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cours, en un mot, à la virtuosité. Or, Heller n'aime pas la virtuosité. Là où la virtuosité apparaît trop, pense-t-il, le peñseur s'efface; -donc pas de virtuosité.

Il y a du vrai dans cette manière d'envisager l'art. Il est évident que si l'on s'attache trop à l'effet matériel, on néglige la pensée. Mais est-il absolument sage de renoncer à tout jamais. à ce procédé? Un pianiste devra-t-il proscrire impitoyablement le trait brillant, le passage, comme disent les Allemands? Il est certain qu'une certaine école, qui tend à disparaître, en avait abusé au point d'étouffer la pensée sous les ornements, en admettant toutefois qu'il y eût une pensée cachée.

Le trait, cependant, peut être mélodieux par lui-même ou, encore, accentuer, sous-entendre, rappeler une pensée déjà émise. S'il est bien rhythmé, symétrique, n'est-il pas un repos pour l'auditeur, un temps d'arrêt qui lui permet, pendant que son oreille est doucement caressée, de méditer l'idée première du compositeur, d'en prévoir, d'en attendre le retour; et combien de traits délicieux de Hummel, de Field, de Chopin ne sont pas eux-mêmes de véritables mélodies!

En supprimant, de parti pris, tout ce qui touche à ce genre de virtuosité, on en arrive fatalement à diminuer les proportions de l'œuvre, car l'oreille ne pourrait longtemps se complaire en des œuvres de longue haleine où il n'y aurait jamais un instant de repos ou de détente.

Nous savons bien que la grandeur n'est que chose relative, que tout est affaire de proportions, de symétrie, que la beauté peut résider aussi bien dans une symphonie que dans un lied et qu'un tableau de Meissonier peut valoir une toile d'Ingres.

Gardons-nous néanmoins d'exagérer les conséquences de

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ce principe. Nos yeux et nos oreilles sont faits à de certaines proportions qu'il ne faut pas restreindre à plaisir.

Ces réserves faites sur certaines œuvres minuscules de Heller, nous voudrions caractériser le rôle de cet éminent artiste et lui assigner un rang parmi les maîtres.

Question

Est-ce un classique, est-ce un romantique? que l'on se serait gravement posée, il y a quelques vingt ans. Aujourd'hui, il n'est pas plus question des classiques et des romantiques au dix-neuvième siècle que de la grande querelle des Gluckistes et des Piccinnistes au dix-huitième : Querelles de mots et non de choses. Heller est tout simplement un grand artiste qui a voulu et qui a su être

novateur.

L'art n'est pas circonscrit dans des limites étroites qu'il soit à jamais interdit de franchir. Les purs classiques étaient insensés quand ils ne concevaient, pour les manifestations de l'art, que certaines formes convenues. Les romantiques n'étaient pas plus sages lorsqu'ils proscrivaient d'une manière absolue ces formes consacrées par le temps, par l'expérience, par l'admiration de tous les siècles.

Il est certain qne si l'on veut écrire une sonate, un trio un qnatuor, une symphonie, dans une autre forme que celle qui fut illustrée par Haydn, Mozart, Beethoven, Mendelssohn, on court grand risque de faire fausse route et de manquer l'effet. Un jour Beethoven, .infidèle à sa propre tradition, imagina de mêler les voix aux instruments, dans la symphonie ; il ne commit qu'une grosse erreur, erreur sublime, tempérée par le génie, si l'on veut, mais que l'on doit condamner au nom des principes. Mendelssohn eut le tort de vouloir l'imiter.

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Dans des temps plus rapprochés, Berlioz, un incontestable génie, écrivit des symphonies en dehors de toute les règles suivies jusqu'alors; il oublia que le discours musical, comme le discours parlé, obéit à des prescriptions inviolables, qu'il lui faut une exposition, un développement suivi, raisonné, sagement réglé, une conclusion. Il oublia que la musique, comme l'architecture, doit obéir aux lois de la symétrie et de la répétition, sans lesquelles il n'y a pas de belle ordonnance : — Il voulut décrire et toujours décrire. Malgré la vogue tardive dont ses œuvres jouissent aujourd'hui, nous croyons que sa tentative restera stérile, et qu'on en reviendra à la symphonie des vieux maîtres.

Donc il y a certaines formes musicales qui sont dès à présent fixées et qu'il faut respecter. Mais ce qui n'est pas interdit, c'est de rechercher des formes nouvelles, pour les ajouter au trésor déjà acquis.

Beethoven créa pour ainsi dire le scherzo qui détrôna l'ancien menuet; -Mendelsohn immortalisa une forme nouvelle, la romance sans paroles; - dans les derniers temps, Felicien David inventa l'Ode-Symphonie; - parmi les pianistes, Chopin fut en quelque sorte l'inventeur de l'impromptu; Heller, de ces délicieuses formules sous lesquelles il a présenté ses Bois et ses Promenades d'un solitaire; Schumann a créé des formes nouvelles dans ses Scènes d'enfants, son Carnaval, etc. Heller est donc classique, en ce sens qu'il admet et respecte les vieilles formes consacrées par l'expérience. Vest de la jeune école, il est romantique, en ce sens qu'il à trouvé des formes nouvelles qui resteront acquises à l'art.

Il pouvait être un grand symphoniste; il n'a pas voulu l'être : il est resté un pianiste comme Chopin. La postérité lui donnera

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STEPHEN HELLER, SA VIE ET SES ŒUVRES.

une moindre page que celle qui lui eût été assignée s'il avait exprimé sa pensée avec des moyens plus grandioses, s'il eût exploré toutes les grandes formes de l'art. Mais être un pianiste comme le furent Mendelssohn, Schumann, Chopin, est-ce déjà si peu? et combien, avec un lourd bagage, occupent une place moins lumineuse dans le ciel de l'art!

Gl 2-4

APPENDICE

4.

5.

CATALOGUE DES OEUVRES COMPOSÉES PAR STEPHEN HELLER (1).

Op. 1.

2.

Thème de Paganini varié. | Op. 20.
Les Charmes de Ham-
bourg, rondeau.

3. Fantaisie dramatique sur
des thèmes des opéras:
Sémiramide, la Muette.
Variations sur une valse.
Variations sur un Theme
polonais.

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21.

Deux Impromptus sur

Bergeronette du même.

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22.

Quatre rondos sur la Fa

23.

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24.

Scherzo (deuxième).

6. Variation sur Zampa.

23.

Paraphrase sur Richard

8.

7. Trois Impromptus.
Rondo scherzo (premier).

26. Deuxième paraphrase

9.

Première Sonate.

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Coeur-de-Lion.

sur Richard Coeur-deLion.

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(1) Ces œuvres sont pour la plupart publiées chez les éditeurs Brandus, Maho, Lemoine et Schott.

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