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Homère peint Hélène, on verra qu'il lui accorde beancoup de vivacité et de pénétration d'esprit. Ménélas ne possédait pas ces qualités au même degré.

(Page 338. Tu m'as promis de contenter mes souhaits; veux-tu avoir égard à ma prière?)

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Il paraît que l'ordre de Minerve, le prodige et la manière dont Hélène l'a expliqué, raniment les espérances de Télémaque, et lui font håter son départ. Homère, après la séparation des deux amis, ne parle plus de Pisistrate ni de Nestor; il court à son but.

(Page 340. Cependant Mélampe connut le malheur.)

Le récit d'Homère est si concis, que j'ai cru devoir insérer ici quelques mots pour qu'il fût plus intelligible: au temps de ce poëte, tout le monde était instruit de cette histoire ; elle était importante, à cause des grandes maisons qu'elle regardait. Phylaque était fils de Déionée, roi de la Phocide et père d'Iphiclus. Il avait donné son nom à la ville de Phylacé. Iphiclus avait enlevé les troupeaux de Nélée. L'entreprise de Mélampe était terrible; c'est ce qu'Homère appellé un dessein inspiré par une Furie. Il obtint la liberté et ces troupeaux, en donnant, dit-on, à Iphiclus des remèdes qui lui procurèrent des enfans.

(Page 341. Mais il ne parvint point à la

vieillesse.)

Homère appelle Amphiaraüs intrepide; l'épithète dit, qui anime le peuple au combat : ce prince alla

avec Jáson à l'expédition des Argonautes. De toutes les faveurs qu'Amphiaraüs reçut de Jupiter et d'Apollon, la seule, dit-on, qu'Homère explique, c'est qu'il mourut jeune. Platon assure que les dieux retirent promptement de la vie ceux qu'ils aiment le plus. Il rapporte à ce sujet deux histoires très-connues, et il cite ensuite ce passage d'Homère comme un témoignage de la vérité de ce sentiment.

Malgré l'autorité de Platon, et la conclusion qu'il tire de ce passage, on peut en alléguer un grand nombre du poëte grec, qui prouvent qu'il regardait une longue vie comme une bénédiction du ciel, opinion qu'on voit régner aussi dans les écrivains de l'ancien testament, qui ont plusieurs conformités avec Homère. Il est clair qu'il faut sous-entendre ici le mot CEPENDANT, qui se trouve dans chaque endroit où ce poëte exprime la même idée. D'ailleurs la manière dont périt Amphiaraüs le confirme.

(Page 342. O toi, jeune mortel.)

Il fait toutes ces questions pour découvrir si ce jeune prince n'est point parent de celui qu'il a tué.

Parmi les Hébreux, les parens de celui qu'on avait tué de propos délibéré ou autrement avaient le droit de tuer le meurtrier, quelque part qu'ils le trouvassent, jusqu'à ce qu'il fût arrivé à une des villes qui avaient été données pour asile. Les Grecs avaient à peu près la même jurisprudence le meurtrier devait s'exiler luimême pendant un temps marqué, et se purger par quelque expiation.

Il n'est pas dit que Théoclymène eût commis ce

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meurtre par accident. Les meurtres, comme on le voit dans Homère, étaient alors très-fréquens. La liberté que chacun avait de venger ses injures, l'état encore sauvage de la société, rendaient cette action bien moins odieuse que de nos jours; on est étonné de voir avec quel sang-froid Homère en parle. Ce meurtrier n'imprime aucune horreur à Télémaque ni à ses compagnons; il est reçu avec honneur, placé à côté de ce prince, qui ne s'informe pas si ce meurtre était involontaire. Il y a dans ces mœurs un mélange singulier de barbarie et d'humanité; car l'hospitalité ne permettait pas qu'on repoussât aucun suppliant. Homère, pour courir à son but, ne ramène pas Télémaque chez Nestor, et même ne dit rien des adieux qu'il fit à Pisistrate. Cependant le poëte s'arrête pour nous peindre ce prince attentif au discours d'un suppliant, le recevant dans · son vaisseau, et se déterminant enfin à lui donner un asile dans sa maison, quoiqu'il ne manquât pas d'hôtes

fort incommodes.

Cet épisode est lié au sujet ; ce devin donne des avis à Télémaque, lui explique plusieurs prodiges, et lui promet une prompte délivrance de ses malheurs. D'ailleurs ce petit épisode conserve plusieurs faits; il est vrai qu'ils ne peuvent nous intéresser autant qu'au siècle d'Homère. On remarquera que Théoclymène fait quatre questions d'une haleine, dans l'espace d'une ligne ; la crainte où il est d'être poursuivi ne lui permet pas de s'étendre. Télémaque lui répond avec la même brièveté. Homère est appelé par son sujet, qui cependant ne l'a pas empêché de se livrer à des détails généalogiques, alors assez importans.

(Page 343. Les courans de Crunes, de

Chalcis.)

Télémaque courut d'abord tout droit vers le septentrion; et de là, au lieu d'aller au couchant, qui était le chemin le plus court, il prit du côté du levant, pour éviter l'embuscade qu'on lui avait dressée entre Ithaque et Céphalénie : ainsi il aborda à Ithaque par le côté du septentrion, au lieu de celui du midi. En partant, avait pris un chemin moins long; aussi voit-on qu'il mit plus de temps au retour. Ceci serait peu important, si ces petits détails ne montraient l'exactitude d'Homère.

CRUNES, lieu de la côte du Péloponèse. CHALcis, fleuve voisin, et un bourg sur ce fleuve. Voyez Strabon. Je lis avec madame Dacier PHÉES, au lieu de PHÈRES, qui est trop loin de là. J'ai inséré ici un vers cité deux fois par Strabon, et qui ne se trouve pas dans les éditions d'Homère. Voyez Ernesti.

(Page 345. Par une faveur de Mercure.)

Comme Mercure est le ministre des dieux, on a feint qu'il était le patron de tous ceux qui étaient au service des autres, et que c'était par sa faveur que chacun réussissait dans les fonctions de son état.

Il n'y a rien de trop bas dans ce que dit ici Ulysse, puisqu'il soutient son caractère de mendiant. Athénée fait une autre observation; il prend ces paroles à la lettre, et dit que dans ces anciens temps les héros se servaient eux-mêmes, et qu'Homère loue Ulysse de posséder le talent de remplir ces sortes de fonctions qui nous

paraissent subalternes. Il est certain que les héros qui préparaient eux-mêmes leurs repas, pouvaient regarder comme dignes de quelque éloge ceux d'entre eux qui s'acquittaient bien de ces soins.

Après quelques épisodes assez courts, on revient avec plaisir dans la cabane d'Eumée, où l'on retrouve Ulysse.

(Page 345. Dont les injustices et les violences sont montées jusques à la voûte éternelle des cieux.)

Madame Dacier a traduit : « Dont la violence et l'in

« solence sont si grandes, qu'elles ne respectent pas les a dieux, et qu'elles attaquent le ciel même ». Ce n'est pas le sens : l'expression d'Homère, telle que je l'ai rendue, est très-claire; on trouve la même expression dans l'Ecriture.

Le dessein d'Ulysse achève de se dévoiler; on voit qu'il veut paraître au milieu des prétendans. La peinture qu'Eumée lui fait ici de leurs violences, et l'étonnement qu'il témoigne de ce dessein, rendent le lecteur plus attentif aux moyens qu'emploiera Ulysse pour l'exécuter. Ainsi Homère, en suspendant un peu la marche de son action, ne néglige pas de soutenir l'intérêt. Plusieurs autres passages de ce chant et des deux précédens le témoignent. Remarquons, en général, avec quel art Homère présente en action et sous une forme dramatique certains détails qu'il aurait pu, comme beaucoup d'autres poëtes, mettre en récit; ce qui eût été moins intéressant.

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