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non que non pas ceux de Prouence du Comte d'Alets; et partant sans auoir esgard à la parenté ou amitié, il pouuoit soustenir le mérite de la cause d'vn Parlement et estre contraire à l'autre.

Les propositions qui sont mises en auant, qu'il demandoit vne armée pour réduire la Franche-Comté et la posséder en Souueraineté, aussi bien que nos autres prises de Flandres, sont de la nature des crimes qui sont aisez à inuenter contre vn prisonnier, mais difficiles à prouuer. Son ambition en cela auroit esté louable; et il n'y a a pas lieu d'excuse où il n'y a pas de faute. Ce ne seroit pas le premier Prince du Sang et suiet de la Couronne qui auroit esté aydé par nos Roys à la conqueste d'vn pays Souuerain. Charles huictième n'assista-t-il pas en pareilles entreprises le Duc d'Orléans son frère1 à conquérir le Milanais? La maison de France n'a-t-elle pas souuent employé ses forces et sa puissance pour ayder les Ducs d'Aniou à se rendre Maistres et Souuerains de Naples? Henry troisième ne donna-t-il pas des forces et du secours au Duc d'Alençon son frère pour la conqueste de Flandre? N'auons-nous pas veu mesme en nos iours le feu Roy Louys treiziesme dompter les rigueurs de l'hiuer et passer les Alpes pour affermir et maintenir le Duc de Neuers son suiet en la Duché et pays de Mantoue? Quel crime donc est ce à vn suiet François de souhaiter d'estre Souuerain aux despens du Roy d'Espagne? Quel préiudice cela feroit il à la Couronne de France? N'y auroit il pas eu moins de péril et plus d'aduantage d'auoir vn si foible voisin pour Souuerain

'Son cousin; le duc d'Orléans, depuis Louis XII.

qu'vn si grand Monarque comme est le Roy d'Espagne?

Mais comment ne taire pas ce qui est si fort à sa gloire, d'auoir esté d'aduis l'esté passé de destacher partie de notre armée de Flandre pour secourir le Liége et empescher l'oppression d'vne Ville alliée, de laquelle nous auions receu tant de secours dans les guerres présentes? N'y auoit il pas plus d'honneur et d'vtilité pour nos armes de les employer à empescher la seruitude de nos voisins que de les occuper à piller et brusler quelques villages de la campagne du Haynaut?

Et pour la Coadiutorerie de Liége, quand vn si glorieux Conseil en auroit esté le motif, l'effect n'en auroit il pas esté profitable et honorable à la France? Ce ne seroit pas d'ailleurs le premier de la maison de Bourbon qui en auroit esté Euesque. Et on demanderoit volontiers le iugement du Lecteur pour sçauoir s'il est plus à propos pour le bien de nos affaires que ce soit l'Euesque d'Osnabruc d'auiourd'hui que M. le Prince de Conty?

Il y alloit donc de l'honneur de la France d'escouter la voix du Liége qui imploroit sa protection? et on impute à crime à vn Prince d'en auoir donné le Conseil!

D'exalter aussi le don de Chantilly et de Dampmartin comme vn des plus beaux présents qui s'est iamais fait à vne seule personne, cela est ridicule, puisqu'on s'est moins estonné du retour de ces terres en la maison d'vn premier Prince du Sang, beau-frère de M. de Montmorency, que de la réserue qu'en auoit fait le feu Roy; et que chacun sçait que les Roys en France, à l'imitation de l'Empereur Adrien, ne profitent pas des biens confisquez et ne veulent pas qu'ils entrent dans leur Espar

gne et qu'ils soient appliquez à leur fisc, mais les donnent à d'autres, ou les rendent ordinairement aux héritiers, comme nous en voyons la pratique dans la mort du Connestable de Saint Paul, Mareschal de Biron, de MM. le Grand et de Tou, les biens desquels sont retournez aux parens.

Pour ce qui est du Duc de Richelieu et des prétentions du Prince sur le Haure en son mariage, c'est interpréter à plaisir les pensées et intentions. Quel crime a-t-il commis d'ayder à l'aduancement d'vne dame confidente et amie particulière de sa sœur, auparauant cette rencontre la fauorite et mignonne mesme de la Duchesse d'Aiguillon qui addressoit et enuoyoit incessamment son Nepueu à l'eschole de ladite Dame pour se former par ses entretiens la grâce et gentillesse qu'il deuoit auoir? Ce Prince a conseillé au Duc de Richelieu de posséder ce que sa Tante vouloit seulement lui faire imiter. L'aduis qu'il eut que la Duchesse d'Aiguillon affligée de ce mariage vouloit trauerser le voyage de cette Dame vers son mary, luy fit dépescher quelques Courriers pour l'aduertir de ses desseins et la faire tenir sur ses gardes. L'escorte qu'il luy a donnée pour aller trouuer le Duc au Haure, n'estoit que pour empescher l'insulte qu'il luy pouuoit estre fait sur les chemins par la dite Dame d'Aiguillon; pour cela est ce agir contre les lois de l'Estat que de déplaire à ladite Duchesse d'Aiguillon auec laquelle il estoit en procez1? Ses intérests sont ils tellement vnis à la Couronne, qu'on ne puisse blesser les vns sans offenser les autres? Où est

↑ Procès burlesque entre Monsieur le Prince et Madame la Duchesse d'Aiguillon, etc. [2284].

son crime? Le Duc de Richelieu n'a pu se marier sans le consentement du Roy et de la Reyne; cela est vray, s'il eust fait quelque alliance hors du Royaume, mais non pas pour celles qui se contractent en France. Pourquoy maintenant le Duc de Richelieu luy auroit-il promis le Haure? Ne payoit-il pas bien ce bon office sur le champ, sans luy donner encore de retour la place?

Le sieur de Guénégaud fait fort bien de passer sous silence les promotions aux Breuets de Ducs et Mareschaux de France qui ont esté accordez à la recommandation de M. le Prince. Nous n'auons pour l'vn que le Mareschal de Gassion. Chacun a connu par les seruices qu'il a rendus en cette qualité, qu'il méritoit cet honneur. La bataille de Rocroy où il seruit si dignement, fut le motif de la recommandation de M. le Prince. Où est en cela la faute et le suiet de ce reproche? Pour le Breuet de Duc, on ne peut remarquer que feu M. de Chastillon, lequel sans appuy de M. le Prince pouuoit bien se promettre de la Reyne vn traitement pareil à celuy de Messieurs de Liancourt et de Tresmes. La mort, les seruices de son père et les siens en tant de batailles et de rencontres, n'étoient ce pas de beaux dégrez pour monter à la gloire et luy faire espérer la continuation des honneurs qui auoient esté accordez pour récompense à son père?

Ne seroit il pas à souhaiter à la Reyne pour la gloire de sa Régence et l'aduantage de cette Couronne, qu'elle eust souuent les mesmes occasions de distribuer ses grâces? L'enuie ne règnera pas tant dans la cour quand elle appliquera si iustement ses bienfaits, qui n'auront iamais aucune suite ny conséquence à craindre.

Quant à sa prétention à l'Admirauté, elle semble assez

iuste et excusable, puisqu'elle vaquoit par la mort de son beau-frère et qu'il eust esté maintenant très glorieux à la France de le veoir aussi heureusement commander sur mer, comme il faisoit sur terre. Et certes n'auoit il pas vn fondement bien légitime de croire auec tout le monde que cette charge passoit par les mains de la Reyne pour tomber plus doucement en celles du Cardinal, qui l'a tousiours depuis maniée et en a retiré tous les reuenus et aduantages? Mais pendant que le Prince triomphoit continuellement sur la terre par le succès de ses armes, le Cardinal faisoit triompher l'Espagnol sur mer, la France n'ayant eu que malheurs et disgrâces dans les armées nauales depuis qu'il en a pris la direction. Ce n'ont esté que sorties de port à contre temps, que brisemens de vaisseaux et escueils de galères. Les meilleures nouuelles qui venoient de là, estoient les moindres pertes; et chacun sçait ce que ses chimères du costé d'Italie ont cousté à la couronne et combien la dernière descente aux Costes de Naples sur ses ordres fut iudicieuse. Tandis que toute cette grande Ville estoit aux feux et aux armes, l'armée nauale cherchoit vn chapeau pour son frère, au lieu de prendre vn Royaume pour la France, ou de le faire perdre à l'Espagne. Mais quand l'Espagnol en eut calmé les mouuemens et l'eut réduite à son obéissance, pour lors le Cardinal qui auoit des intelligences secrètes dans le païs, y enuoya eschouer notre armée et descharger plusieurs pièces de canon sur ses riuages, que nous y laissâmes pour marque de notre belle entreprise. Sans nous arrester aux éuenemens, qui ne louera la Politique et générosité du Cardinal d'auoir trouué plus à propos et plus glorieux pour la France d'attaquer l'Espagnol à Naples dans ses prospéritez que de se ioindre, l'an

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