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(P. 347. Termina la malheureuse vie de cette mère par une mort plus malheureuse.)

Il faut louer la discrétion d'Eumée : il n'explique pas le genre de mort, parce qu'il était honteux et infâme; car elle s'était pendue de désespoir.

On remarquera ici l'adresse avec laquelle Ulysse a tant tardé à parler de son père et de sa mère pour ne pas se découvrir, et l'effort qu'elle a dû lui coûter. Il n'a pas eu besoin d'interroger Eumée au sujet de Pénélope et de Télémaque; Eumée était si occupé de leur sort, qu'Ulysse, pour l'apprendre, n'avait qu'à le laisser parler.

(Page 348. Aujourd'hui, hélas! je me vois privé de tout ce qui répandait quelque charme sur ma vie.)

Νυν δ' ήδη τέτων ἐπιδένομαι. Madame Dacier traduit: « Je sens bien la perte que j'ai faite ». Et en note elle dit : « En perdant de si bons maîtres, il a perdu tous <«<les secours qu'ils lui fournissaient ». Les paroles du texte me paraissent renfermer un sentiment plus délicat, que développe la suite des paroles d'Eumée. Il ne jouit plus de rien, depuis qu'il a si peu d'occasions de recevoir des témoignages d'amitié de la part de ses maîtres.

(Ibid. Il est bien rare..... qu'une parole de

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la reine Pénélope, ma maîtresse, ni un témoignage de son affection, soient venus....) Puisque je m'éloigne de leur interprétation, je suis

obligé d'entrer ici dans quelque détail sur la manière dont plusieurs traducteurs ont entendu ce passage. Madame Dacier dit qu'il ne faut pas joindre méxé avec les mots et pya. Eustathe montre évidemment le contraire, et j'ai suivi son explication. Voyez Ernesti. Madame Dacier s'est entièrement écartée du sens, en traduisant : « Pour ce qui est de ma maî« tresse Pénélope, je ne prends plus plaisir à en parler « ni à en entendre parler». Oure ripyor ne peut signifier ici des PAROLES. Mais ce qui est surprenant, c'est qu'elle a mutilé et changé tout ce passage. On ne voit, dans la traduction qu'elle en donne, aucune trace de la naïveté charmante du discours d'Eumée, ni de l'affection qu'il y témoigne pour ses maîtres.

Il est singulier que Pope n'ait pas moins défiguré tout ce morceau. Il est manifeste que xoi Qayéμır, etc. se lie à ce qui précède : Eumée ne dirait pas qu'il manque de nourriture; il vient de dire précisément le contraire. Il se plaint que cette douce familiarité, qui assemble les maîtres et les serviteurs, est bannie de la maison d'Ulysse par les excès et les injustices qui là désolent.

(Page 349. L'excès du sommeil fatigue.)

Le bon Eumée a une si grande envie de parler, qu'il accumule les raisons pour prolonger l'entretien. Sans examiner si son hôte, qui a beaucoup souffert, n'aurait pas besoin de dormir, il débite ici un aphorisme de médecine : le trop long sommeil fait le même effet que les trop longues veilles; il épuise et dissipe les esprits.

On partage le plaisir que goûtent, dans le calme de la nuit, Eumée à raconter ses aventures, et Ulysse à les entendre. Ce n'est pas qu'elles ne lui fussent connues; on peut le soupçonner: mais sa longue absence devait au moins en avoir affaibli le souvenir; et son attachement pour Eumée ajoutait de l'intérêt à ce récit

(Page 350. La douleur même a ses délices.)

La cause de ce plaisir, remarque Eustathe, est l'idée qu'a celui qui raconte ce qu'il a souffert, qu'il sera loué de sa patience, de sa prudence, et qu'on le regardera comme un homme favorisé du ciel. Ce n'est pas la seule ni la principale cause de ce plaisir. On sait que la peine a cet avantage sur le plaisir, c'est que le ressouvenir en est doux, au lieu que celui du plaisir nous fait sentir une privation.

(Ibid. Ile où l'on a marqué les révolutions

du soleil.)

L'île d'Ortygie, c'est Délos; et celle de Syre est un peu au-dessus. Selon les uns, ces mots poñal exloro veulent dire que l'île de Syre est au couchant de Délos : et, si l'on adopte cette explication, Eumée parle en habitant de Syre; car cela est faux, si l'on se place à Ithaque. D'autres expliquent ce passage en disant que dans l'île de Syre il y avait un antre qui marquait les solstices, et qu'on appelait l'antre du Soleil. D'autres encore pensent que les Phéniciens avaient fait un long séjour dans cette île; que son nom même dérive de SIRA, qui, dans leur langue, signifie « riche », ou de II. Od.

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sura, « heureux »; qu'étant saväns en astronomie, ils avaient fait dans cette île un cadran, torpórter. Environ quatre-vingts ans après Homère, l'Ecriture fait mention d'un cadran qui était à Jérusalem, et qui marquait les heures. Phérécyde en fit un à Syre deux cents ans après celui-ci. Perrault a prétendu qu'Homère avait mis Syre et la mer Méditerranée sous le tropique. Le nom de cette île marque la bonté de son terroir. L'industrie des Phéniciens est connue.

J'ai rapporté brièvement les diverses explications qu'on a données de ce passage. Wood, qui a visité ces lieux, n'adopte aucune de ces explications, et y substitue une conjecture ingénieuse :

« Eumée, dit-il, commence son histoire par une « description de l'ile de Syre, sa patrie, et il la place << au-delà ou au-dessus d'Ortygie. Puisque cet entretien « se passait à Ithaque, la position de Syre est très-mal « déterminée, car cette île est réellement plus proche « d'ithaque qu'Ortygie...

Comme la description serait parfaitement vraie si & elle avait été faite en lonie, n'est-il pas raisonnable & de supposer que la situation de Syre ayant frappé « fortement le poëte pendant qu'il était dans cette partie « du monde, il a oublié d'adapter ses idées au lieu où « il transportait la scène ?

« Si cette conjecture semble plausible, on peut jeter « quelque jour sur le passage obscur di pazai nežzola, « On a cité ces mots pour prouver l'ignorance grossière « d'Homère en geographie; car, dit-on, le poëte parle «ici de la latitude de Syre, et il place cette île sous le « tropique...

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L'aspect de la mer, contemplée de la côte asiatique << de l'Archipel et des îles voisines, ravit le spectateur, «et pendant tout le voyage nous n'avons pas trouvé « d'aussi beaux points de vue : l'oeil se porte à l'occi<< dent, et il rencontre partout le plus bel horizon ima<< ginable: au coucher du soleil, l'atmosphère et très« claire, et une lumière si brillante se répand sur les objets, que, du sommet de l'Ida, je découvrais dis« tinctement la forme de l'Athos de l'autre côté de la « mer Egée, lorsque l'astre se reposait le soir derrière << cette montagne. Ce superbe spectacle fixa sans doute << l'attention du poëte, et, comme peintre, il tournait << continuellement son visage de ce côté. Dans l'enfance << de l'astronomie, et même avant qu'on connût cette << science, la perspective distincte de cet horizon entrecoupé suggéra naturellement l'idée d'une écliptique << aux habitans des îles et de la côte d'Asie; car ils << apercevaient le progrès journalier du soleil au nord « et au midi. Les loniens, qui, au solstice d'hiver, re<< gardent les hauteurs de Chio au sud-ouest, voient le << soleil se coucher derrière Ténos et du côté de Syre, «< île la plus voisine dans la même direction au sud<< ouest; et après avoir observé que l'astre revient sur «ses pas quand il s'est avancé si loin, ils peuvent fixer « la borne de son tour (poα) à ce point. Cette expli«cation n'est-elle pas plus simple que les autres qu'on « a rapportées »?

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On a remarqué la justice poétique qu'Homère observe en faisant mourir subitement cette gouvernante d'Eumée qui le trahit. Il est singulier qu'Eustathe ait cru qu'elle était la mère d'Eumée.

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