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qu'il facilite l'entrée et la sortie de l'exécuteur d'vne entreprise si généreuse et si saincte, le Chapeau et la Chapelle de son maistre.

Aux pages ou laquais qui, estant derrière son carrosse, luy appuieront pistolet, mousqueton ou autre arme et en déliureront le monde, vingt cinq mille

escus.

Aux valets de chambre qui l'estoufferont entre deux couettes, ou qui à coups de sacs de son, de sable ou d'os de morts pilés l'assommeront, ou qui, pour l'estouffer, mettront en vsage noeuds coulans, seruiettes et ceintures, ou qui, lui faisant la barbe, appuieront fortement le rasoir, ou, en lui donnant la chemise, l'embarrasseront et le dagueront facilement à bons coups de poignards ou de bayonnettes empoisonnées et exécuteront l'Arrest du Parlement, soixante et dix mille escus.

A tous ceux de ses domestiques et Officiers de sa maison qui le tueront ou l'ameneront vif ou mort dans Paris, cent mille escus; et seront absous de toutes les peines portées par les Arrests contr'eux et seront déclarés Frondeurs et gens de bien, d'honneur et de probité.

Aux cochers et postillons qui, le conduisant près d'vn précipice, le verseront adroitement, en cas qu'ils iuy fassent rompre le col, quarante mille francs; en cas qu'il n'ait qu'vn bras cassé, deux mille francs; pour les iambes, quatre mille; pour les iambes et les bras, huit mille; pour l'épine du dos, dix mille escus.

A l'Escuyer qui trouuera moyen de déguiser vn sauteur ou trottier en guildine et luy causera quelque descente de boyau, en sorte qu'il deuienne inhabile au coït, mille pistoles et vne chaisne d'or auec la médaille des Princes et de la Ville de Paris,

A tous Pontoniers, Bateliers et Voituriers par eau qui, le menant, feront renuerser le bateau ou trouueront de le faire couler à fonds et se sauueront ensuite à la nage, neuf mille francs.

moyen

A tous Gouuerneurs de Places qui l'arresteront ou le feront tuer, sera donnée la propriété de ladite place pour en iouir eux et leurs enfans iusques à la troisième génération, auec les cinquante mille escus portez par l'Arrest du Parlement.

A tous Médecins qui, le traitant des maladies ordinaires et extraordinaires, luy ordonneront des remèdes conformes à l'Arrest du Parlement et nécessaires au salut de l'Estat, la somme portée par ledit Arrest.

A l'Apothicaire qui infusera ou dissoudra dans ses remèdes arsenic, sublimé, réagal, oppion, suc de napele, aconit, if, ellébore, essence de tabac, suc de crapaud, sueur de rousseau, poudre de diamant, pierre de cautère, verre pilé et autres sucs et herbes salutaires pour le public en la personne dudit Mazarin, la somme de cinquante mille escus, sans préiudice de ses frais dont il sera remboursé.

Au Chirurgien qui, en le saignant, trempera sa lancette dans quelque poison, la somme de soixante mille liures.

Item, à l'Apothicaire qui, luy donnant vn lauement, empoisonnera le canon, vingt mille liures.

Au Cuisinier qui, dans ses ragouts, mettra lièure marin, cantaride, fiel de taureau, éponge préparée, araignée et les autres ingrédiens dénommez dans le premier article de l'apothicaire, la somme de trente mille liures.

Aux Sommeliers qui empoisonneront les fruits, com

potes, confitures et le gobelet et prépareront son vin auec tant d'art que mort s'en ensuiue, dix mille

escus.

A tous Iardiniers et Iardinières, Bouquetiers et Bouquetières qui luy présenteront bouquets parfumez auec poison, mille escus.

A tous Parfumeurs et Gantiers qui seruiront le public en sa personne, comme faisoit celuy de la Reine Catherine, trois mille escus.

A tous Cordonniers qui empoisonneront le roussi et l'escarpin, la somme de deux mille escus.

A tous Secrétaires, Courriers ou Messagers qui luy porteront pacquets bien et dûment préparez, en cas que la chose réussisse au contentement du public, la somme portée par l'Arrest.

Au Courtisan qui, approchant Sa Maiesté, luy désillera les yeux et lui faisant connoistre le misérable estat de son Royaume, la fera consentir à la Conchinade, la mesme récompense du Mareschal de Vitry.

A celuy des Mareschaux de Villeroy, du Plessis, de Turenne, de La Ferté et d'Hocquincourt qui, après l'auoir fait assommer, ramenera le Roy dans sa bonne ville de Paris, l'espée de Connestable.

A ceux qui sont pourueus de breuets de Ducs et Pairs, en cas qu'ils méritent de l'Estat par vne si belle et bonne action, la vérification de leurs Lettres en Parlement nonobstant toutes oppositions.

A toutes femmes et filles de la Cour ou autres de la Ville qui l'esuenteront auec des esuentails empoisonnés, ou qui luy fourreront dans le gosier ces certains busques de laine ou de velours pour l'estouffer, la somme de cinquante mille escus dont elles seront dotées par le Par

lement et mariées dans l'an, sans que leur âge leur puisse nuire ni préiudicier.

Aux femmes qui, le voyant passer par la rue, luy feront tomber sur la teste grais, pots d'œillets ou bonnes grosses pierres et l'assommeront, la mesme récompense qu'eut la bonne femme vénitienne pour auoir tué le Tiépoly.

A ceux qui, iouant auec luy le soir, feront semblant de se quereller, et, après auoir soufflé les flambeaux, à beaux coups de chandelier de Dieu ou d'autres armes en déferont le public, si ce sont financiers, la Surintendance des finances; si ce sont ecclésiastiques, des Éueschez; si ce sont gens d'espée, des Gouuernemens et des dignitez; si ce sont gens de Robe, des Charges de Secrétaires d'Estat ou d'autres à leur choix.

A tous Sorciers, Vaudois, Magiciens et Nécromanciens qui, employant les secrets de leur art et le pouuoir de leur Maistre, par herbes, charmes, billets, images de cire et paroles, déliureront le monde de ce malheureux Estranger, qui en est le perturbateur, la somme portée par l'Arrest, auec le restablissement de leur bonne fame et renommée, en sorte qu'ils puissent aspirer et estre pourueus de toutes Charges, Offices et Bénéfices.

A tous Confesseurs qui fortifieront dans ce pieux dessein ceux qui, par foiblesse d'esprit et scrupule sans fondement, leur reuèleroient à la confession, les Abbayes et autres Bénéfices du défunct.

Si quelqu'vn, poussé de l'esprit de Dieu et touché de la misère publique, préfère le salut du Roy et de l'Estat au sien particulier dans l'exécution d'vne si haute entreprise et digne d'vne récompense éternelle, la somme de

quatre cent mille liures sera donnée à ses héritiers; et outre ce, luy sera fait vn tombeau deuant le grand autel de l'Église Cathédrale de Paris, deuant lequel sera entretenue éternellement vne lampe aux despens du public.

Que si tous ceux qui sont inuitez par ce présent mémoire, fait pour le bien du seruice du Roy et du Royaume, ne pouuoient heureusement exécuter leurs généreux desseins, toutefois pourueu qu'il soit connu par quelqu'effusion notable de son sang qu'ils ont hazardé le coup, ils seront récompensez de la somme de quarante mille francs.

Et afin que l'on ne doute point de la certitude de la récompense, on sera auerty que les sommes, portées par ce mémoire, sont entre les mains de M. le Comte de Fontrailles, demeurant rue d'Aniou près des Enfants Rouges, qui les déliurera ou en deniers comptants ou par lettres de change, payables à Venise, Amsterdam ou Hambourg, au choix dudit exécuteur qui doit s'asseurer que, pourueu qu'il fasse bien son deuoir, on ne le chicanera pas sur la récompense; au contraire, il sera gratifié du change en cas qu'il veuille receuoir la somme hors de Paris.

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