qu'vne des principales raisons qui le détacha des intérests de M. le Prince de Conty, fust que ce Prince consentit, pour l'accommodement des affaires, qu'on donnast à l'abbé de La Riuière le chapeau qu'il prétendoit gagner dans nostre party.

On ne demeura pas aussi d'accord qu'il eust tousiours mesprisé de se faire connoistre par l'éclat de sa fortune et que, lorsqu'il négocioit pour la liberté de MM. les Princes, il eust refusé le chapeau de cardinal; au contraire, on dit que, désirant d'vn costé de cacher son ambition et de l'autre d'y satisfaire, il tira vn escrit particulier de M. Arnault, par lequel ledit sieur Arnault

s'obligeoit de faire en sorte que M. le Prince seconderoit la nomination qu'il espéroit que M. le Duc d'Orléans deuoit faire de sa personne pour le cardinalat.

Pour l'abbaye d'Orcan, on dit qu'il estoit vray qu'il l'auoit refusée; mais on expliqua cette affaire, en nous asseurant que dans l'accommodement qu'il auoit fait auec la cour, on luy auoit promis le premier bénéfice considérable qui vacqueroit; et ayant vacqué vne abbaye de beaucoup plus grande considération 1 que celle d'Orcan, le Cardinal, qui vouloit la retenir pour soy, quoy qu'il fust engagé à donner la première vacante audit sieur Coadiuteur, escriuit à MM. Le Tellier et Seruient pour faire en sorte que M. le Coadiuteur se contentast de celle d'Orcan; que M. Le Tellier ne voulust point se charger de cette négociation, que M. Seruient l'accepta, et que M. le Coadiuteur refusa l'abbaye d'Orcan, mais non pas l'autre, qui estoit d'vn plus grand reuenu.

Sur ce que M. le Coadiuteur demande s'il seroit dans les intérests du Mazarin quand bien il entreroit présentement dans le Ministère, et si tout le monde n'eust pas esté bien aise qu'il y eust esté estably après l'expulsion du Cardinal, toute la compagnie conclut qu'il estoit impossible, dans l'estat présent des affaires, qu'il y entrast sans auoir traitté avec le Cardinal; que la Reyne conseruant tousiours beaucoup d'affection pour ce Ministre, tous ceux qui prétendoient receuoir quelque grâce de Sa Maiesté, commençoient l'establissement de leur fortune en luy promettant de contribuer leurs soins pour son retour; et que la Reyne, après la sortie du Mazarin, n'eust iamais consenti que M. le Coadiuteur

'Le Bon Frondeur, etc. [389] dit que c'était l'abbaye de Corbie.

eust entrée dans le Conseil du Roy, puisque Sa Maiesté eust approuué, par ce consentement, la conduite de ce Prélat, qu'elle a si souuent accusé d'ingratitude et de faction.

Quand à l'article où il est dit que M. le Coadiuteur est trop prudent pour entrer dans le Ministère par la voye du Mazarin, et encore qu'on le veuille attirer par des protestations contraires, il sçait bien qu'il n'y a pas trop de confiance à la Cour, et que les choses passées peuuent estre le fondement d'vne iuste et véritable crainte, chacun dit que M. le Coadiuteur n'auoit pas suiet de se plaindre de la Cour, puisque, outre la dignité auec laquelle il prétend estre à couuert de toute sorte de ressentiment, en ayant reçu tant d'autres grâces pour ceux de sa faction, il a tousiours manqué à ce qu'il auoit promis à la Reyne et à ses Ministres ; qu'il estoit bien plus heureux que M. le Prince qui auroit tousiours fidèlement seruy Leurs Maiestez et qui cependant auoit esté récompensé de tant de seruices par vne prison de treize mois, reconneue iniuste par vne Déclaration du Roy, vérifiée dans le Parlement1; et que c'estoit à M. le Prince à dire que les choses passées peuuent estre le fondement d'vne iuste et véritable crainte.

On examina fortement l'article où il est dit qu'il ne faut point trop esleuer les hommes dont nous ne pourrions pas estre les maistres, et où il est parlé de ces nouuelles accusations enuoyées au Parlement contre M. le Prince, et des maximes de cette politique qui

Déclaration du Roy pour l'innocence de Monseigneur le Prince de Condé, etc. [947].

asseure que le crédit est plus dangereux dans la personne des Princes que des particuliers, on iugea que tout ce raisonnement partoit d'vn esprit fort ambitieux et dont les proiets estoient espouuantables, puisqu'il auoit regret de ne pouuoir se rendre maistre du sang Royal. Ah! Monsieur le Curé, que veut dire cela? Sontce des sentimens qu'vn Prélat doiue insinuer dans l'esprit des peuples? Cet escrit anglois qu'on a fait brusler depuis peu par la main du bourreau, a-t-il quelque chose de plus pernicieux? Quand aux accusations, chacun dit que la Déclaration de son Altesse Royalle1 les auoit détruites, à la confusion de ceux qui les ont calomnieusement inuentées; que tous les Ministres les désaduouoient; et que ces abominables monstres de sédition qui auoient donné ce pernicieux conseil à la Reyne, n'auoient garde de se nommer, de peur d'estre déchirez par les fidèles seruiteurs de la Maison Royalle; que M. le Prince demandoit iustice tous les iours; que l'on vouloit user sa patience par des délais; que l'on vouloit gagner la Maiorité du Roy par des continuelles remises; et que ceux qui donnent de tels conseils, ont vne politique que tous les suiets du Roy doiuent appréhender; qu'il n'y auoit point d'apparence qu'ils eussent dessein de leur faire iustice quand ils auroient l'authorité en main dans vne maiorité, puisqu'ils la refusoient au premier Prince du sang, iniustement calomnié dans les derniers iours de la Régence; qu'ils vouloient, par cette conduite, obliger M. le Prince à se retirer, de peur qu'il ne fust le témoin de leurs factions et l'obstacle de toutes leurs

1 Déclaration de Monseigneur le Duc d'Orléans... pour la iustification de la conduite de M. le Prince [881].

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