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qui donne un caractère plus particulièrement descriptif à ce second recueil.

On ne peut songer aux bois, à la chasse, sans évoquer Weber. Il semble qu'en publiant son œuvre, Heller n'ait pas échappé à l'influence de ce grand musicien. Les Bois plairont peut-être généralement moins que les Promenades d'un solitaire. La pensée pourtant est plus élevée, l'expression musicale plus puissante. Beaucoup de pièces appelleraient la traduction orchestrale. Notons le n° 1 de l'œuvre 86, plein de mystère et de poésie, le n° 3 énergique et passionné, le no 6 d'une harmonie si fine et si distinguée, et le beau finale qui rappelle et résume les différents motifs du recueil.

Les diverses pièces de l'œuvre 128 ont des titres : l'Entrée en forêt, la Promenade du chasseur, la Fleur solitaire, le Retour sont des inspirations charmantes. Le dernier recueil (op. 136) offre un intérêt tout particulier : l'auteur a songé aux personnages du Freyschütz: Agathe, Max, Gaspard, Annette. Il s'est inspiré de certaines situations du livret, et, appropriant son style aux mêmes données, il a essayé, dans une proportion plus restreinte, de lutter avec son illustre devancier. C'était hardi. Nous ne prétendons pas que le tableau de chevalet égale la grande toile du maître, mais il faut reconnaître que Heller a su être intéressant dans des conditions si difficiles.

Il y a d'autres pièces de Heller dans le style pastoral: ce sont trois Eglogues (op. 92), dédiées à M. Lecouppey, d'un caractère bien fin et bien délicat; - deux Scènes pastorales (op. 50), moins travaillées, moins délicatement ciselées, mais d'une allure très-franche et d'un effet plus sûr; des Bergeries (op. 106), petites pièces fort originales qu'il serait inté

ressant de comparer aux Bagatelles de Beethoven, si remarquables malgré leur titre modeste.

La pensée de Heller revêt très-volontiers la forme de lied (1). Beaucoup de ses pièces, quel que soit le nom qu'il a cru devoir leur donner, sont bien des lieder dans le sens le plus élevé. Cette forme, tout allemande, est une des plus heureuses qu'on ait imaginées en dehors des formes classiques; c'est un cadre de proportions modestes, mais dans lequel des artistes de génie comme Schubert, Mendelssohn et Schumann ont souvent renfermé tout un drame. L'œuvre 73 de Heller est bien intéressante à ce titre : rien de plus suave que son Chant du berceau, de plus dramatique que son Chant du soldat et de plus vigoureux que le Chant du chasseur. Ces trois petits poëmes sont exquis.

public ait appréciée et

Heller peint volontiers la chasse. Dans ses Bois, il n'a eu garde d'y manquer; il a écrit un morceau de chasse (op. 102) et enfin la Chasse, étude caractéristique (op. 29). Ce morceau remarquable a été, pour ainsi dire, la première pièce de Heller que le adoptée. Pendant longtemps les amateurs, les artistes même ne connaissaient que la Chasse, le reste passait inaperçu. Même encore certaines personnes ne se doutent pas qu'à côté de la Chasse, il y a une montagne de belle et charmante musique, où l'auteur a mis tout son cœur, déployé les plus rares qualités inventives, la sensibilité la plus exquise. Heller est l'auteur de la Chasse, comme autrefois, en France, Schuberth était l'auteur de la Sérénade. On ne saurait

(1) Heller a écrit dans sa jeunesse unc cinquantaine de lieder qui n'ont jamais été publiés, ni en Allemagne ni en France.

dire ce qu'il en coûte parfois à un artiste d'avoir composé une pièce à succès: on a jeté vingt ans à la tête de Berlioz sa Marche des pèlerins; c'était un texte commode pour déprécier le reste.

ΧΙ

Les dix-huit morceaux qui composent le recueil des Nuits blanches (op.82) n'ont aucune prétention descriptive. Ce sont des effusions lyriques, des pièces toutes de sentiment. La forme en est belle et la mélodie presque toujours remarquable.

Les trois recueils que nous venons de citer, les Promenades d'un solitaire, les Bois et les Nuits blanches, feront époque dans l'histoire de la musique, parce que l'artiste a été réellement inventeur. Dans ces pièces la forme est absolument nouvelle ce n'est pas la romance sans paroles, ce n'est pas le nocturne, c'est une conception tout à fait originale, qui appartient en propre à Heller, comme on peut dire que la romance sans paroles appartient à Mendelssohn. On n'avait jamais rien écrit de semblable avant lui, et si des pièces de ce genre ont été écrites dans ces derniers temps, on peut affirmer que Heller en a été le réel initiateur.

Sous le chiffre d'œuvres 126, Heller a composé, pour le piano, trois ouvertures de styles différents, l'une pour un drame, l'autre pour une pastorale, la troisième pour un opéra comique. Il a prouvé par cette tentative qu'il pouvait parfaitement atteindre le style symphonique. De ces trois pièces, celle qui

nous paraît supérieure est l'ouverture destinée à un drame. Nous allons réunir dans une même étude un certain nombre de pièces, de différentes formes et de diverses dimensions, que l'auteur eût été fort embarrassé de classer luimême, et auxquelles il a donné des titres très-vagues, ne pouvant faire autrement.

Six feuillets d'album (op. 83).-Nous eussions intitulé Préludes ces charmantes compositions très-courtes qui rappellent les meilleurs inspirations de l'œuvre 81 publiée antérieure

ment.

Pour un Album (op. 110). Deux morceaux, l'un assez développé, en style élevé, sombre, mais un peu froid, le second très-court Allegretto con tenerezza.

Petit album (op. 134).- Ici nous trouvons la plus grande diversité de genres: une Novelette (titre emprunté à Schumann), un Scherzo, une Romance, une Arabesque, Question, Réponse. Est-ce une illusion du titre? Il nous a semblé que la première pièce (Novelette) rappelait tout à fait le style de Schumann dans ses premières mesures. La Romance est charmante, mais les deux pièces qui nous paraissent les plus intéressantes sont les deux dernières : Question, Réponse. C'est la seconde fois que le musicien emploie cet artifice. L'idée est ingénieuse et l'effet très-heureux, presque saisissant.

Album à la jeunesse (op. 138).—Encore un titre à la Schumann; vingt-cinq pièces en quatre livres, avec des titres explicatifs vingt-cinq petits joyaux ciselés avec un soin extrême et une rare perfection. La série intitulée Tziganyi (les Bohémiens) est particulièrement intéressante.

Feuilles volantes (op. 126). Cinq morceaux plus développés, d'un caractère un peu vague, mais d'une poésie qui

n'est pas sans charmes. Le n° 3, fa majeur, est une pièce tout à fait remarquable.

Deux cahiers (op. 114). -Contenant un prélude très-beau comme toutes les œuvres de Heller qui portent ce nom; une pièce avec un titre emprunté à Schumann (kinder-scenen), charmante et naïve. La troisième pièce (presto scherzozo) n'est pas à la hauteur des Scherzi précédemment analysés.

Op. 111. Morceaux de ballet.-Recueil très-beau, très-symphonique. Convenablement orchestré, il constituerait un remarquable intermède, surtout si l'on adjoignait comme finale la troisième pièce de l'œuvre 118, qui est, n'en déplaise à l'auteur, un véritable morceau de virtuose, difficile et de grand effet. On pourrait néanmoins l'adapter à l'orchestre; ce serait une excellente conclusion à l'œuvre 111, dont la dernière pièce finit pianissimo. Les autres pièces de l'œuvre 118, intitulées Boutade, Feuillet d'album, sont très-courtes. Le Feuillet d'album est une romance sans paroles, d'un joli caractère.

Op. 124, Scènes d'enfant. -Encore un titre que le compositeur a emprunté à Schumann, dont les scènes d'enfants. sont si connues et si remarquables. Il était dangereux de lutter avec un pareil modèle. On ne saurait méconnaître, cependant, que les kinder-scenen de notre compositeur sont intéressantes, mélodieuses, bien rhythmées; l'auteur n'a pas mis de titre à ces pièces, et c'est à dessein. Il n'a voulu que peindre l'enfance en général, sa naïveté, son inconscience, tandis que Schumann, dans chaque tableau, a eu un but précis et déterminé qu'il indique.

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