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nemis et les rendre les témoins de son innocence, en mesme temps qu'ils voudront estre ses Iuges et qu'ils entreprendront le plus ardemment de le condamner ou de le persécuter; ce qu'ils n'ont presque iamais fait que lorsqu'ils ont deu reconnoistre ses trauaux et luy décerner des couronnes et des triomphes pour les grands seruices qu'il venoit de rendre au Roy et à l'Estat.

A-t-il donné la paix à la capitale du Royaume et à tout le Royaume en mesme temps? Vne faction puissante s'eslèue contre luy, aigrit et fortifie les premiers dégousts de Monseigneur le Prince qu'elle veut s'acquérir et dont elle s'efforce par mille artifices de corrompre la fidélité. Après la détention de ce Prince, a-t-il réduit auec vne incroyable diligence les places de Normandie et de Bourgogne dans les rigueurs extresmes de l'hyuer, puis secouru Guise, dompté Bourdeaux, appaisé toute la Guyenne dans les chaleurs extresmes de l'esté? Pour toute récompense de si grands seruices, on redouble contre luy les efforts de la cabale et de l'intrigue au mesme temps qu'on les pouuoit croire esteintes et étouffées.

Cependant le Cardinal, battu d'vn si violent orage, s'en esloigne, ou pour l'appaiser, ou pour le faire fondre sur ses ennemis; au cœur de l'hyuer il les attaque; il les chasse de Rethel; il les défait en bataille rangée, où il taille en pièces leurs meilleures troupes, et s'en reuient chargé de trophées et plein de gloire à la Cour du Roy.

Pour de si admirables succez, il se deuoit bien promettre l'applaudissement public; et il pouuoit bien considérer tant d'ennemis vaincus comme autant de victimes capables d'appaiser le ressentiment de ses aduersaires;

mais au contraire, plus il est glorieux et plus on veut qu'il soit mal-heureux ; mieux il sert l'Estat et plus on l'accuse de le troubler. Enfin, de ce vainqueur, on résout d'en faire vn prisonnier et vn coupable à la veue du Roy et au milieu de la ville capitale de la France. Ainsi on voit que ce n'est pas à ses fautes qu'on en veut, mais à sa puissance qui s'accroist auec son bonheur et auec ses mérites; et l'on ne doute point que ceux qui taschent de nous faire croire que ses crimes ont augmenté auec ses seruices, n'ayent pris pour rébellion les effets de son deuoir, et ses seruices pour des crimes; et il est infaillible que si cet exilé reuenoit en France moins accompagné et moins en estat de rendre victorieuses les armes du Roy par le renfort et par la ionction des siennes, on n'auroit pas dépeint son retour si pernicieux que l'on a fait, et peut-estre mesme que la haine de ses condamnateurs ne seroit pas venue à vn excès si épouuantable que de mettre à prix sa teste sacrée et de la sacrifier à la fureur des assassins les plus désespérez.

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Mais toi, Paris, maistresse et capitale de toutes les villes de ce grand Estat, ie ne veux point chercher hors de toy les interprètes et les témoins de ton deuoir en cette conioncture; ie veux seulement te conduire dans vne assemblée généralle de tes anciens Pères, te faire paroistre en leur présence et te prier en mesme temps de les considérer, non fragiles et mortels comme ils ont esté pendant leur voyage sur la terre, mais incorruptibles et glorieux comme ils sont dans le ciel; et ils te prononceront pour la seconde fois vne loy sacrée qu'ils ont faite et publiée au milieu de toy depuis huit siècles, et te commanderont très-séuèrement de l'obseruer, sur

peine de leur haine et de leurs censures les plus redoutables.

Il est certain (voir le sixième concile de Paris) que la puissance Royalle est establie pour le bien et pour l'aduantage de tous ceux qui luy sont soumis, qu'elle est obligée de le procurer selon les loix de l'équité : et c'est aussi pour cela que tous ceux qui luy sont subiets, doiuent luy obeyr et la seruir auec fidélité; d'autant que celuy qui résiste à vne Puissance ordonnée de Dieu, ainsy que l'Apostre nous l'enseigne, résiste en mesme temps à l'ordre de Dieu. Car comme les subiets désirent que le Roy les conserue et les protége selon la Iustice et la piété; de mesme ils sont obligez de leur part de secourir le Roy en toute franchise, et sans prétendre de s'en pouuoir dispenser sous aucun prétexte et par aucune excuse que ce soit : et ils sont obligez, en premier lieu, pour le salut de leur áme; et en second lieu, pour contribuer à ce qui regarde la bienséance et l'utilité publique du Royaume, suiuant la volonté de Dieu; et en s'acquittant de ce deuoir, on ne peut point douter qu'ils ne satisfassent tout ensemble au commandement de Dieu et à la fidélité qu'ils doiuent au Roy. Et en effet que les subiets soient tenus de rendre ce seruice à Sa Maiesté Royalle, les préceptes de la Loi nous le témoignent ouuertement; et le Seigneur nous l'apprend luymesme en l'Éuangile, quand il dit : Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. Et sainct Pierre dit aussy: Soyez obéissans à toutes sortes de personnes pour l'amour de Dieu; soit au Roy, comme à celuy qui tient le premier rang; soit à ses Ministres, en considérant que c'est luy qui les enuoye et qui leur

donne authorité. Et vn peu après il dit: Craignez Dieu, honorez le Roy. Et l'Apostre sainct Paul dit au mesme sens : Que toute personne soit soumise aux Puissances supérieures; car il n'y a point de Puissance qui ne vienne de Dieu; et celles qui sont establies dans le monde, sont establies de Dieu mesme; et ainsy celuy qui résiste à quelque Puissance, résiste en mesme temps à la disposition de Dieu, et le reste, où l'Apostre continue bien au long de nous instruire sur cette matière. Et le mesme aussy escriuant à Tite dit: Aduertissezles bien de se rendre obéyssans aux Princes et aux Puissances. Et dans sa lettre à Timothée, il nous fait voir à quel poinct luy estoit précieux le salut du Roy, parlant de cette sorte le vous supplie et vous recommande qu'auant toutes choses l'on fasse des prières, des supplications et des actions de grâces pour tous les hommes, pour les Roys et pour tous ceux qui sont esleuez en dignité, afin que nous menions vne vie tranquille et paisible en toute piété et pureté; car c'est vne chose bonne et agréable deuant Dieu Nostre Sauueur, qui veut que tous les hommes soient sauuez et qu'ils paruiennent à la connoissance de la Vérité. Car c'est ainsy que Hiérémie, le diuin Prophète, exhorte de prier pour la vie du Roy Nabuchodonosor, quoy que ce Roy fust idolastre. Combien plus donc toute sorte de personnes doiuent-ils implorer auec humilité le secours de Dieu pour la conseruation et pour le salut des Roys Chrestiens? Or ces témoignages diuins peuuent suffire pour monstrer en peu de paroles comme il faut obeyr à la puissance Royalle et auoir soin du salut du Roy. Et c'est pourquoy il est nécessaire que tout fidelle, pour le bien de son salut et pour la gloire de l'Estat, selon

qu'il plaist à Dieu, soit disposé de donner au Roy vne assistance raisonnable, comme doiuent faire les membres au chef, et qu'il recherche plustost l'aduancement, l'utilité et la gloire du Royaume que les aduantages du siècle, afin que le Roy et ses subiets conspirant également à s'entrayder par vn secours mutuel et salutaire, ils méritent ensemble de iouyr vn iour de la félicité du Royaume éternel.

Ce sont les conseils et les loix de tes propres Pères, ô Paris! assemblez chez toy, qui te parlent et t'instruisent, par les diuins oracles, de ce que tu dois à la Maiesté de ton ieune Roy, et qui semblent maintenant descendus du ciel pour te sauuer des embusches dangereuses des brouillons qui te voudroient séduire et t'acheuer de perdre, en t'inspirant le dessein impie d'vne rébellion infasme et en te plongeant dans les misères infinies d'vne guerre ciuile et d'vne guerre estrangère tout ensemble. Mais sur tout au mesme temps et sous le mesme Louis, Empereur et Roy de France, les Euesques assemblez par l'ordre de ce Roy pour la réformation de l'Église de Dieu, ne nous enseignent-ils pas à détester générallement toute sorte de réuolte et d'engagement dans vn party rebelle, quand ils veulent et ordonnent par vn Canon exprès que ceux qui auront suiuy ou fauorisé qui que ce soit contre le Roy, seront déposez de leurs ministères, s'ils sont Ecclésiastiques, ou excommuniez s'ils sont Laicques et Séculiers.

Il est sans doute, dit le saint Synode, que quiconque résiste à vne Puissance establie de Dieu, selon la maxime de sainct Paul, résiste à l'ordre de Dieu mesme. Et partant, nous ordonnons d'vn commun aduis que si vn Euesque ou quelque autre d'vn ordre

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