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13 Il répand deux grands vases de vin, etc. Athénée, liv. II, dit que ces vases que Virgile appelle carchesia, étoient longs, et un peu étroits vers le milieu, avec deux petites anses qui descendoient du haut du vase jusqu'en bas. Ils ressembloient un peu à ces vases dont nous nous servons pour faire bouillir le thé. Daléchamp traduit ainsi le passage d'Athénée : Carchesium est poculum oblongum, in medio leniter compressum, auribus utrimque ad fundum usque pertinentibus. Carchesium étoit aussi un terme de marine, qui signifioit la partie supérieure du mât d'un navire, de laquelle le vase dont il s'agit avoit apparemment la figure, et d'où il tiroit son nom. A re nautica ductum nomen, ut pleraque alia pocula, dit le scholiaste la Cerda, qui étale beaucoup d'érudition sur ce point. Segrais, dans une remarque sur ces obsèques d'Anchise, dit que cet endroit de l'Enéide est un des plus beaux monumens qui nous restent des cérémonies funèbres des anciens. Ce monument, selon lui, nous fait voir « l'antiquité de beaucoup de choses que notre créance sanc<«tifie, et combien est naturelle l'opinion de sacrifier pour « les morts, et de célébrer la mémoire des grands person« nages. »

14 Il sort du fond du tombeau un serpent énorme. C'étoit une espèce de dragon. Plutarque dit, dans la vie de Cléomène, que les dragons étoient consacrés aux héros. Septem gyros, septena volumina, ne doit pas être entendu à la lettre, comme si le corps de ce dragon eût formé exactement sept replis. Le nom de sept ne signifie que plusieurs. Le P. Catrou a voulu être scrupuleusement littéral en cet endroit, « Une couleuvre, dit-il, sortit du fond de la tombe: développant les sept replis de son grand corps, elle embrassa tranquillement « le mausolée ». Le grand corps de cette couleuvre est admirable. Pour exprimer ensuite la comparaison des couleurs de sa peau avec celles de l'arc-en-ciel, il dit d'un ton noble: « Son dos étoit tacheté de petites marques bleues, entre« mêlées d'autres taches jaunes et brillantes comme de l'or.

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Cette bigarrure de couleurs représentoit assez bien l'arc« en-ciel, lorsqu'à l'opposite du soleil il en reçoit les rayons » Il traduit ensuite depasta altaria liquit : « La couleuvre ne quitta les autels que quand la flamme eut consumé toutes « les victimes ». Quel sens bizarre il donne au texte! « Le « miracle, continue-t-il dans le même goût, fit qu'Énée « redoubla les honneurs qu'il rendoit à son père ». Au reste, il paroît que c'est ici une espèce d'apothéose d'Ancliise, et non de simples honneurs funèbres. Cette apothéose, comme le remarque fort bien le même traducteur, figure celle de Jule-César, qu'Octave, alors triumvir, fit mettre dans les formes au rang des dieux, dans l'anniversaire qu'il fit célébrer en son honneur. On lui érigea alors un temple dans le lieu où son corps avoit été mis sur le bûcher. Cet anniversaire fut célébré par des jeux funèbres de différente espèce, selon la coutume des Romains. Voyez Nieuport.

15 Les chevaux du Soleil apportèrent un temps serein. Il ý a dans le texte, Phaetontis equi, c'est-à-dire les chevaux que Phaeton avoit autrefois conduits. Voyez le deuxièmé livre des Métamorphoses d'Ovide. Le P. Catrou dit, dans une note sur cet endroit, « qu'un beau jour fort serein et sans « nuages peut être nommé un jour de Phaéton » : jolie expression, digne d'orner mon Dictionnaire néologique.

16 Des trépieds sacrés. On se servoit fréquemment de trépieds dans les cérémonies de religion. C'est pour cela qu'on les appelle ici sacri tripodes. Ils étoient aussi employés à d'autres usages. En général, le tripus étoit chez les Greca un prix ordinaire pour les vainqueurs dans les jeux publics, Horace dit, liv. 1v, od. 8:

Donarem tripodas, præmia fortium
Graiorum.

1 Des sommes d'or et d'argent. Il y a dans le texte, argenti aurique talenta. Comme on ne sait point au juste la

valeur des talens qui sont ici proposés pour prix aux vainqueurs, j'ai rendu ces mots par une idée générale. Au sujet de la différence et de la valeur des talens, consultez Nieuport, traduit en françois, et imprimé à Paris chez Desaint. Il est bon de remarquer ici, avec l'abbé de Saint-Remy, qu'on ne peut rien déterminer de fixe sur la valeur du talent, parce qu'elle étoit différente chez différentes nations. Le talent attique, suivant Remmius Fannius, valoit soixante mines ou six mille drachmes; la drachme valoit environ huit sous de notre monnoie: ainsi le talent pouvoit valoir deux mille cinq cents liv. tournois. Le talent d'or haussoit à proportion de la différence de l'or à l'argent. Il y avoit aussi ly de petits talens. Lorsqu'Achille propose des prix pour les jeux funèbres en l'honneur de Patrocle (Iliade, liv. xx111), il promet deux talens d'or pour le quatrième prix, et une cavale avec son poulain pour le troisième. Il s'ensuit que le talent d'or n'étoit pas toujours de la valeur de deux mille cinq cents liv. tournois, et qu'il s'en falloit beaucoup. Ainsi il y avoit des talens de différente valeur, suivant la différence des poids dont les peuples d'Europe et d'Asie faisoient usage.

18 Gyas montoit l'énorme Chimère, à trois rangs de rameurs. Je vais donner ici en peu de mots, d'après Meibomius, une idée des galères des anciens. Elles étoient divisées en général en monocrotes et en polycrotes. Les galères monocrotes n'avoient qu'un ou deux rangs de rameurs assis sur des bancs à la même hauteur. Ces rameurs étoient de chaque côté, au nombre de quatre, de six, et même davantage. A l'égard des galères polycrotes, les rameurs étoient assis non seulement des deux côtés du navire, mais encore sur des bancs placés au milieu. Les galères qui n'avoient point de rameurs dans le milieu, s'appeloient dicrota chez les Grecs, et biremes chez les Latins. Lorsqu'il y avoit deux rangs de rameurs assis aux deux côtés de la galère avec un rang au milieu, elle s'appeloit triremis ; quadriremis, s'il y en avoit deux dans le milieu; quinqueremis, quand, outre

ces deux rangs du milieu, il y avoit trois rangs à chaque côté. Si chaque côté avoit trois rangs, avec trois bancs au milieu, la galère s'appeloit hexeris. Suivant le nombre des bancs, soit du milieu, soit des côtés, on donnoit à une galère le nom d'hepteris (à sept rangs), d'octeris, d'enneris, de deceris, d'endeceris, de dodeceris, de triscædeceris, de pantecadeceris, de heccadeceris, d'eicoseris, de triaconteris. La plus grande de toutes étoit la tessaraconteris, c'est-àdire, la galère à quarante rangs. Tous les vaisseaux armés en guerre alloient à la voile et à la rame. Mais dans les combats on abattoit le mát, on plioit les voiles, et on ne se servoit que des rames. Les vaisseaux se battoient alors comme les oiseaux avec leur bec; les rames leur tenoient lieu d'ailes, et ils tâchoient réciproquement de briser les ailes du vaisseau ennemi. C'étoit dans la rame que consistoit toute la force d'un navire; aussi tiroit-il sa dénomination du nombre des rames. Les vaisseaux de charge n'alloient qu'à la voile, sans rames, pour épargner les frais de transport. La largeur des vaisseaux de charge étoit ordinairement le quart de la longueur. C'est pour cela qu'on les appeloit spor♫úam vñes, TOtundæ naves. Les vaisseaux de guerre au contraire se nommoient μaxpaves, longæ naves. Ils étoient au moins huit fois plus longs que larges. Hiéron, roi de Sicile, fit construire des vaisseaux de transport d'une grandeur extraordinaire, dont le plus considérable pouvoit porter deux mille tonneaux, et chaque tonneau pesoit quatre mille livres.

Le même Meibomius donne une explication fort juste des paroles de Virgile en cet endroit:

Triplici pubes quam dardana versu

Impellunt, terno consurgunt ordine remi.

Il met une distinction entre versus et ordo. Le mot de versus, selon lui, signifie le rang des rameurs : ainsi triplex versus veut dire les trois rangs, les trois files. Versus est un terme de tactique, commun chez les anciens. Ordo signifie les trois différentes positions des rameurs, dont il y avoit un rang de

chaque côté, et un autre au milieu. Servius s'est donc trompé bien grossièrement, lorsqu'il a dérivé versus de verrere, en citant ce vers de Virgile au sujet des dauphins,

Equora verrebant caudis, æstumque secabant.

Il veut que versus et ordo signifieut la même chose. Mais Virgile n'étoit pas capable de faire ainsi up pléonasme. Au reste, suivant les positions des rameurs, les Grecs leur doupoient trois noms, thranite, thalamitæ et zygita. Ceux qui étoient devant s'appeloient thranitæ, ceux qui étoient derrière thalamitæ, ceux du milieu zygitæ, comme étant plus élevés que les autres (Luyòs, jugum).

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Quand la mer est enflée par les vents de nord-ouest, etc, Les Latins appeloient le vent de nord-ouest ou d'occident d'été, caurus. Quoique ces noms d'est, d'ouest, de nordQuest, sud-est, etc. ne soient pas d'usage sur la Méditerranée, je suis obligé de m'en servir ici pour la briéveté, et pour être entendu de tout le monde.

Les proues fendent les flots. Le texte porte, rostris tridentibus. Nous n'avons pas assez de connoissance de l'architecture navale des anciens pour nous faire une idée bien juste de ces proues à trois dents ou à trois pointes. Chacun peut les imaginer à sa fantaisie, et supposer qu'elles servoient pour les combats sur mer. L'abbé de Saint-Remy traduit ainsi : ས Les proues, armées d'un trident, fendent les flots trem« blans ». Il n'y a rien dans le texte qui fasse entendre que les flats trembloient. Il est encore plus éloigné du sens de Virgile dans ce qu'il ajoute : « On ne voit plus que des montagnes d'eau ou des abimes autour d'eux ». S'agit-il ici d'abîmes et de montagnes d'eau? Est-ce une tempête?

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Lorsqu'ils virent le vieillard nager, et vomir ensuite l'onde amère. Selon plusieurs naturalistes, l'eau n'entre point dans l'estomac de ceux qui se noient; c'est par les pores

de

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