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Ce vers a fait croire à plusieurs commentateurs que les portes du temple de Janus ayant été fermées par la paix, l'an de Rome 725, cette année fat l'époque où Virgile écrivit le premier livre de l'Enéide; mais ce n'est là qu'une conjecture. Le temple de Janus fut fermé trois fois par Auguste: il nę l'avait été que deux fois depuis Numa.

Louis Racine a faiblement imité Virgile, dans ces vers du ive chant de la Religion:

Il est fermé, ce temple où, par cent noeuds d'airain,
La Discorde attachée, et déplorant en vain

Tant de complots détruits, tant de fureurs trompées,
Gémit sur un amas de lances et d'épées.

On remarquera que le discours de Jupiter contient une seconde exposition du sujet de l'Énéide. Delille la trouve convenable, parce qu'elle est, dit-il, plus imposante dans la bouche du souverain des dieux qu'elle ne l'avait été dans celle du poète. Mais Virgile revient trop souvent sur le sujet de son poëme : Junon, Jupiter, Vénus, Apollon, le grand-prêtre Helenus, Céleno, reine des Har-pyes, la Sibylle, d'autres oracles, et Anchise, annoncent successivement le but de l'entreprise, ses difficultés et ses résultats. 45.- Page 26. Cui mater media sese tulit obvia silva.

On peut comparer ce tableau si gracieux à celui qui, dans le VIIe livre de l'Odyssée, représente Minerve apparaissant à Ulysse sous les traits d'une jeune bergère, portant une urne sur la tête, et racontant au roi d'Ithaque l'histoire d'Alcinoüs.

46. — Page 26. ..... Volucremque fuga prævertitur Eurum.

Les anciennes éditions ont Hebrum au lieu d'Eurum. Daniel Huet a remarqué, après Servius, que l'Hèbre de Thrace a un cours fort lent, et que la légèreté d'Harpalyce était singulièrement exprimée par ce vers. Le savant évêque d'Avranches le corrigeait ainsi heureusement: **

...Volucremque fuga prævertitur Eurum.

« Elle était, dans sa fuite, plus rapide que le vent. »

J'ai cru devoir adopter cette correction, à l'exemple des quatre professeurs et de Binet, qui n'a guère fait que remanier leur version.

II. a

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Heliez, dans sa Géographie de Virgile, se trompe en faisant de l'Hèbre de Thrace un fleuve très-rapide. Né au pied de l'Hémus, l'Hèbre, qui roula dans ses flots la tête d'Orphée, coule entre l'Hémus et le Rhodope, arrose Philippopol's et Olympiade (aujourd'hui Andrinople), et se jette dans la mer Égée, près d'Enos, vis-à-vis l'île de Samothrace. Virgile a semblé commettre une autre erreur dans sa comparaison. L'Hèbre est dans la Thrace européenne, et les Amazones habitaient la Thrace asiatique.

47.- Page 28. Purpureoque alte suras vincire cothurno.

Livius Andronicus avait dit :

Jam nunc purpureo suras include cothurno;

et Virgile dit encore dans la vie églogue, v.

Puniceo stabis suras evincta cothurno.

32:

C'était le cothurne de chasse de la Diane des anciens.

48. Page 28. Punica regna vides.

Les Carthaginois étaient une colonie de Tyriens. Virgile n'ignorait pas qu'Élise, plus connue sous le nom de Didon, fille de Belus II, roi de Tyr, vivait plus de 300 ans après la guerre de Troie ; mais profitant de l'obscurité des temps héroïques, le poète a feint qu'Énée et Didon étaient contemporains, afin de pouvoir faire entrer dans son épopée les grands intérêts qui divisèrent Rome et Carthage.

49.—Page 28. Huic conjux Sychæus erat, ditissimus agri

Phonicum.

Huet croit qu'il faut lire ditissimus auri. Les Phéniciens, dit-” il, étaient riches par le grand commerce qu'ils faisaient dans la Méditerranée : c'est un fait dont tous les auteurs anciens conviennent; mais ils possédaient peu de biens en fonds, et leur domination était peu étendue du côté des terres. D'ailleurs, comme d'autres critiques l'ont remarqué, lorsque Virgile parle des motifs qui portèrent Pygmalion à faire mourir son frère Sichée, il dit que c'était pour avoir son or:

Ille Sychæum

Impius ante aras, atque auri cæcus amore,
Clam ferro incautum superat.

Justin, qui rapporte l'histoire de Sichée (liv. xviii), raconte que ce prince possédait de grandes richesses, mais qu'il les tenait cachées. Il ajoute qu'on ne savait où était son trésor, qu'il ne le gardait pas dans son palais, mais qu'on soupçonnait qu'il avait beaucoup d'or et d'argent. C'est aussi ce que dit Virgile:

8 Tellure recludit

Thesauros, ignotum argenti pondus et auri.

Parlant ensuite du départ de Didon et de ses compagnons, le poète ajoute:

Naves, quæ forte paratæ,

Corripiunt, onerantque auro portantur avari

Pygmalionis opes pelago."

La correction ditissimus auri, proposée par Huet, paraît avoir dû être le texte primitif, qu'auraient depuis altéré les copistes.

Sichée, nommé aussi Sicharbas, était fils de Phatmis, frère de Belus et prêtre d'Hercule. C'est ainsi que le roi Helenus était en même temps prêtre d'Apollon. Les premiers Césars réunissaient le pontificat à l'empire."

Lorsque Élise bâtissait la ville de Carthage, ses sujets la pressèrent d'épouser Iarbas, roi de Mauritanie. Mais, fidèle à la mémoire de Sichée, elle demanda trois mois de délai, et employa ce temps à préparer ses funérailles : elle se tua d'un coup de poignard, et c'est alors que son nom d'Élise fut changé en celui de Didon, qui signifie femme de résolution.

L'histoire de Didon, racontée par Vénus, prépare avec art les évènemens du Ive livre.

50.- Page 28.

Ominibus.

.Primisque jugarat

Allusion à la coutume des Romains, qui, avant toute entreprise importante, consultaient les dieux par le vol ou par le chant des oiseaux, ou par l'inspection des entrailles des victimes.

51.- Page 30.

.....

Ora modis attollens pallida miris.

On trouve dans Lucrèce.:

.Simulacra modis pallentia miris.

52

--

Page 30.

Facti de nomine Byrsam.

Le nom de Byrsu, donné à la citadelle de Carthage, signifie en grec cuir, et de ce mot est venu celui de bourse, sans doute parce que les premières bourses, furent faites de cuir.

Le conte de la ruse employée par Didon, pour tromper Iarbas, semble avoir été imaginé par les Romains, au temps des guerres puniques, pour faire connaître la mauvaise foi des Carthaginois. Didon achète le terrain que peut contenir la peau d'un bœuf, et fait couper cette peau en lanières très-fines: mais, quelque déliées qu'elles fussent, elles ne pouvaient renfermer la vaste enceinte que Virgile donne à Carthage, ornée de temples, de théâtres, de palais de places, d'un port, etc. Cette ville fut long-temps appelée Carthada, qui signifie, en phénicien, ville nouvelle. Il est prouvé par l'histoire que des colonies de Tyriens s'étaient établies sur les côtes d'Afrique, long-temps avant l'arrivée de Didon.

Gaston s'excuse de n'avoir pas traduit la fable de la peau de bœuf, sous prétexte que cette circonstance ne peut nous intéresser, et que ces détails résistent à la noblesse de notre style épique. Il ajoute: « Je me permets rarement de supprimer, d'ajouter à un poète qui avait une si juste mesure des choses: mais le latin exprime ici, en deux vers, ce qui demanderait en français une longue périphrase.... J'ai pratiqué ici le précepte de Delille. » Mais il ne suit pas son exemple, car Delille a traduit ainsi ces deux vers:

53.

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Et leur ruse innocente achète autant d'espace

Que la peau d'un taureau, dépouillé par leur main,
Pourrait, en s'étendant, embrasser de terrain :
Leur ville en prit le nom.

- Page 30. Ante diem clauso componet vesper Olympo.

Le discours d'Enée à sa mère semble imité de celui qu'Ulysse adresse à Nausicaa (Odyssée, liv. vi).

il ne

La poésie vit d'images. Dans la traduction en vers d'un poëme, faut pas effacer celles qui s'y trouvent. Virgile peint l'étoile du soir chassant le jour, et les portes de l'Olympe fermées pendant la nuit. Delille se contente de dire:

Dans ce triste récit j'épuiserais le jour.

L'image a disparu.

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Cette épithète de pius, souvent donnée au héros par le poète, est devenue comme son prénom. Horace l'appelle chaste, sans doute parce qu'il sacrifia sa femme et sa maîtresse à la volonté des dieux :

Castus Æneas, patriæ superstes.

(Carmen Seculare, v. 42.)

Dans l'antiquité, les hommes célèbres se décernaient eux-mêmes l'immortalité, sans blesser les convenances et les usages reçus. Ulysse, dans l'Odyssée, dit devant Alcinous : « Je suis Ulysse, fils de Laërte, connu de tous les mortels par mon adresse, et dont la gloire s'élève jusqu'aux astres. » Horace (Odes, liv. 111, ode 30) parle du monument, plus durable que l'airain, qu'il s'est élevé par ses écrits:

Exegi monumentum ære perennius.

Ovide n'est pas plus modeste à la fin de ses Métamorphoses.
Parmi les modernes, Corneille a dit avec fierté:

Je ne dois qu'à moi seul toute ma renommée.

55.- Page 32. Italiam quæro patriam, et genus ab Jove summo.

Virgile suit ici la fable qui faisait descendre Dardanus de Corythe, Tyrrhénien. Il revient sur cette origine (liv. 11, v. 620; liv. 111, v. 94 et 170; liv. 1v, v. 45; liv. vII, v. 209 et 240; liv. v111, v. 134). 56.- Page 32. Aspice bis senos lætantes agmine cycnos.

Servius et Lacerda expliquent cet augure en disant que le cygne était toujours, pour les nautoniers, d'un présage heureux, parce qu'il ne plonge jamais son corps dans les ondes, quia nunquam mergitur undis. Cet oiseau était d'ailleurs, comme la colombe, attelé au char de Vénns. Le nombre des cygnes montré par la déesse est celui des vaisseaux que la tempête avait séparés de ceux avec lesquels Énée venait d'aborder aux rivages libyens. Le vaisseau d'Oronte avait péri sous les yeux du héros.

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57.- Page 32. Dixit, et avertens rosea cervice refulsit.

Les anciens croyaient qu'on ne pouvait reconnaître les dieux

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