ページの画像
PDF
ePub
[ocr errors]

« L'armée se rangea dans cet ordre, autour » de Jérusalem: Le comte de Flandre et le >> comte de Normandie déployèrent leurs » tentes du côté du septentrion, non loin de l'église bâtie sur le lieu où saint Etienne, premier martyr, fut lapidé (1); Godefroy et » Tancrède se placèrent à l'occident; le comte » de Saint-Gilles campa au midi, sur la mon» tagne de Sion (2), autour de l'église de Ma>> rie, mère du Sauveur, autrefois la maison » où le Seigneur fit la Cène avec ses disciples. » Les tentes ainsi disposées, tandis que les » troupes fatiguées de la route se reposoient et >> construisoient les machines propres au com

(1) Le texte porte: Juxta ecclesiam Sancti-Stephani protomartyris, etc. J'ai traduit, non loin, parce que cette église n'est point au septentrion, mais à l'orient de Jérusalem; et tous les autres historiens des Croisades disent que les comtes de Normandie et de Flandre se placèrent entre l'orient et le septentrion.

(2) Le texte Scilicet in monte Sion. Cela prouve que la Jérusalem rebâtie par Adrien n'enveloppoit pas la montagne de Sion dans son entier, et que le local de la ville étoit absolument tel qu'on le voit aujourd'hui.

» bat, Raimond Pilet (1), Raimond de Tu>> renne sortirent du camp avec plusieurs >> autres pour visiter les lieux voisins, dans la » crainte que les ennemis ne vinssent les sur» prendre avant que les Croisés fussent prépa¬ >> rés. Ilsrencontrèrent sur leur route trois cents » Arabes; ils en tuèrent plusieurs, et leur pri>> rent trente chevaux. Le second jour de la » troisième semaine, 13 juin 1099, les Fran»çais attaquèrent Jérusalem; mais ils ne pu» rent la prendre ce jour-là. Cependant leur » travail ne fut pas infructueux ; ils renverse>> rent l'avant-mur, et appliquèrent les échelles » au mur principal. S'ils en avoient eu une >> assez grande quantité, ce premier effort eût » été le dernier. Ceux qui montèrent sur les » échelles combattirent long-temps l'en» nemi à coups d'épée et de javelot. Beau» coup des nôtres succombèrent dans cet as»saut; mais la perte fut plus considérable du >> côté des Sarrasins. La nuit mit fin à l'action » et donna du repos aux deux partis. Toute» fois l'inutilité de ce premier effort occa»sionna à notre armée un long travail et

(1) Piletus, on lit ailleurs Pilitus et Pelez,

beaucoup de peine; car nos troupes de>> meurèrent sans pain pendant l'espace de » dix jours, jusqu'à ce que nos vaisseaux >> fussent arrivés au port de Jafa. En outre >> elles souffrirent excessivement de la soif; la >> fontaine de Siloë, qui est au pied de la mon>> tagne de Sion, pouvoit à peine fournir de » l'eau aux hommes, et l'on étoit obligé de >> mener boire les chevaux et les autres ani» maux à six milles du camp, et de les faire >> accompagner par une nombreuse escorte.

[ocr errors][ocr errors]

» Cependant la flotte arrivée à Jafa pro» cura des vivres aux assiégeans, mais ils ne » souffrirent pas moins de la soif: elle fut si » grande durant le siége, que les soldats >> creusoient la terre et pressoient les mottes » humides contre leur bouche; ils léchoient >> aussi les pierres mouillées de rosée ; ils » buvoient une eau fétide qui avoit sé» journé dans des peaux fraîches de buffles » et de divers animaux; plusieurs s'abste»> noient de manger, espérant tempérer la » soif par la faim.

.

» Pendant ce temps-là les généraux fai

[ocr errors]

» soient apporter de fort loin de grosses pièces » de bois pour construire des machines et des » tours. Lorsque ces tours furent achevées » Godefroy plaça la sienne à l'orient de la » ville; le comte de Saint-Gilles en établit une >> autre toute semblable au midi. Les dispo» sitions ainsi faites, le cinquième jour de la » semaine, les Croisés jeûnèrent et distri>> buèrent des aumônes aux pauvres; le » sixième jour qui étoit le douzième de >> juillet, l'aurore se leva brillante; les guer>> riers d'élite montèrent dans les tours, et » dressèrent les échelles contre les murs de >> Jérusalem. Les enfans illégitimes de la Ville» Sainte s'étonnèrent et frémirent (1), en se » voyant assiégés par une si grande multi»tude. Mais comme ils étoient de tous côtés >> menacés de leur dernière heure, que la mort

(1) Stupent et contremiscunt adulterini cives urbis eximia. L'expression est belle et vraie; car non-seulement les Sarrasins étoient en leur qualité d'étrangers des citoyens adultères, des enfans impurs de Jérusalem, mais ils pouvoient encore s'appeler adulterini, à cause de leur mère Agar, et relativement à la postérité légitime d'Israël par Sara.

[ocr errors]

>>

» étoit suspendue sur leurs têtes; certains de >> succomber ils ne songèrent plus qu'à » vendre cher le reste de leur vie. Cependant » Godefroy se montroit sur le haut de sa » tour, non comme un fantassin, mais comme » un archer. Le Seigneur dirigeoit sa main » dans le combat, et toutes les flèches » qu'elle lançoit perçoient l'ennemi de part en part.Auprès de ce guerrier étoient Baudouin » et Eustache ses frères, de même que deux » lions auprès d'un lion: ils recevoient les » coups terribles des pierres et des dards, >> et les renvoyoient avec usure à l'ennemi. » Tandis que l'on combattoit ainsi sur les » murs de la ville, on faisoit une procession » autour de ces mêmes murs, avec les croix, » les reliques et les autels sacrés (1). L'avan>> tage demeura incertain pendant une par>> tie du jour; mais à l'heure où le Sauveur » du monde rendit l'esprit, un guerrier » nommé Létolde, qui combattoit dans la

(1) Sacra altaria. Ceci a l'air de ne pouvoir se dire que d'une cérémonie païenne; mais il y avoit apparemment dans le camp des Chrétiens des autels portatifs.

« 前へ次へ »