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craindre d'éprouver des obstacles à la publier ou à la faire circuler en France.

Il y auroit encore à faire remarquer le nombre de petits détails personnels à Testelin qui abondent dans ces mémoires, et combien certains ne peuvent avoir été connus de cette façon que par Testelin lui-même : ainsi toutes les menées secrètes qu'il suivit pendant si longtemps pour arriver à faire remettre Le Brun à la tête de l'Académie. Mais je crois qu'il seroit inutile d'insister davantage sur ce point, qui me paroît aussi acquis que possible, et tellement, qu'il est presque superflu d'indiquer une autre objection toute de forme, si, comme elle pourroit être faite, il ne valoit mieux la prévenir. Comme, dans un endroit, l'on trouve ces mots : « Il est fàcheux, pour la mé» moire de M. Mignard, que son nom soit conservé » avec celle de cet événement dans les registres » de la communauté,» il est possible, mais je ne sais s'il seroit bien sérieux de dire que Testelin, mort le 17 avril 1695, et ayant survécu un mois à Mignard, mort le 13 mai 1695, ne peut pas avoir écrit cette phrase. Il n'y a là qu'une façon de dire, et rien à tirer de ce que le verbe est au présent, et non au futur. Mais, ces deux objections fussentelles capitales, elles seroient bien ébranlées par l'impossibilité à peu près absolue de penser, les vingt-quatre premiers académiciens, à un autre qu'à Testelin.

dans

Après avoir parlé de l'ouvrage que nous publions, nous avons à ajouter qu'il s'est conservé aussi une copie manuscrite d'une première pensée de cette histoire. Elle existe à la bibliothèque de

l'Arsenal, en un volume petit in-folio de 568 pages. (Histoire, no 822), qui est indiqué dans Hænel, page 378. Il porte comme titre : Relation de ce qui s'est passé en l'établissement de l'Académie Royale de peinture et de sculpture. Un de ses possesseurs a écrit sur un des feuillets de garde : «Je crois cette relation exacte et vraye dans ses >> circonstances. Mais elle est favorable aux préten>>tions qu'a l'Académie et Communauté des peintres >>de Saint-Luc, qui soutiennent que l'Académie » Royale a été tirée de leur corps et n'a point anéanti >> leur académie. » Il est impossible d'être plus sot: car, si l'existence ancienne de la maîtrise est un fait que ne pouvoit nier l'historien de l'Académie de peinture, il est impossible d'être moins favorable que lui à la maîtrise, ainsi qu'on a pu voir. Le copiste s'est nommé dans ces lignes écrites à la fin du manuscrit : «< Copié par Antoine Sauvageot en 1738. » Nous ne pouvons pas lui faire grands compliments; car, outre bien d'autres bévues, il écrit toujours Mollet le nom du chancelier Molé, et, quand son original avoit C.lier en abrégé pour chancelier, il met C. Lier sans avoir l'air de comprendre l'abréviation. La rédaction, qui est la même dans son ensemble, est seulement beaucoup plus courte; elle ne va même pas jusqu'à la fin du manuscrit, dont les pages 154 à 168 sont occupées par quelques additions, l'état des dépenses de l'Académie, quelques passages extraits des registres, une note sur les différentes subventions accordées à l'Académie, et une lettre du duc d'Antin à Coypel du 6 septembre 1715.

Rien ne pourroit servir à lever l'anonyme de

cette relation, car nulle part il n'y est dit que son auteur fit partie de l'Académie; mais il n'est pas difficile de faire voir qu'elle est la première pensée de Testelin. Si le commencement est différent de son ouvrage définitif, les douze pages sur les arts en général, par lesquelles elle s'ouvre, se retrouvent en substance dans la préface des Sentiments. I'ordre des faits est le même; on y retrouve même énormément de formes et de fragments de phrases semblables; quelques unes des erreurs de Testelin s'y retrouvent; ainsi celle à propos de la nomination des premiers professeurs, pour laquelle <«< on s'assembla au logis de M. de Beaubrun, le.. jour de février 1648. » La fin suffiroit seule à constater l'identité. Voici comment elle s'exprime :

<< Ainsi fut terminé l'établissement de l'Académie Royale de peinture et de sculpture, sous le règne et par l'autorité du plus glorieux et du plus magnifique des rois, Louis quatorze, sous la protection du plus illustre ministre qui ait été en France, par les soins et les bontés duquel l'Académie n'a pas seulement été affermie solidement, mais elle a fait de si grands progrès que la postérité en doit être reconnoissante. Enfin, cet établissement fut fait en faveur et à la considération du plus habile peintre qui ait jamais été en France, doué universellement des plus belles parties de cette profession, et qui l'a élevée au plus haut point d'honneur où elle puisse monter. »

La fin est ici bien plus longue; mais l'analogie est frappante, et celle-ci est évidemment le thème de l'autre, dans laquelle on retrouvera en déve

loppements, et dans le même ordre, toutes les idées dont la première avoit la suite et le

germe.

J'ai dit que les différences, bien entendu dans ce que contient le manuscrit de l'Arsenal, plus court que l'autre, sont insensibles; je les ai relevées dans les notes. Les additions ne le sont pas davantage. Je citerai cependant deux passages : le premier (p. 96), parce qu'il complète notre histoire (voir à la page 4 du second volume) : « Car >> il (le chancelier) fit présent de cette somme à la >> compagnie, au moyen de quoy elle transigea du >> consentement de S. M. avec M. Sarrazin; entrant » en possession aussitôt, après s'être déchargée de » ses loyers en payant seule toutes les dettes qu'elle >> avoit en commun avec les maîtres, par une con>>> tribution que chacun fit, et même remboursa M. >> Vignon de quelques deniers qu'il avoit payés par » la surprise des maîtres contre la résolution de » l'Académie »; le second, parce qu'il se rapporte à la fameuse lettre : Le cœur de l'Académie aux douze anciens d'icelle, que nous avons dit ne pas venir d'un autre que de Testelin le cadet: « Ces >>> choses étant considérées par un des académiciens » qui fréquentoit assiduement les assemblées, sans » s'émanciper de parler, parce qu'outre que son >> naturel le portoit à cette retenue, il craignoit de » n'être pas favorablement écouté; il résolut de faire par écrit une remontrance. » On peut voir dans la notice sur la galerie d'Apollon, par notre ami M. de Chennevières (1851, in-12, p. 22-4) un long passage que nous avons extrait de la leçon de l'Arsenal, préférant le tirer du manuscrit que nous ne devions pas publier, et permettre de le comparer

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avec celui qu'on trouve ici (II, 32-6). C'est aussi du manuscrit de l'Arsenal que nous avons extrait pour les Archives de l'art françois (I, 267) le billet de Mignard et Du Fresnoy à Le Brun, qui se retrouve ici (p. 103) avec la même mention de la liasse, cotée B.

Il nous reste encore à parler des tables, des notes et de l'appendice qui accompagnent notre édition. La première table, qui, comme on peut le voir, est une analyse par paragraphes de l'ouvrage et dans le même ordre, n'existe pas dans le manuscrit sous cette forme; elle se trouve en marge de chaque page et en face du passage qu'elle résume; le format de cette collection ne nous ayant pas permis de conserver ces manchettes, nous avons cru, surtout à cause de la suite donnée par l'auteur à ses phrases, qu'il étoit utile de les mettre à la fin sous la forme d'une table, qui résume le livre de la façon la plus complète. L'auteur tenoit, du reste, à ce que rien de son livre ne fût perdu, car la table alphabétique est faite avec un soin et un détail incroyables. C'est le livre repris à chaque instant, dans tous les sens, et repassant incessamment sous les yeux. Chaque fait est placé sous le nom de tous les personnages qui y ont concouru, sous toutes les choses avec lesquelles il a un rapport, et tout cela est souvent rangé sous des mots abstraits qu'on ne pense guère à chercher. Le livre eût manqué de table, et nous eussions eu en faire une, qu'elle cût été toute différente et se fût bornée aux noms et aux faits avec le renvoi

des pages. Mais, outre que, dans son excès même, celle-ci est excellente, elle a bien le caractère de

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