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guerriers;
Mais Carthage_l'avoue,
Le séjour de Capoue
Flétrit tous ses lauriers.

Jadis tout l'Orient tremblait devant l'Attique,
Ses valeureux guerriers, sa sage politique,
De ses puissants voisins arrêtaient les pro-
grès,

consentir. Le génie de l'Empereur, Ils imposaient leur joug à ces peuples subjugué par celui d'Eugène, n'osait rien lui refuser. L'augmentation de quarante mille hommes fut résolue, et bientôt l'armée se trouva complète. Les comtes de Zinzendorf et de Stahremberg, ennemis du prince Eugène, représentérent à l'empereur que ses pays, foulés par des contributions énormes, ne pouvaient suffire à l'entretien d'une si grosse armée, et qu'à moins de vouloir ruiner de fond en comble l'Autriche, la Bohème et les autres provinces, il fallait réformer l'augmentation. Charles VI se laissa entraîner par ses ministres, et licentia ces quarante mille hommes nouvellement levés, à la veille du décès d'Auguste I, roi de Pologne.

Deux candidats se présentèrent pour occuper ce trône vacant. L'un c'était Auguste, électeur de Saxe, fils du dernier roi de Pologne, soutenu par l'empereur des Romains, l'impératrice de Russie, l'argent et les troupes saxonnes. L'autre était Stanislas Lezcynski, appelé par les vœux des Polonais et protégé par Louis XV, son gendre; mais le secours qu'il tira de la France se réduisit à quatre bataillons. Il vit la Pologne; il fut assiégé à Danzic; il ne put s'y maintenir, et renonça pour la seconde fois au triste honneur de porter le nom de roi dans une république où régnait l'anarchie.

AUX PRUSSIENS.

Peuples que la valeur conduisit à la gloire, Héros ceints des lauriers que donne la victoire,

Enfants chéris de Mars, comblés de ses
faveurs,

Craignez que la paresse,
L'orgueil et la mollesse

Ne corrompent vos mœurs.

Par l'instinct passager d'une vertu commune,
Un État sous ses lois asservit la fortune,
Il brave ses voisins, il brave le trépas;

Mais sa vertu s'efface,
Et son empire passe,
S'il ne le soutient pas.

Tels furent les vainqueurs de la fière Au

sonie.

Ennemis des Romains, rivaux de leur génie,

Quand la Grèce opprimée
Défit l'immense armée
De l'orgueilleux Xerxès.

A l'ombre des grandeurs elle enfanta les
vices,

L'intérêt y trama ses noires injustices,
La lâcheté parut où régnait la valeur,
Et sa force épuisée
La rendit la risée

De son nouveau vainqueur.

Ainsi, lorsque la nuit répand ses voiles
sombres,
L'éclair brille un moment au milieu de ces
ombres,

Dans son rapide cours un éclat éblouit;
Mais dès qu'on l'a vu naître,
Trop prompt à disparaître,
Son feu s'anéantit.

Le soleil plus puissant du haut de sa car

rière

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Héros, vos grands exploits élèvent cet em-
pire;

Soutenez votre ouvrage, ou votre gloire
expire;
D'un vol toujours rapide il faut vous éle-

ver,

Et monté près du faîte,
Tout mortel qui s'arrête
Est prêt à reculer.

Dans le cours triomphant de vos succès
prospères,

Soyez humains et doux, généreux, débon-
naires,
vos coups

Et que tant d'ennemis sous
abattus

Rendent un moindre hommage
A votre ardent courage
Qu'à vos rares vertus.

JEAN BAPTISTE ROUSSEAU.

Jean Baptiste Rousseau naquit à Paris le 16 avril 1670. Son père, qui exerçait la profession de cordonnier, averti des dispositions heureuses qu'il montrait, l'envoya étudier chez les jésuites. Il fit d'excellentes études et eut le bonheur de recevoir les conseils de Boileau. Il débuta dans la littérature par des odes sacrées, imitées de la Bible, adressées aux vieillards convertis du XVIIe siècle, et par des poésies licencieuses, destinées aux jeunes libertins, qui allaient être les roués de la régence. Le jeune poète, après un premier succès dramatique, avait répondu à son père, qui était accouru pour l'en féliciter:,,Je ne vous connais pas!" ce qui lui attira une belle stance

de Lamotte, né comme lui dans une condition obscure. Rousseau ne parvint jamais à obtenir de triomphes au théâtre, quoiqu'il s'y crût appelé par une vocation particulière; et, pour comble de malheur, la chute de sa comédie du Flatteur donna naissance à ces infâmes et trop fameux couplets qui attirèrent sur lui un arrêt de bannissement et laissent encore planer sur sa mémoire de cruelles accusations. Rousseau, exilé de sa patrie, se retira d'abord en Suisse, et habita successivement l'Allemagne, la Flandre, l'Angleterre, et la Hollande. Il mourut à Bruxelles, le 17 mars 1741, en protestant qu'il n'était point l'auteur des couplets.

A LA FORTUNE.
Fortune, dont la main couronne
Les forfaits les plus inouïs,
Du faux éclat qui t'environne
Serons-nous toujours éblouis?
Jusques à quand, trompeuse idole,
D'un culte honteux et frivole
Honorerons-nous tes autels?
Verra-t-on toujours tes caprices
Consacrés par les sacrifices
Et par l'hommage des mortels?

Le peuple, dans ton moindre ouvrage
Adorant la prospérité,

Te nomme grandeur de courage,
Valeur, prudence, fermeté.
Du titre de vertu suprême
Il dépouille la vertu même,
Pour le vice que tu chéris:
Et toujours ses fausses maximes
Erigent en héros sublimes
Tes plus coupables favoris.

Apprends que la seule sagesse
Peut faire les héros parfaits;
Qu'elle voit toute la bassesse
De ceux que ta faveur a faits;
Qu'elle n'adopte point la gloire
Qui naît d'une injuste victoire
Que le sort remporte pour eux;
Et que, devant ses yeux stoïques,

Leurs vertus les plus héroïques,
Ne sont que des crimes heureux.

Quoi! Rome et l'Italie en cendre
Me feront honorer Sylla!
J'admirerai dans Alexandre
Ce que j'abhorre en Attila?
J'appellerai vertu guerrière
Une vaillance meurtrière

Qui dans mon sang trempe ses mains?
Et je pourrai forcer ma bouche

A louer un héros farouche

Né pour le malheur des humains?

Quels traits me présentent vos fastes,
Impitoyables conquérants?

Des vœux outrés, des projets vastes;
Des rois vaincus par des tyrans;
Des murs que la flamme ravage;
Des vainqueurs fumant de carnage;
Un peuple aux fers abandonné:
Des mères pâles et sanglantes,
Arrachant leurs filles tremblantes
Des bras d'un soldat effréné.

Juges insensés que nous sommes,
Nous admirons de tels exploits!
Est-ce donc le malheur des hommes
Qui fait la vertu des grands rois?
Leur gloire, féconde en ruines,
Sans le meurtre et sans les rapines

Ne saurait-elle subsister?
Images des dieux sur la terre,
Est-ce par des coups de tonnerre
Que leur grandeur doit éclater?

Quel est donc le héros solide
Dont la gloire ne soit qu'à lui!
C'est un roi que l'équité guide,
Et dont les vertus sont l'appui;
Qui, prenant Titus pour modèle,
Du bonheur d'un peuple fidèle
Fait le plus cher de ses souhaits;
Qui fuit la basse flatterie;
Et qui, père de sa patrie,
Compte ses jours par ses bienfaits.

Héros cruels et sanguinaires,
Cessez de vous enorgueillir
De ces lauriers imaginaires
Que Bellone vous fit cueillir.
En vain le destructeur rapide
De Marc-Antoine et de Lépide
Remplissait l'univers d'horreurs:
Il n'eût point eu le nom d'Auguste
Sans cet empire heureux et juste
Qui fit oublier ses fureurs.

Montrez-nous, guerriers magnanimes,
Votre vertu dans tout son jour:
Voyons comment vos cœurs sublimes
Du sort soutiendront le retour.
Tant que sa faveur vous seconde,
Vous êtes les maîtres du monde;
Votre gloire nous éblouit:
Mais, au moindre revers funeste,
Le masque tombe, l'homme reste,
Et le héros s'évanouit.

L'effort d'une vertu commune
Suffit pour faire un conquérant:
Celui qui dompte la fortune
Mérite seul le nom de grand.
Il perd sa volage assistance,
Sans rien perdre de la constance
Dont il vit ses honneurs accrus;
Et sa grande âme ne s'altère
Ni des triomphes de Tibère
Ni des disgraces de Varus.

IMITATION DU PSAUME XVIII.

De sa puissance immortelle
Tout parle, tout nous instruit.
Le jour au jour la révèle,

La nuit l'annonce à la nuit.
Ce grand et superbe ouvrage

N'est point pour l'homme un langage
Obscur et mystérieux :

Son admirable structure

Est la voix de la nature,
Qui se fait entendre aux yeux.

Dans une éclatante voûte
Il a placé de ses mains
Ce soleil qui dans sa route
Éclaire tous les humains.
Environné de lumière,
Il entre dans sa carrière
Comme un époux glorieux,
Qui, dès l'aube matinale,
De sa couche nuptiale
Sort brillant et radieux.

L'univers, à sa présence,
Semble sortir du néant.

Il prend sa course, il s'avance
Comme un superbe géant.
Bientôt sa marche féconde
Embrasse le tour du monde
Dans le cercle qu'il décrit;
Et, par sa chaleur puissante,
La nature languissante
Se ranime et se nourrit.

Oh! que tes œuvres sont belles,
Grand Dieu! quels sont tes bienfaits!
Que ceux qui te sont fidèles
Sous ton joug trouvent d'attraits!
Ta crainte inspire la joie;
Elle assure notre voie;
Elle nous rend triomphants:
Elle éclaire la jeunesse,
Et fait briller la sagesse
Dans les plus faibles enfants.

IMITATION DU PSAUME XLVII.

Des lieux chéris où le jour prend naissance,
Jusqu'aux climats où finit sa splendeur,
Tout l'univers révère ta puissance,
Tous les mortels adorent ta grandeur.

Publions les bienfaits, célébrons la justice
Du souverain de l'univers.

Qu'avec nous la terre s'unisse:

Que le bruit de nos chants vole au delà des

mers.

Vous, filles de Sion, florissante jeunesse, Joignez-vous à nos chants sacrés: Formez des pas et des sons d'allégresse Autour de ces murs révérés.

Venez offrir des vœux pleins de tendresse
Au Seigneur que vous adorez.

C'est notre Dieu, c'est notre père;
C'est le roi que Sion révère:

De son règne éternel les glorieux instants
Dureront au delà des siècles et des temps.

MARIE ANDRÉ CHÉNIER.

Marie André Chénier naquit à Constantinople, en 1762. Son père, homme savant et ingénieux, était consul de France, et sa mère était une Grecque, belle et spirituelle. André vint jeune en France avec son frère Marie Joseph. Ses études terminées, il embrassa la carrière militaire, puis la diplomatie, et y renonça bientôt pour se livrer tout entier à la poésie. Chénier, d'abord

partisan de la révolution, la combattit énergiquement forsqu'elle s'égara dans le sang. Il fut arrêté comme suspect, et exécuté en 1794, avec trente-huit autres prisonniers, parmi lesquels était le poète Roucher, son ami. André Chénier a laissé des idylles, des élégies, des odes, un poème sur l'Invention, des fragments de poésies diverses et de prose.

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Est-ce à moi de mourir? Tranquille je m'endors,

Et tranquille je veille; et ma veille aux remords

Ni mon sommeil ne sont en proie. Ma bienvenue au jour me rit dans tous les yeux:

Sur des fronts abattus, mon aspect dans ces lieux

Ranime presque de la joie.

Mon beau voyage encore est si loin de sa fin!

Je pars, et des ormeaux qui bordent le
chemin

J'ai passé les premiers à peine.
Au banquet de la vie à peine commencé,
Un instant seulement mes lèvres ont pressé

La coupe en mes mains encor pleine.

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neuses,

Et ces réseaux légers, diaphanes habits,
Où la fraîche grenade enferme ses rubis.
Sur tes rochers touffus la chèvre se hérisse,
Tes prés enflent de lait la féconde génisse,
Et tu vois les brebis, sur le jeune gazon,
Épaissir le tissu de leur blanche toison.
Dans les fertiles champs voisins de la Tou-
raine,

Dans ceux où l'Océan boit l'urne de la
Seine,
S'élèvent pour le frein des coursiers belli-
queux.

Ajoutez cet amas de fleuves tortueux: L'indomptable Garonne aux vagues insensées,

Le Rhône impétueux, fils des Alpes glacées, La Seine au flot royal, la Loire dans son sein

Incertaine, et la Saône, et mille autres enfin

Qui nourrissent partout, sur tes nobles rivages,

Fleurs, moissons et vergers, et bois, et pâturages, Rampent au pied des murs d'opulentes cités. Sous les arches de pierre à grand bruit

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Le

Avant que de ses deux moitiés
vers que je commence ait atteint la
dernière,

Peut-être en ces murs effrayés
messager de mort, noir recruteur des
ombres,

Escorté d'infâmes soldats,

Remplira de mon nom ces longs corridors

sombres.

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