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Claudien fait une agréable description des Sirènes :

Delatis licet huc incumberet aura carinis,
Implessentque sinus venti de puppe ferentes,
Figebat vox una ratem ; nec tendere certum
Delectabat iter reditus, odiumque juvabat :
Nec dolor ullus erat; mortem dabat ipsa voluptas.

(Page 214. Sur la mer s'élèvent deux rochers voisins.)

Voyez la dernière remarque sur ce chant.

Le voyageur Sandy a examiné ces lieux. En parlant de Charybde, il a écrit que les vents formaient dans ce gouffre de violens tournans dangereux aux vaisseaux; que Scylla, au milieu d'une baie, était une roche escarpée, qu'Homère, par une hyperbole poétique, décrit comme étant inaccessible. On voit, dit ce voyageur, au pied de ce grand rocher, plusieurs rochers pointus; ils sont les chiens aboyans; l'eau, par la répercussion, forme un bruit semblable aux aboiemens.

On prétend que cette déesse CRATÉE est la même qu'Hécate, qui présidait aux enchantemens et aux sorą tiléges. Scylla était fille de Phorcys et d'Hécate.

Quant à la fiction des colombes, je ne ferai qu'indiquer une explication fort incertaine d'une femme de Byzance, appelée MOERO. Madame Dacier se félicite qu'une femme ait développé ce mystère; et elle est étonnée que Longin, par une critique qui, selon cette savante, n'est pas digne de lui, ait traité de niaiserie une fiction si grave et si noble. Cette explication roule sur la conformité qu'a en grec le mot de colombe avec

celui de pléiade, constellation que la hauteur de ce rocher faisait disparaître.

La fable ne fournit que de très-légers indices au sujet de cette fiction. Selon Apollonius, il était impossible même aux oiseaux de passer entre les roches Cyanées, à cause de leur collision continuelle, du nuage épais qui les environne, et du tumulte et de la tempête de ces flots. Jupiter, caché dans la Crète, avait été nourri par des colombes qui lui apportaient l'ambroisie.

Jason avait dit à Phinée que son vaisseau était aussi léger qu'une colombe. Celui-ci lui dit : Lâche une colombe entre ces rocs; si elle échappe, vous passerez sans péril. Jason fit cet essai; la colombe ne perdit que sa queue. Le héros tenta aussitôt le passage, et il ne perdit que ses rames. On pense que cette histoire a pú donner à Homère l'idée de ce qu'il dit ici des colombes qui se brisent sur le rocher de Scylla.

Un poëte doit, autant qu'il est possible, s'écarter de la langue du vulgaire. Junon, c'est l'air. Homère dit poétiquement que les Argonautes eurent un beau temps pour passer les roches Cyanées. Il y a bien plus de poésie dans la peinture qu'il fait des deux rochers comme habités par des monstres affreux. Le merveilleux doit régner dans la poésie épique.

Exúλaž peut signifier le petit d'une bête féroce. Pope, madame Dacier, et plusieurs commentateurs, ont ainsi interprété ce mot en cet endroit. Dans toutes les imitations qu'on a faites de ce passage, on s'est servi de l'image des chiens aboyans :

Cæruleis canibus resonantia saxa.

AENEID. LIB. III.

Virgile a dépeint ainsi Charybde d'après Homère :

Dextrum Scylla latus, lævum implacata Charybdis

Obsidet; atque imo barathri ter gurgite vastos
Sorbet in abruptum fluctus, rursusque sub auras
Erigit alternos, et sidera verberat undâ.

IBIDEM.

Ter scopuli clamorem inter cava saxa dedêre; .
Ter spumam elisam et rorantia vidimus astra.

IBIDEM.

On peut nommer Ovide parmi les poëtes qui ont employé ces images

Quid, quod nescio qui mediis concurrere in undis
Dicuntur montes, ratibusque inimica Charybdis
Nunc sorbere fretum, nunc reddere; cinctaque sævis
Scylla rapax canibus Siculo latrare profundo?

METAM. LIB. VII.

(P. 217. Le monstre que tu veux combattre n'est point de race terrestre et fragile.)

Quelques critiques ont dit que, dans ce morceau, qui est fort animé, Homère a voulu peindre les dangers de la volupté, à laquelle on ne pouvait se dérober que par la fuite. Je ne sais s'ils ont bien deviné. Au reste il est assez singulier que ces leçons, ainsi que celles qui viennent d'être données au sujet des Sirènes, sortent de la bouche de Circé. Serait-ce parce que personne quelquefois ne connaît mieux les dangers d'un vice què ceux qui s'y livrent, et que c'est l'amitié qui dicte à Circé ces bons avis? Ulysse parle avec respect de cette magicienne voluptueuse.

(P. 217. Où paissent les troupeaux immenses du Soleil.)

Homère entremêle les peintures douces aux peintures terribles. Il y avait des troupeaux entiers qui étaient consacrés aux dieux, et qui par-là étaient sacrés et inviolables. Hérodote nous apprend que le long du golfe d'Ionie il y avait des troupeaux qui étaient consacrés à Apollon. Ces troupeaux ayant toujours le même nombre, Homère a tiré de là l'idée de leur immortalité. C'est par la même raison qu'on appelle une fameuse légion des anciens, IMMORTELLE.

Le Soleil passait chez les anciens pour « le pasteur << de tous les troupeaux », et c'est ce qui donna lieu à quelques fables particulières. Le taureau chez les Egyptiens, représentait le Soleil. Voyez Macrobe.

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Puisque les troupeaux dont parle Homère étaient sacrés, il veut nous enseigner ici que dans nos besoins les plus urgens nous ne devons pas offenser les dieux.

Aristote, Lucien, et beaucoup d'autres anciens, ont rapporté à la physique la fable de ces troupeaux. Ils ont trouvé un rapport entre leur nombre et celui de 350 jours dont l'année était alors composée.

PHAÉTUSE signifie la lumière du soleil, et LAMPÉTIE celle de la lune; ce sont les deux bergères de ces troupeaux, parce qu'ils paissaient le jour et la nuit. Elles sont filles du Soleil et de la déesse Nééra, qui signifie << la jeunesse ».

(Page 218. La déesse Circé se retire.)

L'amour de cette déesse pour Ulysse, en l'empêchant

d'abord de poursuivre sa route, lui devient ensuite utilę par les avis qu'elle lui donne, et auxquels il doit son heureux retour dans sa patrie. C'est avec art que le poëte a lié cet épisode à son sujet.

(Page 220. Il retourna plus instruit dans sa patrie.)

Cicéron a traduit cet endroit, et il a fait remarquer l'adresse du poëte, qui, voyant que sa fiction ne serait point approuvée si un homme aussi grand qu'Ulysse pouvait être retenu par la seule douceur d'une chanson, lui fait promettre la science. Voici la traduction de cet

orateur :

O decus argolicum, quin puppim flectis, Ulysses,
Auribus ut nostros possis agnoscere cantus?

Nam nemo hæc unquam est transvectus cærula cursu
Quin priùs adstiterit vocum dulcedine captus;

Post, variis avido satiatus pectore musis,
Doctior ad patrias lapsus pervenerit oras.
Nos grave certamen belli, clademque tenemus
Græcia quam Trojæ divino numine vexit,
Omniaque latis rerum vestigia terris.

Ulysse ordonne à ses compagnons, par des signes, de le dégager; la cire dont il avait bouché leur oreille les aurait empêchés d'entendre sa voix.

Madame Dacier a traduit pyy par le son des instrumens. Ce terme ne peut avoir ce sens, et il n'est pas dit que les Sirènes eussent accompagné leur voix de quelque instrument.

II. Od.

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