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« Les planètes sont situées à des distances du soleil qui vont sensiblement en doublant. Si l'on prend en effet les nombres suivants, formant une progression géométrique,

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« Ces derniers nombres représentent à peu près les rapports entre les distances des planètes au soleil : ils constituent ce que l'on nomme loi de Bode. »

Cette loi, dont la découverte appartient à un autre astronome, bien qu'elle porte le nom de Bode, n'est pas tout à fait exacte pour la planète de Le Verrier. C'est ce que constata l'illustre académicien, en cherchant la distance de la planète troublante d'U

ranus.

Page 12 « Le soleil est-il fixe au milieu de l'univers; n'est-il pas transporté lui-même autour d'un autre centre planétaire? Les observations faites jusqu'ici sur le mouvement de translation des étoiles ne permettent pas de résoudre complétement ces questions, mais semblent montrer que tout le système solaire marche vers la constellation d'Hercule. »

Les astronomes admettent aujourd'hui, comme un fait incontestable, le mouvement propre de translation du soleil. Ce mouve ment, vu de la distance moyenne des étoiles de première grandeur, est, suivant M. Otto Struve, de o",339 par an. Quel est maintenant le centre autour duquel tourne le soleil entouré de tout son cortége de planètes? M. Mädler, de Dorpat, le place dans l'étoile Alcyone des Pléiades.

Page 182. « La présence des phosphates, quoiqu'en très-petite proportion, dans le sol, doit être considérée néanmoins comme un principe essentiel. On a observé effectivement, en Angleterre, que des champs qui ne renfermaient plus sensiblement de phosphates, doublaient de fertilité en y semant des débris d'ossements. »

Il aurait été bon de signaler ici le rôle que joue l'acide carbonique. Il a été, en effet, démontré que l'eau saturée d'acide carbonique possède la propriété de dissoudre les phosphates, et de les rendre propres à pénétrer dans les végétaux. Quant à l'origine des phosphates, M. Bischoff admet, contrairement à l'opinion de M. Boussingault (que MM. Becquerel paraissent adopter), qu'ils

proviennent en grande partie de détritus de roches cristallines, et particulièrement de l'apatite.

Page 190. « L'oxygène, principe essentiel à la végétation, est absorbé, et introduit dans les plantes par l'intermédiaire de l'eau et des racines. Quand un sous-sol est ramené à la surface de la terre par un labour profond, il doit être privé momentanément de fertilité, comme l'expérience le prouve. Les argiles et les terres argileuses jouissent de la propriété d'absorber ce gaz; M. Boussingault l'attribue à l'oxyde de fer qui s'y trouve au minimum d'oxydation.

« M. Schübler a trouvé que cette absorption est très-faible pour le sable et le gypse, très-prononcée pour l'argile et l'humus, comme M. de Humboldt l'avait observé. Une portion de l'oxygène absorbé par l'humus se change en gaz acide carbonique. »

Les chimistes, qui aiment à s'occuper de tant de minutieux détails, dont l'utilité est souvent fort contestable, sont loin d'avoir suffisamment apprécié l'importance de l'action permanente que le sol exerce sur l'air, et la différence de cette action, suivant la nature et la profondeur des terrains. Les substances minérales les plus réfractaires sont en partie désoxydées par le contact immédiat et prolongé des matières organiques; c'est ainsi que le sulfate de chaux plongé dans de l'humus se change en sulfure de calcium, et que le peroxyde de fer passe peu à peu à l'état de protoxyde. Mais, dès que ces matières sont portées, par une cause quelconque, à la surface du sol, elles reprennent à l'air l'oxygène qu'elles avaient perdu. Les entrailles de la terre sont donc une espèce d'appareil de réduction, tandis que la surface peut être comparée à un appareil de combustion. Voilà dans quels termes il faudrait poser le problème.

Page 72. « Les tremblements de terre peuvent être rapportés à trois causes : 1° au refroidissement inégal de la croûte et de l'intérieur de la terre; 2o à l'action de l'eau et de l'air sur la masse en incandescence de la partie non oxydée de la terre; 3o à l'action des gaz qui tendent à se frayer une issue. »

La météorologie soulève, comme on voit, des questions aussi vastes qu'intéressantes. Les matériaux de cette science s'accumulent chaque jour; il s'agit maintenant de les coordonner. Pourquoi faut-il que presque tous les savants soient dépourvus aujourd'hui de ce talent qui consiste à disposer les faits méthodiquement, à les grouper avec art, et à donner à tous les sujets, même aux plus abstraits, une forme brillante?

Quoi qu'il en soit de nos observations, bien minutieuses sans

doute et peut-être erronées, le livre de MM. Becquerel n'en est pas moins un travail sérieux, qui fait honneur à la France. D'ailleurs, l'attention soutenue avec laquelle nous l'avons lu, et la longueur de notre analyse, attestent assez que nous lui reconnaissons une haute importance.

SCIENCES MORALES ET POLITIQUES.

DES COMPENSATIONS DANS LES DESTINÉES HUMAINES, par H. AzAïs. Cinquième édition, revue avec soin sur un exemplaire annoté par l'auteur; précédée d'une notice sur sa vie et ses ouvrages, et ornée de son portrait. I vol. in-18 format anglais de 528 pages. - Paris, chez Firmin Didot frères.

Lorsqu'un livre a été composé d'une manière tout exceptionnelle par un homme placé lui-même dans une situation extraordinaire, étranger aux habitudes, aux tendances intellectuelles de son époque, aux mobiles qui d'ordinaire guident les écrivains ; lorsque cet homme a vécu longtemps avec son sujet, qu'il s'est, pour ainsi dire, identifié avec lui, qu'il lui a consacré non-seulement sa raison, mais encore ses sentiments les plus intimes, son âme tout entière, ce livre est en quelque sorte une partie de lui-même. L'homme et son œuvre se tiennent par des liens tels, que celui qui voudra les juger ne pourra les prendre séparément, et sera toujours forcé de les réunir et de les confondre.

"

En annonçant la mort d'Azaïs, un journal exprimait l'espoir que l'histoire de sa vie et de ses nombreux ouvrages deviendrait « l'objet d'un travail qui compléterait celle des idées et des hautes spéculations de notre temps. » C'est, en effet, une étude grave et intéressante que celle de la naissance des idées remarquables, de leur marche, de leur développement, de l'influence

qu'elles ont exercée ou subie au milieu des événements contemporains et des circonstances qui ont marqué la vie de celui qui les a conçues. Mais il ne faut pas s'y tromper, c'est une tâche toujours difficile que de faire, pour ainsi dire, l'analyse des sentiments d'un homme que n'ont pas encore jugé ceux-là même qui ont vécu de son temps; de mettre une juste proportion dans toutes les parties d'une pareille analyse. Et cette tâche devient plus difficile encore lorsqu'il s'agit d'Azaïs, que beaucoup d'entre nous ont vu, que plusieurs ont aimé, mais que bien peu devaient comprendre.

Cette tâche, pourtant, a été remplie avec succès dans un écrit intitulé: Azaïs, sa vie et ses ouvrages, placé en tête du livre des Compensations. L'auteur, M. Guadet, qui tenait, sinon par les liens du sang, du moins, comme il nous l'apprend lui-même, par l'alliance la plus étroite à celui dont il écrivait la vie; qui, pendant quatorze ans, recueillit ses souvenirs, ses confidences, ses projets d'avenir, a raconté avec charme et simplicité toutes les phases de cette vie extraordinaire, et analysé avec bonheur toutes les conceptions de cet esprit exceptionnel.

Dans le récit dont nous parlons, on suit avec le plus vif intérêt l'auteur des Compensations dans les nombreuses et brusques péripéties de son existence; on le voit enfant, ardent et rêveur, chez les bénédictins de Sorèze, qui, comprenant admirablement sa nature, se plaisent à éclairer et diriger avec bonté cette âme déjà si passionnée; on le voit aussi, dès sa jeunesse, cherchant avec ardeur l'emploi de son intelligence, se décourageant bientôt, et se disposant à demander le calme qui lui manque à une cellule de chartreux. Puis, c'est un évêque qui console le jeune homme, et lui prodigue, dans son palais, repos, indulgence, affection. Vous retrouvez Azaïs effrayé de l'avenir que lui offrent tour à tour l'état ecclésiastique et le barreau, courant au fond des Cévennes se faire organiste d'une pauvre abbaye, heureux de confier son sort à une âpre solitude. La révolution éclate alors; elle donne à cette âme inquiète, dont l'essor a été comprimé jusque là, la liberté; il accepte avec enthousiasme les idées nouvelles; mais bientôt il s'arrête, il recule, et déteste ce qu'il a adoré. C'est alors qu'en présence des bouleversements révolutionnaires, des malheurs qui atteignent les autres et lui-même, se voyant sans ressources, sans avenir, condamné même à la déportation et caché dans un hôpital, Azaïs jette les bases d'une philosophie consolante, qu'il écrit ces

pages empreintes d'une douce raison, qui deviendront plus tard les Compensations. Il ne les écrit pas pour les publier un jour; il écrit « pour son bonheur, pour donner à son paisible loisir l'em« ploi le plus convenable aux sentiments qu'il éprouve. »>

D'où venaient donc ces sentiments si calmes et si doux? Pourquoi, dans l'asile du malheur, cette idée de la justice divine, de l'égalité du sort de tous les hommes, des Compensations enfin, apparaît-elle au proscrit avec tant de puissance et de précision ? C'est qu'Azaïs avait trouvé le secret de ses agitations passées, le but de son avenir. Déjà l'idée de la justice divine, des compensations, lui faisait pressentir, dans les choses physiques et morales, l'ordre admirable qui règne dans l'univers. Un horizon sans bornes s'ouvrait à sa pensée; il s'y élança tantôt avec l'ardeur d'une piété enthousiaste, tantôt avec des espérances confuses de gloire et de bonheur. Et en même temps son âme, restée toujours simple et naïve, se trouvait en harmonie avec tout ce qui l'entourait, avec ce silencieux réduit, avec tous les détails de cette vie calme, solitaire, et surtout avec l'amitié et les soins des bonnes sœurs de la charité qui l'avaient recueilli, auxquelles il lisait avec bonheur ses premiers essais.

C'est donc là, dans cet hôpital, humble abri contre la tempête, que nous voyons se fixer pour toujours la destinée d'Azaïs. Quelle est donc cette destinée? Pourquoi cet homme, avec tant de hardiesse dans la pensée, et tant de chaleur dans l'âme, avec tout ce qu'il faut dans la tête et dans le cœur pour frapper et persuader les hommes, est-il resté seul, isolé, sur la route qu'il a tracée et suivie avec tant de constance? C'est qu'Azaïs n'était pas de notre temps. Il était remonté, sans le savoir, à cette école antique où, comme l'a si bien dit un de nos grands penseurs, la raison humaine se prenant elle-même pour point de départ et pour règle, allait droit au but qu'elle seule avait marqué.

En rapprochant les idées d'Azaïs des idées philosophiques de notre temps, on peut maintenant, sans décider si de sa part il y a eu tort ou mérite, se rendre compte de l'isolement dans lequel il a vécu. Sa devise était : Tout expliquer, c'est tout unir. Il chercha donc à subordonner tous les phénomènes qui se manifestent dans la vie de l'humanité à une règle générale. C'est dans la manière dont il formula cette règle que réside toute l'originalité de son système. Prenons un exemple.

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