l'Olympe a voulu, par un prodige si éclatant, vous mettre au dessus de tout rival. Anchise lui-même vous fait ce don par mes mains : c'est une coupe où l'art a ciselé des figures, et que Cissée, roi de Thrace, donna jadis à mon père, comme un monument et comme un gage de son amitié. » A ces mots, il ceint d'un laurier vert le front du vieillard, et le proclame le premier entre tous les vainqueurs. Le bon Eurytion ne se montre point jaloux de cette préférence, quoique seul il ait atteint l'oiseau dans le haut des airs. Le troisième prix est donné à celui qui a rompu le lien; et le dernier, à celui qui a fixé dans le mât sa flèche légère. CEPENDANT, avant la fin de ce dernier jeu, Énée, appelant le fils d'Epytus, gouverneur et guide fidèle du jeune Iule, avait donné cet ordre à son oreille : « Va, cours, et si Ascagne a réuni l'escadron des jeunes Troyens, s'il a tout disposé pour la marche et les évolutions, qu'il conduise ses compagnons au tombeau de son aïeul, et qu'il s'y montre lui-même sous les armes ! » Le héros ordonne que le peuple nombreux, répandu dans le cirque, se range et laisse libre l'arène. Alors paraissent, montés sur des chevaux dociles au frein, ces guerriers adolescens qui brillent aux yeux de leurs parens ravis. En les voyant s'avancer avec ordre, les Troyens et les Siciliens font entendre un murmure d'admiration. Tous, selon l'usage antique, ont le front ceint d'une couronne. Ils portent à la main deux javelots de cornouiller, armés d'un fer aigu; plusieurs ont sur l'épaule un léger car Pars leves humero pharetras; it pectore summo Flexilis obtorti per collum circulus auri. Tres equitum numero turmæ, ternique vagantur Agmine partito fulgent, paribusque magistris. EXCIPIUNT plausu pavidos, gaudentque tuentes Dardanidæ, veterumque agnoscunt ora parentum. Postquam omnem læti consessum oculosque suorum Lustravere in equis: signum clamore paratis Epytides longe dedit, insonuitque flagello. OLLI discurrere pares, atque agmina terni quois, et sur le sein de tous flotte une chaîne d'or. Partagés en trois divisions, ils obéissent à trois chefs qui ont leur jeune âge; chaque chef est à la tête de douze cavaliers; chaque division brille de l'ensemble de ses mouvemens et du maintien guerrier de celui qui la commande. La première marche avec orgueil sous le jeune Priam, qui rappelle le nom de son illustre aïeul : c'est de toi qu'il naquit, généreux Polite, et sa noble postérité sera l'honneur de l'Italie; il guide un cheval de Thrace, dont le poil noir est tacheté de blanc ses pieds de devant sont blancs, et le front, qu'il lève avec fierté, est orné d'une étoile blanche. Le second chef est Atys, en. qui les Attius Latins reconnaissent l'auteur de leur race, Atys, enfant du même âge qu'Iule, et qu'Iule enfant aime tendrement. Enfin le troisième chef, qui efface les autres par sa beauté, est Iule lui-même. Il s'avance sur un cheval sidonien, que la belle Didon lui avait donné comme un monument et comme un gage de son amour. Le reste de la troupe juvénile monte des chevaux siciliens qu'a fournis le vieil Aceste. ap LES descendans de Dardanus accueillent par des plaudissemens ces enfans timides, les contemplent avec joie, et reconnaissent sur leurs visages les traits des héros troyens. Joyeux de fixer tous les regards, l'escadron fait le tour du cirque et attend le signal. Tout à coup, de loin, le fils d'Epytus jette un cri, et son fouet bruyant résonne dans les airs. LES jeunes guerriers partent en nombre égal, rompent leurs lignes, et se forment en trois corps. Rappelés par leurs chefs, ils reviennent et s'avancent les uns contre les autres, la lance en arrêt. D'autres évolutions suc Inde alios ineunt cursus aliosque recursus Adversis spatiis, alternosque orbibus orbes Ut quondam Creta fertur labyrinthus in alta Hic primum fortuna fidem mutata novavit. Iliacam ad classem, ventosque adspirat eunti, cèdent; ils se replient, se rapprochent, s'engagent en cercle dans des cercles, et offrent, dans le jeu des arle simulacre des combats. Tantôt on les voit, fuyant, tourner le dos à l'ennemi; tantôt, s'arrêtant, revenir à la charge; et tantôt enfin, comme si la paix était faite, ils marchent réunis. Tel le fameux labyrinthe de Crète offrait au voyageur imprudent, surpris dans son obscure enceinte, mille chemins douteux, mille issues trompeuses, dont la trace incessamment perdue égarait sans retour: tels, dans ces jeux guerriers, les enfans des Troyens enlaçaient, embarrassaient leur course, mêlaient et confondaient la fuite et le combat, semblables aux dauphins qui, fendant les mers de Carpathe et de Libye, se livrent sur les ondes à de folâtres jeux. Dans la suite, Ascagne le premier renouvela ces courses et ces combats simulés, lorsqu'il entourait de remparts Albe-la-Longue. Il enseigna aux peuples anciens du Latium ces jeux que lui-même, dans son enfance, célébrait avec les enfans des Troyens : les Albains les transmirent à leurs descendans, et c'est d'eux que Rome, maîtresse du monde, les a reçus elle les conserve encore comme un souvenir glorieux de son origine on les appelle les jeux de Troie, et les enfans qui les célèbrent sont la légion troyenne. AINSI se terminèrent les jeux en l'honneur des mânes d'Anchise. que, En ce moment, la fortune change, et, dans son inconstance, cesse d'être fidèle aux Troyens. Tandis par ces jeux divers, ils honorent le tombeau d'Anchise, Junon, du haut de l'Olympe, envoie sa messagère vers la flotte d'Ilion, et ordonne aux vents de rendre son vol |