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Son modeste silence, et sa douce tristesse.
Diorès le seconde; il parle, il crie, il presse
Les juges du combat: arrivé le dernier,

Il perd, si Salius est nommé le premier,
Et la troisième palme et la troisième place.
Le prince lui sourit, et, d'un ton plein de grace,
« Vos prix sont assurés; mais souffrez que mon cœur
D'un ami malheureux console la douleur. >>

Il dit ; et Salius reçoit pour récompense

La peau d'un fier lion, dont la dépouille immense
Forme un riche trophée, et s'embellit encor

Et de ses crins touffus, et de ses ongles d'or.
« Ah! si les vaincus même ont un si beau partage,
Si de vous le malheur obtient un tel hommage,
Que réservez-vous donc, s'écrie alors Nisus,
A moi qu'un même sort égale à Salius,

Et qui, s'il ne l'obtient, mérite la couronne? >>
Ainsi Nisus aux cris, aux plaintes s'abandonne,
Et montre en même temps ses vêtements mouillés,
Et de fange et de sang ses bras encor souillés.
Le prince avec bonté l'accueille, le caresse,
Choisit un bouclier, dépouille de la Grèce,
Au souverain des mers autrefois consacré,
Et que Didymaon lui-même a décoré;
Met aux mains de Nisus cet admirable ouvrage,
Et de sa chute ainsi console au moins l'outrage.
Quand le prince troyen à ces jeunes rivaux
Eut fermé la carrière et payé leurs travaux :

"

« Maintenant que celui qui brûle pour la gloire, Vienne, le ceste en main, disputer la victoire. »

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Sic ait, et geminum pugnæ proponit honorem;
Victori velatum auro vittisque juvencum;
Ensem, atque insignem galeam, solatia victo.
Nec mora; continuo vastis cum viribus effert
Ora Dares, magnoque virum se murmure tollit;
Solus qui Paridem solitus contendere contra,
Idemque ad tumulum, quo maxumus occubat Hector,
Victorem Buten immani corpore, qui se

Bebrycia veniens Amyci de gente ferebat,

Perculit, et fulva moribundum extendit arena.

Talis prima Dares caput altum in prælia tollit,
Ostenditque humeros latos, alternaque jactat
Brachia protendens, et verberat ictibus auras.
Quæritur huic alius; nec quisquam ex agmine tanto
Audet adire virum, manibusque inducere cæstus.
Ergo alacris, cunctosque putans excedere palma,
Æneæ stetit ante pedes, nec plura moratus,
Tum læva taurum cornu tenet, atque ita fatur:
<< Nate dea, si nemo audet se credere pugnæ,
Quæ finis standi? quo
me decet usque teneri?
Ducere dona jube. » Cuncti simul ore fremebant
Dardanidæ, reddique viro promissa jubebant.

Il dit: et, pour flatter les vœux des concurrents,
Leur propose deux prix, deux honneurs différents :
Au vainqueur un taureau dont la corne dorée
De longs festons de laine et de fleurs est parée;
D'une éclatante épée et d'un casque brillant
Le vaincu recevra le tribut consolant.
Aussitôt, au milieu d'un doux et long murmure,
Darès paroît, tout fier de sa haute stature;
Darès, qui de Pâris seul balança le nom;
Darès, de qui le bras, sous les murs d'Ilion,
Près du tombeau d'Hector, par un combat célébre
Honorant ce héros et sa pompe funebre,
De l'énorme Butès, ce Bébryce orgueilleux,
Qui comptoit Amycus au rang de ses aïeux,
Terrassa la fureur, et de sa main puissante
Coucha son front altier sur la poudre sanglante.
Il se lève, il prélude: étendus en avant,

Ses deux bras tour-à-tour battent l'air et le vent.
Il montre leur vigueur, montre sa taille immense,
Et du prix qu'il attend s'enorgueillit d'avance.
On cherche un adversaire à ce jeune orgueilleux;
Mais nul n'ose tenter ce combat périlleux.
Alors fier, et déja d'une main assurée
Saisissant le taureau par sa corne dorée,

<«< Fils d'Anchise, dit-il, si, glacé par l'effroi,

Nul n'ose à ce combat s'exposer contre moi,

Pourquoi ces vains délais et cette attente vaine?

Ce taureau m'appartient, ordonnez qu'on l'emmène. »

• Ainsi parle Darès d'un air triomphateur:

Les Troyens font entendre un murmure flatteur,

T. IV. ÉNÉIDE. II.

10

Hic gravis Entellum dictis castigat Acestes,
Proxumus ut viridante toro consederat herba:
« Entelle, heroum quondam fortissime frustra,
Tantane tam patiens nullo certamine tolli
Donasines? ubi nunc nobis deus ille, magister
Nequidquam memoratus, Eryx? Ubi fama per omnem
Trinacriam, et spolia illa tuis pendentia tectis?»

Ille sub hæc: «Non laudis amor, nec gloria cessit Pulsa metu; sed enim gelidus tardante senecta Sanguis hebet, frigentque effetæ in corpore vires. Si mihi, quæ quondam fuerat, quaque inprobus iste Exsultat fidens, si nunc foret illa juventas; Haud equidem pretio inductus pulchroque juvenco Venissem, nec dona moror. » Sic deinde locutus In medium geminos immani pondere cæstus Projecit, quibus acer Eryx in prælia suetus Ferre manum, duroque intendere brachia tergo. Obstupuere animi: tantorum ingentia septem Terga boum plumbo insuto ferroque rigebant. Ante omnis stupet ipse Dares, longeque recusat; Magnanimusque Anchisiades et pondus et ipsa

Et réclament pour lui les honneurs qu'il demande.
Alors le vieil Aceste avec douceur gourmande
Entelle son ami, son digne compagnon,

Assis à ses côtés sur un lit de

gazon:

« Entelle, lui dit-il, de ton antique gloire
N'as-tu donc conservé qu'une oisive mémoire?
Et d'un cœur patient verras-tu sous tes yeux
Enlever, sans combat, un prix si glorieux?
Où donc est cet Éryx, autrefois notre maître,
Ce dieu, que la Sicile en toi crut voir renaître?
Où sont tes fiers combats, ces dépouilles, ces prix,
En pompe suspendus à tes nobles lambris?

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« La peur, dit le vieillard, gardez-vous de le croire, N'affoiblit point en moi l'ardeur de la victoire : Mais l'âge éteint ma force, et de ce foible corps La glace des vieux ans engourdit les ressorts.

Si j'étois jeune encor, si j'étois à cet âge

Qui de cet insolent enhardit le courage,

Sans prétendre à ce prix dont son cœur est flatté,
J'aurois d'un tel rival rabattu la fierté. ">

Il dit, et de ses mains fait tomber sur le sable
De cestes menaçants un couple épouvantable,
Arme affreuse qu'Éryx, en marchant aux combats,
Autrefois enlaçoit à ses robustes bras.

L'assemblée en silence en contemple la forme;
Chacun tremble à l'aspect de cette masse énorme,
Où, du fer et du plomb couvrant le vaste poids,
La peau d'un bœuf entier se redouble sept fois.
Darès même a senti chanceler son audace.

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