ページの画像
PDF
ePub

Le peuple et le sénat marchent pour sa querelle.
Déjà brille sur lui l'étoile paternelle, etc.

Racine le fils a imité avec succès Virgile, dans le tableau des triomphes d'Auguste, et de la paix qui en fut la suite :

Dans ses hardis vaisseaux une reine ose encor
Rassembler follement les peuples de l'Aurore.
Elle fuit, l'insensée; avec elle tout fuit,
Et son indigne amant honteusement la suit.
Jusqu'à Rome bientôt par Auguste traînées,
Toutes les nations à son char enchaînées,
L'Arabe, le Gélon, le brûlant Africain,
Et l'habitant glacé du nord le plus lointain,
Vont orner du vainqueur la marche triomphante,
Le Parthe s'en alarme, et d'une main tremblante,
Rapporte les, drapeaux à Crassus arrachés.
Dans leurs Alpes en vain les Rhètes sont cachés,
La foudre les atteint; tout subit l'esclavage :
L'Araxe, gémissant sous un pont qui l'outrage,
De son antique orgueil reçoit le châtiment,
Et l'Euphrate soumis coule plus mollement.

Ces derniers vers ne sont pas inférieurs à l'original ; et M. Delille lui-même, désespérant sans doute de mieux faire, a cru devoir les adopter dans sa traduction.

(Note de l'Éditeur.)

LIVRE NEUVIÈME.

ARGUMENT.

Pendant qu'Enée est absent, Junon envoie Iris à Turnus, pour l'engager à attaquer la nouvelle Troye, dans laquelle les Troyens se trouvent renfermés. Comme Énée avoit défendu à ses troupes de sortir de leurs retranchemens, Turnus se prépare à brûler leurs vaisseaux, qui étoient à l'ancre tout auprès; mais Cybèle les sauve de l'incendie, parce qu'ils étoient construits d'un bois sacré, coupé sur le mont Ida; la déesse les change tous en nymphes marines.

A l'approche de la nuit, Turnus place des sentinelles autour des retranchemens. Les Troyens ne peuvent en sortir ni faire savoir à Énée l'embarras de leur situation. Nisus et Euryale, deux jeunes amis inséparables, vont trouver Ascagne, se chargent de traverser le camp ennemi pendant la nuit, et d'aller trouver le chef des Troyens, pour le presser de revenir. Ascagne les loue, leur promet de grandes récompenses, et les laisse partir. Ils pénètrent dans le camp des ennemis, en égorgent plusieurs plongés dans le sommeil, et se chargent d'un butin considérable; mais vers la fin de la nuit ils sont rencontrés par trois cents cavaliers ennemis, que Volscens conduisoit à Turnus de la part d'Amate. Volscens les entrevoit dans l'ombre, et leur demande qui ils sont. Sans répondre, l'un et l'autre se jettent dans un bois voisin. Nisus en sort heureusement; mais Euryale étant resté derrière lui, il revient sur ses pas pour le chercher. Il le

voit entre les mains de Volscens. Tremblant pour son amı, il se cache derrière quelques arbres, lance des traits contre les Rutules, et tue deux officiers. Volscens, furieux de ne point découvrir l'auteur de ce carnage, se prépare à tuer Euryale pour se venger. Nisus, éperdu à cette vue, accourt et déclare que c'est lui qui a lancé les flèches; mais le coup étoit déjà porté, et Euryale nageoit dans son sang. Nisus alors ne ménage plus rien, se précipite sur Volscens, l'immole à sa vengeance, et tombe lui-même percé de coups dans les bras de son ami. Les têtes de Nisus et d'Euryale sont attachées à des piques dans le camp des Rutules, et au lever du soleil cette vue jette l'effroi et la consternation parmi les Troyens. La mère d'Euryale sur-tout attendrit tous les cœurs par ses gémissemens et ses regrets. Turnus recommence l'attaque. Ascagne lance du haut des tours une flèche contre Numanus, qui l'insultoit par des discours insolens et moqueurs. Pandare et Bitias, deux frères Troyens, d'une taille énorme, qui avoient la garde d'une des portes du camp pendant l'absence d'Énée, et auxquels ce prince avoit défendu de l'ouvrir, oublient ses défenses, et font une sortie contre les ennemis. Turnus survient, voit le carnage qu'on fait de ses troupes, tue Bitias et repousse les Troyens dans leurs retranchemens. Il entre lui-même parmi la foule des fuyards et en tue un grand nombre. Ils s'aperçoivent enfin qu'il est seul et veulent l'accabler; il se bat en retraite, et, comme la porte du camp étoit refermée, il se retire du côté du Tibre, se jette tout armé dans ce fleuve, le passe à la nage, et rejoint son armée.

CEPENDANT Junon envoie Iris à Túrnus : il

étoit alors assis dans un bois consacré à Pilumnus, un de ses aïeux, et se reposoit au fond d'une vallée agréable. « Turnus, lui dit-elle, le basard seul te présente une occasion qu'au

cune divinité n'auroit osé te promettre. Énée est absent; il est allé chercher du secours chez le roi Évandre; il a même pénétré jusque chez les Tyrrhéniens, pour se mettre à la tête d'une multitude de paysans, auxquels il fait prendre les armes. Que tardes-tu? monte sur ton char, vole et attaque son camp effrayé. »

Elle dit, et soudain de son aile brillante

Trace en arc radieux sa route étincelante. (*)

Le héros la reconnoît, la suit des yeux, et s'écrie en lui tendant les bras:

« Noble ornement du ciel, messagère sacrée !
Quel dieu t'envoie ici de la voûte azurée ?
Quel torrent de clartés vient éclairer les cieux!
Je vois, je vois s'ouvrir la demeure des dieux.
Quel que soit au combat le pouvoir qui m'appelle,
A ses ordres sacrés Turnus sera

Marchons vers le rivage. » (**)

fidèle:

En achevant ces mots, il s'avance vers le fleuve, enlève l'eau de sa surface pour se purifier, et adresse ses vœux aux divinités de l'Olympe.

Déjà ses guerriers s'avançoient à cheval dans un ordre brillant, et leurs habits, enrichis d'or et de broderie, éclatoient au loin dans toute la campagne. Messape paroît à la tête de l'avant-garde; l'arrière-garde est conduite par les fils de Tyr

(*) Delille.

(**) Delille.

rhée, et Turnus, qui commande au centre, passe les autres capitaines de toute sa tête.

[ocr errors]

Ainsi, paisible roi de sept fleuves divers,

Le Gange avec orgueil roule dans les déserts:

Tel s'avance le Nil, quand des plaines fécondes
Dans son lit de cristal il rappelle les ondes. (*)

Les Troyens, du haut de leurs remparts, voient cette armée qui s'avance contre eux, et qui, dans sa marche, obscurcit le ciel d'un nuage épais de poussière.

Caïcus, en sentinelle sur le rempart, s'écria: « Aux armes, aux armes, citoyens, voilà l'ennemi; montez sur les remparts!

Aussi les Troyens ferment les portes, et se retirent dans le camp, suivant l'ordre qu'Énée leur avoit donné en partant. Ce grand capitaine leur avoit défendu de sortir de leurs retranchemens, et d'engager aucun combat; et malgré leur courage, ils mirent une barrière entre eux et l'ennemi. Turnus, qui, suivi de vingt cavaliers choisis, avoit devancé le corps de l'armée, paroît inopinément devant la ville, monté sur un superbe cheval, et se fait reconnoître à l'aigrette rouge qui flotte sur son casque doré. « Qui de dit-il aux autres cavaliers, attaquera le premier les Troyens ? » En même temps il lance son javelot en l'air, pour défier les ennemis. Ce

vous,

(*) H. Gaston.

« 前へ次へ »