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de ce dont nous pouvons juger ne leur appartient quelquefois pas, et le seul mérite qui soit réellement à eux il est presque impossible que Mais revenons à nos nous puissions l'apprécier avec certitude!

chèvres.

Pour suivre ce que je disois toute à l'heure de cette distinction, on peut remarquer un autre mérite de ces Mémoires, indépendamment de celui de son auteur; c'est d'être les premières relations que nous ayons tant soit peu détaillées de notre continent; j'entends par là l'Angleterre, la France, la Suisse, l'Allemagne, les Pays Bas. C'est là où il faut aller puiser le gouvernement, la religion, les mœurs, &c. de nos ancêtres, et voir au moins en partie la façon dont ils sont passé sous le joug des Romains. Le morceau surtout où César nous décrit les mœurs (1) Cesar.Com- des Gaulois et des Germains (1) est admirable, celui sur ceux des Bretons ne l'est pas moins. (2)

ment. de Bell. Gall. 1. vi.

p. 222-249.

(2) Idem. 1. v. p: 166.

P. 134.

Je ferai deux remarques sur un couple d'endroits de César. 1. César, en parlant de sa guerre avec les Usipetes et les Tencteri, paroît (3) Idem. 1. iv. déguiser un peu les choses. Il assure (3) que quand il fit saisir les chefs des ennemis qui étoient venus dans son camp sur la foi d'une trève. On pensoit bien de cela à Rome, puisque Caton opinat en plein sénat pour qu'on le renvoyât lié et garotté aux Germains, comme un homme qui avoit déshonoré la foi de la république, par une perfidie insigne. En tout cas, n'auroit-il pas mieux fait de se souvenir de ce qu'il avoit dit en sénat quelques années auparavant? "Bellis Punicis omnibus cum sæpe Carthaginienses et in pace et per inducias, multa nefanda facinora fecissent, nunquam ipsi par occasionem talia fecere, magis (4) Sallust. Bell. quod se dignum, quam quod in illos jure fieri posset, quærebant." (4) Mais on peut bien dire par rapport à tous les discours publics ce que Cicéron disoit de ceux du barreau. "Sed errat vehementer si quis in orationibus nostris auctoritates nostras consignat se habere arbitratur." (5) Car, continue-t-il, ces harangues sont celles des causes et des tems, et non pas des hommes ni des advocats. 2. La description que César donne des Druides Gaulois ressemble si parfaitement à celle du clergé catholique qu'on seroit presque tenté de croire que ceux-ci avoient formé leur conduite sur celle de leurs prédécesseurs payens. Mais comme on ne lisoit guères César dans le onzième siècle, contentons-nous de dire que les clergés de tous les siècles et les peuples de

Catilin. c. 51.

(5) Cicero pro Cluent. c. 50.

tous

tous les siècles se ressemblent assez,

Rassemblons

Bell. Gall. 1. v.

les traits principaux de cette description des Druides. (1) 1, Ils (1) Cesar. de avoient entre leurs mains l'éducation de la jeunesse qui ne sortoit p. 224. jamais de leurs écoles que remplis d'une profonde vénération pour leurs maîtres. 2. Ils s'étoient rendus juges de presque tous les procés civils et criminels. 3. Ils se servoient de l'excommunication envers les contravenans, laquelle inspiroit au peuple une si grande horreur pour le coupable, qu'il se voyoit séparé de tout commerce civil. 4. Ils avoient un chef qui avoit une grande autorité. A sa mort on lui choisissoit un successeur entre les Druides les plus distingués. 5. Ils étoient exempts du service militaire. 6. Ils ne payoient point d'impôts et jouissoient de toute sorte d'immunités. Je m'étonne que le Père Hardouin n'ait point allégué cette description comme une preuve de son système. (2) Le rusé Archontius Severus (3) auroit bien pu fabriquer un César, pour y insérer ce passage, qui représente, d'une façon bien odieuse, le système de l'hiérarchie Romaine enveloppée sous le nom de Druides Gaulois. Ce père a bien fait d'objections qui ne valoient pas celle-là.

position de tous les anciens au

(2) De la Sup

teurs.

(3) L'Empereur

Frederic II.

Gall. I. viii. p.

1. Epist. 3.

(6) Tacitus in (7) Strabo. in

Germ. Morib.

- Voici deux remarques de Lipsius. 1. Hirtius, en parlant des Bellovaci, (4) dit qu'ils prirent leurs fascines," ubi consederant, nam in (4) De Bell. acie sedere Gallos consuesse, superioribus commentariis declaratum 363. est." La difficulté est bien forte; comment concevoir une armée rangée en ordre de bataille, chacun assis sur sa fascine? Cela devoit être impossible aussi bien que ridicule. Lipsius voudroit donc (5) que (5) Epist. Cent. par acies on n'entendit pas l'armée rangée en bataille, selon la signification usitée de ce mot, mais seulement le tems de la guerre en général, et il apporte deux passages l'un de Tacite, (6) l'autre de Strabon, (7) pour prouver que c'étoit là une chose qui distinguoit les Romains des barbares, ceux-ci étant presque toujours assis dans leurs camps, au lieu que les premiers s'y promenoient beaucoup. Il croit pourtant que pour in on pourroit lire ante aciem. 2. Dans ce que César dit des machines qu'il employoit pour prendre Marseilles, il parle d'un musculus ou galerie destinée à protéger ceux qui devoient sapper les murailles de la ville, laquelle devoit avoir eu, suivant la lection ordinaire, soixante pieds de longueur. (8) Lipsius trouve cela beaucoup trop, et (8) Cesar. de rapporte p. 534.

3A 2

Lib. iii.

Bell. Civ. 1. ii.

(1) Cité par Montanus ad loc.

(2) Cesar. de

rapporte plusieurs raisons tirées du nom, des proportions et de l'usage de cette pièce pour autoriser le changement qu'il a fait de LX. en IX. (1) César, (2) parlant de Metellus Scipio, dit qu'il prit le titre d'empereur: Detrimentis quibusdam circa montem Amanum acBell. Civ. 1. iii. ceptis sese imperatorem appellaverat." Cela paroît manquer de sens, puisque les généraux ne prenoient jamais ce titre qu'après quelques avantages considérables. Ursinus voudroit qu'au lieu de detrimentis (3) Ursinus ad on lut emolumentis, (3) qui s'y trouve opposé en Cicéron. (4)

p. 609.

locum.

(4) Lib. iii. de

Finibus.

CORNELII NEPOTIS Vita Excellentium Imperatorum, Observationibus et
Notis Commentatorum. Lugduni Batavorum. 1728.

Nous savons très peu de chose de la personne de cet écrivain, sinon qu'il étoit de la Gaule Cisalpine, (de Verone selon quelques uns,) et qu'il a vécu du tems de Jules César et au commencement du règne d'Auguste. Il paroît que c'étoit un auteur fort fertile. Les anciens nous parlent d'un assez grand nombre de livres de sa façon qui avoient la plûpart l'histoire pour objet. Mais de tout cela il ne nous reste plus que les vies de vingt fameux généraux Grecs, de deux Carthaginois, du premier Caton, et de T. Pomponius Atticus, Elles sont toutes très peu détaillées, quoiqu'on y trouve des particularités très curieuses qui ne se rencontrent nulle part ailleurs, et que leur auteur sache fort bien l'art de renfermer bien des choses en peu de place, de façon qu'on est quelquefois tenté de lui appliquer ce qu'il dit lui-même des inscriptions d'Atticus: "vix credendum esse tantas res tam breviter potuisse declarari." (1) Il excelle dans cet art, la difficulté duquel rend les bons abrégés si peu communs, celui de saisir les traits qui peignent les hommes et les événemens, et de savoir laisser à l'écart toutes les circonstances qui ne font qu'embarrasser une narration et détourner l'attention du lecteur du principal sur l'accessoire. Le ca(2) In Alcibiad. ractère d'Alcibiade (2) est réellement tel que Tite Live n'en auroit pas honte. Pour son style, sans être beau, (ce qui n'auroit pas convenu à son ouvrage,) il ne laisse pas de marquer un écrivain du siècle de la belle latinité, et de le rendre (à n'envisager que cela) très propre à être mis entre les mains des jeunes gens. On ne peut guères décider

(1) In Attic. cap. 18.

cap. 11.

de

(1) In Ages. c. 4.

c. 8.

de sa fidélité, comme tout ce que nous avons de lui ne roule que sur des tems dont l'éloignement à tout égard ne lui donnoit point de préjugés, et n'ayant qu'à travailler avec un esprit de critique sur les mémoires des auteurs plus anciens, ce qu'il paroît qu'il a assez eu soin de faire. Une chose qu'il faut dire à sa louange c'est qu'il paroît avoir été fort bien intentionné pour la république. Il prend occasion plus d'une fois de faire, à l'occasion des faits qu'il rapporte, (et c'étoit là tout ce que son sujet lui permettoit,) des réflexions qui décèlent assez clairement ses véritables sentimens. Une fois, (1) en rapportant la soumission qu'Agésilaus témoigna aux ordres des Ephores Spartiates, en s'arrêtant au milieu de ses conquêtes pour revenir chez lui, il sou-. haite que les généraux de son tems eussent suivi ce bel exemple. César avoit donné assez lieu à ce souhait. Dans un autre endroit (2) il com- (2) In Eumen. pare l'insolence du phalange Macédonien après la mort d'Alexandre, à celle des vétérans de son tems, qui fut, comme on sait, une des principales causes de la ruine de la république. Si dans la vie d'Atticus il se trouve obligé une fois de louer Auguste, c'est en quatre mots qu'il le fait encore y ajoute-t-il une modification qui ne devoit guères être du goût de ce prince: en parlant de sa fortune il dit qu'elle lui avoit donné tout à ce quoi un citoyen Romain pouvoit parvenir. (3) N'étoit- (3) In Attic. c. ce pas le reprocher tacitement de son ambition? Cette vie d'Atticus, où se trouve cette louange, est beaucoup plus longue que toutes les autres, et comme avec cela il n'avoit à décrire que les événemens peu variés d'une vie privée, il pouvoit entrer dans un assez grand détail sur le caractère et les mœurs de cet homme singulier, qui à su si bien se rendre célèbre sans le secours d'aucune action éclatante. Aussi l'a-t-il fait jusqu'à nous apprendre la dépense journalière de sa maison. Elle montoit (4) à quatre mille cinq cens livres argent de Suisse ; (5) somme très petite, considérée en elle-même, puisque son domestique étoit fort nombreux, mais qui nous donne une bien grande idée de sa modération si nous nous souvenons qu'il étoit de la même ville et du même siècle que ce Lucullus qui mangea à un seul repas plus de cinq fois autant. (6) (6) 50,000 deAtticus démentit, par sa conduite, les calomnies de ceux qui accusoient les Epicuréens de placer leur souverain bonheur dans la jouissance des plaisirs sensuels. Il leur fit voir qu'un vrai philosophe de cette secte

regardoit

19.

(4) Ibid. c. 13. par mois.

(5) 3000 asses

narii.

(1) Dans son Cæsarion, au

second tome de ses Oeuvres.

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regardoit une volupté délicate et un loisir studieux comme seuls capables de rendre heureux un homme raisonnable. Ce n'est point ici la place d'entreprendre la justification d'Atticus contre les sanglantes accusations de l'Abbé de St. Real, (1) et dans lesquelles il paroît avoir eu bien des sectateurs. Aussi je ne le ferai pas. Je dirai seulement (après avoir remarqué qu'il étoit bien difficile pour un honnête homme de prendre un parti quand il n'y en avoit aucun qui pensa au bien public) que s'il est difficile de justifier sa conduite en tout, il ne l'est pas moins de s'empêcher d'aimer son caractère. Il en est tout autrement des Catons; en lisant leur vie nous devenons plus aisément leurs admirateurs que leurs imitateurs. Le danger est plutôt de l'autre côté ici.

Dans les derniers siècles notre auteur a eu un sort bien différent de celui de bien d'autres. Nous avons regardé beaucoup de fictions modernes comme des pièces authentiques de l'antiquité, ici un écrivain a risqué de se voir enlever son propre ouvrage. Plusieurs critiques, trompés par les titres des anciens manuscrits, ont cru que ces vies des fameux généraux étoient, non pas de Cornelius Nepos, mais d'un certain Æmilius Probus qui doit avoir vécu sous l'empire de Théodose et lui avoir présenté son livre. Mais aujourd'hui on est généralement revenu de cette opinion, et on rend à Nepos ce qui est à Nepos. La . seule latinité de son livre seroit bien assez pour nous convaincre qu'il ne pouvoit jamais être écrivain du siècle de Théodose. Elle suffit pour prouver l'antiquité de Quinte Curce, et avec raison, car il est très sûr qu'il y a quinze cens ans qu'on n'écrit plus comme cela en Latin. Mais nous en avons bien d'autres raisons. Supposons pour un moment qu'Æmilius Probus soit l'auteur de ce livre, que lui fait-on faire? On le fait se vanter d'avoir été lié fort familièrement avec Atticus, qui vécut cinquante ans avant l'ère Chrétienne, dans le même ouvrage qu'il présente à l'Empereur Théodose, qui mourut près de quatre cens ans après cette ère. Certainement ou Æmilius Probus ou nos critiques avoient un coup de marteau. Je ne dis rien de ces passages des vies que j'ai déjà cités par rapport aux généraux Romains, aux vétérans, à Auguste, tous très convenables au siècle de Nepos, mais ridicules dans celui de Probus. Les vers de Probus, qui se trouvent dans tous les

anciens

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