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Dont le pied s'avançoit sous les eaux moins profondes.
Là, le vaisseau s'élance, emporté par les ondes;
Le roc heurté s'ébranle; avec un long fracas
Les avirons brisés s'envolent en éclats,
Et la proue au rocher demeure suspendue.
L'épouvante est partout; une foule éperdue
De lamentables cris fait retentir les cieux..

Tout s'empresse au travail; tous, armés de longs pieux,
Soulèvent le navire, et leurs mains diligentes
Recueillent les débris de leurs rames flottantes.
Mnesthée alors s'anime, et, sur l'onde emporté,
Au gré des vents s'élance avec agilité :
Et comme au fond d'un roc, sa demeure chérie,
Une colombe en paix et dans l'ombre nourrie,
Si quelqu'effroi soudain vient troubler son réduit,
Tressaille, bat de l'aile, et s'échappe à grand bruit,
Puis nage mollement, et dans un air tranquille
Soutient l'agilité de son vol immobile:

Tel glisse le vaisseau; tel, et plus prompt encor,
Il court, rase les flots, et poursuit son essor.
Sa vitesse redouble au bout de sa carrière.
Déjà son vol ardent passe et laisse en arrière
Sergeste qui, tâchant de reprendre son cours,
Luttant contre son roc, implorant du secours,
Essayoit vainement quelques débris de rames:
De là vers la Chimère à la gueule de flammes
Il s'élance, l'atteint; et le pesant vaisseau,
Dépourvu de pilote, est vaincu de nouveau.

Tum verò ingeminat clamor, cunctique sequentem

Instigant studiis, resonatque fragoribus æther.
Hi, proprium decus et partum, indignantur, honorem
Ni teneant, vitamque volunt pro laude pacisci.
Hos successus alit: possunt, quia posse videntur.
Et fors æquatis cepissent præmia rostris,

Ni palmas ponto tendens utrasque Cloanthus
Fudissetque preces, divosque in vota vocasset :
Dî quibus imperium est pelagi, quorum æquora curr
Vobis lætus ego hoc candentem in littore taurum
Constituam ante aras, voti reus, extaque salsos

Porriciam in fluctus, et vina liquentia fundam.

Dixit: eumque
imis sub fluctibus audiit omnis
Nereïdum Phorcique chorus, Panopeaque virgo;
Et pater ipse manu magnâ Portunus euntem
Impulit: illa Noto citius volucrique sagittâ
Ad terram fugit, et portu se condidit alto.

Tum satus Anchisâ, cunctis ex more vocatis,
Victorem magnâ præconis voce Cloanthum

Cloanthe reste seul: fier de son avantage

Mnesthée à son aspect redouble de courage.

Alors de nouveaux cris dans les airs sont lancés;
Et par mille clameurs, par des vœux empressés,
La commune faveur le pousse à la victoire.

Des deux parts même espoir, même ardeur pour la gloire. L'un, fier de son succès, s'obstine à le garder,

Et veut mourir cent fois plutôt que de céder:

L'autre, heureux par l'audace, ose encor davantage;
Son espoir fait sa force; et, grâce à son courage,
Peut-être un même honneur égaloit ces rivaux,
Si Cloanthe, étendant ses deux bras vers les eaux,
N'eût invoqué les dieux de ces plaines profondes:
<< Humides habitans de l'empire des ondes!

» Heureux dominateurs de ces mers où je cours!
» Si je dois la victoire à vos heureux secours,

» Oui, j'en fais vœu, pour prix de cet honneur suprême, » J'immole un taureau blanc sur ce rivage même,

» Je jette dans les mers ses intestins fumans,

>> Et mêle un pur nectar à leurs flots écumans. »
Il dit: et, du palais de la mer azurée,
Les agiles Tritons, les filles de Nérée,
Entendirent sa voix. De sa puissante main
Palémon le seconde; il le pousse; et soudain
Plus rapide qu'un trait sa nef obéissante
Court, vole, et dans le port arrive triomphante.
Le fils d'Anchise alors, aux accens du clairon,
De Cloanthe vainqueur fait proclamer le nom :

Declarat, viridique advelat tempora lauro :

Muneraque in naves, ternos optare juvencos,
Vinaque, et argenti magnum dat ferre talentum.
Ipsis præcipuos ductoribus addit honores:

Victori chlamydem auratam, quam plurima circum
Purpura Mæandro duplici Melibœa cucurrit :
Intextusque puer frondosâ regius Ida
Veloces jaculo cervos cursuque fatigat

Acer, anhelanti similis ; quem præpes ab Ida
Sublimem pedibus rapuit Jovis armiger uncis;
Longævi palmas nequidquam ad sidera tendunt
Custodes, sævitque canum latratus in auras.

At, qui deinde locum tenuit virtute secundum,
Levibus huic hamis consertam auroque trilicem
Loricam, quam Demoleo detraxerat ipse
Victor apud rapidum Simoënta sub Ilio alto,
Donat habere viro, decus et tutamen in armis:
Vix illam famuli Phegeus Sagarisque ferebant
Multiplicem, connixi humeris; indutus at olim

Le nom victorieux de toutes parts résonne.
Du laurier verdoyant lui-même il le couronne.
Ensuite il fait conduire à chacun des vaisseaux
De l'argent, et du vin, et trois jeunes taureaux.
Les chefs ont leur tribut. Au vainqueur il présente
Un vêtement guerrier où la pourpre éclatante,
Bordant un tissu d'or par un double contour,
En deux bandes s'étend et serpente alentour.
Sur ce tissu l'on voit, armé de traits rapides,
Ganymède à grands pas presser les daims timides;
Échauffé, hors d'haleine, et le feu dans les yeux,
Il semble respirer: l'oiseau du roi des dieux
L'aperçoit, fond sur lui, le saisit et l'enlève :
Ses gouverneurs, levant les bras vers leur élève,
Le suivent vainement de leurs yeux attendris,
Et ses chiens étonnés l'appellent à grands cris.
Celui de qui l'adresse a la seconde place,
Reçoit pour récompense une riche cuirasse
Dont l'or à triple maille a formé le tissu.
Le héros généreux dont sa main l'a reçu,

Énée, aux bords du Xanthe et sous les murs de Troie,
Avoit au fier Démole arraché cette proie.
Surpris de sa richesse et de sa pesanteur,
Aux bras impatiens du fier triomphateur
La portent réunis Sagaris et Phégée :
De ce prix glorieux leur épaule chargée
Fléchit sous le fardeau; mais Démole autrefois
Poursuivoit les Troyens sans en sentir le poids.

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