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parmi le peuple qui leur donnoit l'espérance de pouvoir réussir. Suetone nous le fournit, ce principe. Et en effet je ne connois qu'un motif de religion capable de réchauffer tout un peuple, et de le faire persister dans le mépris des plus grands dangers. 2. Cette conduite sévère des Romains est aussi singulière. Leur politique et peut-être aussi leur orgueil les engageoit à traiter les vaincus avec bonté quelque opiniâtre qu'eût été leur résistance: "parcere subjectis et debellare superbos." Parmi tous les autres peuples de l'Italie je ne connois guères que ceux de Capoue qu'ils ayent traité avec une pareille rigueur. (1) Or les Capouens étoient encore pour eux non seulement un objet de haine mais de crainte. (2) Ainsi il est presque nécessaire contr. Rullum. de supposer quelque chose de pareil au sujet des Véliternes. Mais on

(1) Tit. Liv. 1. xxvi. c. 34. (2) Cicero de Leg. Agrar.

ji. c. 82.

(3) Sueton. ], xi. c. 1.

ne conçoit guères comment ce petit peuple pouvoit leur inspirer de l'effroi qu'à l'aide de leur propre fanatisme, et de la superstition des Romains, qui craignoient cette prédiction, et qui cherchoient à en empêcher l'accomplissement.

Cependant elle s'est accomplie. Velitræ a donné au monde un maître dans la personne d'Auguste dont la famille étoit de cette ville. (3) Quelle conséquence faut-il en tirer? Nous pouvons y puiser une leçon non moins utile que les précédentes.* Bien des peuples ont eu leurs prédictions d'un roi qui devoit gouverner le monde. Le hasard ou quelquefois l'envie qu'on a eu de les accomplir en a fait réussir, sans qu'une puissance surnaturelle s'en soit mêlé (car personne je crois ne la fera intervenir dans celle d'Auguste.) Apprenons par-là peser long tems les prophéties avant que d'en conclure quelque chose, et souvenons que plusieurs toutes humaines ont pu réussir quoique très peu vraisemblables dans le tems qu'on les a faites.

à

* Bien des prédictions ont fait espérer à bien des peuples de donner un roi à la terre. Parmi un nombre infini d'événemens possibles, il y en a qui n'arriveront pas moins pour avoir été prédits, surtout lorsque les hommes, après s'être laissés subjuguer par les préjugés, règlent leurs actions par ces mêmes préjugés et deviennent les ministres d'un destin dont ils avoient été les auteurs. Souvenons-nous surtout, c'est ici qu'on ne peut trop souvent inculquer cette leçon de la réponse de Diagoras au superstitieux de son tems: il Jui montroit les monumens de la reconnoissance de ceux que Neptune avoit conservé des tempêtes: Que te faut-il encore, impie, lui disoit-il, pour te convaincre de la providence des Dieux? Rien, répliqua-t-il, si ce n'est de me faire voir les portraits des ceux qui ont invoqué Neptune, et qui sont péris en l'invoquant.

RE

REMARQUES CRITIQUES SUR LES DIGNITES SACER-
DOTALES DE JULES CESAR.

ASSEZ d'historiens et de critiques ont considéré César à la tête des armées. Envisageons-le un moment au pied des autels, et discutons, en peu de mots, ce que les anciens nous ont laissé au sujet de ses dignités sacerdotales.

c. 1. Vell. Pater.

César perdit son père, dit Suétone (1) à l'age de seize ans. Dans sa (1) Sueton. L. i. première jeunesse il avoit épousé une certaine Cossutia, fille des plus Hist. Rom. riches, mais dont la famille n'étoit que de l'ordre des chevaliers. L. ii. c. 43. Cinna, alors maître et seul maître depuis la mort de Marius, voyant que la naissance attachoit César à son parti,* et qu'il étoit capable d'en être un jour le soutien, résolut de l'y attacher encore davantage en lui donnant sa fille Cornelia en mariage: il falloit pour cela répudier Cossutia: César le fit, et la dignité de flamen Dialis, la troisième de l'hiérarchie Romaine, fut le prix de sa complaisance. Sylla revient en Italie; son caractère lui inspiroit des désirs ardens de vengeance, sa victoire le mettoit en état de les assouvir. Soit amour, soit fierté, César ne voulut jamais abandonner sa Cornelia; son refus lui coûta son pontificat, ses biens de famille, et risqua de lui coûter la vie. Dans ce petit récit je n'ai point fait attention à Plutarque, qui veut que César ne briguât le flaminiat qu'après le retour de Sylla, qui le fit échouer pour se venger. (2) L'autorité de Plutarque, surtout dans l'histoire (2) Plutarq. Romaine, n'est pas faite pour balancer un moment celle de Suétone et Illustr. traduct.

de Velleius Paterculus.

de

J'ai dégagé ce récit d'une petite difficulté de chronologie. Il faut y revenir un moment. Velleius prétend que César fut nommé au flaminiat, "creatus," par Marius et Cinna. Or il est clair par le passage Suétone que César n'eut l'assurance de cette dignité que dans le quátrième consulat de Cinna, savoir, A. U. C. Varr. 670. Fort bien. Mais malheureusement il se trouve que Marius étoit mort au com

* Marius avoit épousé Julia, la tante de César.

3 F 2

mencement

Vies d'Hom.

de Dacier. Tom. vi. p. 184.

mencement de A. U. C. 668. On pourroit affecter de mépriser la difficulté en disant qu'elle se trouve dans un passage manifestement corrompu. Mais il n'y auroit pas là de l'équité. On pourroit avoir recours au système du Cardinal Norris que César fut fait flamen avant la première victoire de Sylla, à l'age de douze ans ; mais le célèbre Burman a fait voir son peu d'accord avec les anciens monumens. En voici un autre: Marius s'empara de Rome en 667, et le flamen Merula se donna la mort. La place de flamen ne devoit pas rester longtems vuide, vu le grand besoin qu'on en avoit toujours. Marius et Cinna le remplacèrent aussitôt par le jeune César; mais comme il n'avoit pas encore pris la toge virile, on fit faire ses fonctions à quelque autre. César enfin la prit à la fin de sa seizième année, savoir au commencement de l'an 670, et du quatrième consulat de Cinna. On prit aussitôt de nouvelles mesures pour lui assurer cette dignité, mais la mort de Cinna, qui fut tué cette même année, dans une sédition de ses soldats, les rompit toutes avant sa consécration, et la guerre civile qui survint l'année suivante en fit perdre toute espérance. Peut-être si nous étions plus au fait du droit pontifical des Romains sentirions-nous une différence entre le creatus de Velleius et le destinatus de Suétone, qui confirmeroit ce que je viens de dire; peut-être se détruiroit-elle. Aussi l'ai-je donné moins comme un système que je m'engage de défendre que comme une hypothèse qui résout assez naturellement la difficulté. On peut voir assez par l'exemple de César qu'il n'y avoit point d'age fixe pour la dignité de flamen Dialis, puisqu'à ne nous en tenir qu'à ce que nous savons bien sûrement César la posséda avant l'age de dix-sept ans. Je crois que cette réflexion peut s'étendre à toutes les autres dignités sacerdotales chez les Romains. Pour le pontificat, nous croyons que le jeune Octavien étoit pontife avant vingt ans, et nous savons d'ailleurs qu'il fut nommé à cet emploi à la place de Cn. Domitius tué à la bataille de Pharsale A. U. C. 706; et qu'il en prit possession le jour même qu'il quitta la prætexta pour la toge virile à l'entrée de sa seizième année. On auroit même mauvaise grace de dire que le pouvoir absolu du dictateur son oncle le dispensa des loix. César n'étoit pas encore absolu, et dans ce tems-là le petit-fils de sa sœur lui étoit peu cher. Quant aux augures, Cicéron pria Brutus de laisser venir à Rome son fils alors à l'armée, afin qu'il pût prétendre à l'augurat.

Ce

Ce fils couroit alors sa vingt-unième année; et cet exemple est d'autant plus considérable que l'on voit par le reste de la lettre l'attention et le soin qu'avoit Cicéron de ne point manquer aux loix. J'avoue naturellement ma surprise que Numa n'ait pas songé à fixer un age plus convenable pour les ministres de la religion. Encore en Egypte ou dans la Judée, où les prêtres faisoient un corps dont tous les membres succoient l'esprit de leur état avec le lait, les abus n'auroient pas été aussi grands; mais à Rome, où leur état ne les engageoit à rien, l'age en auroit tenu la place. Mais quel frein avoient les jeunes gens?

On a dit que depuis la mort de Merula, (car César ne fut point consacré,) la place de flamen Dialis resta vuide pendant soixante et douze ans. Est-il vrai? On me cite les autorités accablantes de Suétone, de Dion, de Tacite. La première est la plus considérable, puisque le nom de Suétone réveille l'idée d'un historien assez hardi pour ne pas taire les plus grandes vérités, assez instruit pour n'en pas oublier les plus petites. Mais Suétone se contente de dire qu'Auguste rétablit plusieurs anciennes cérémonies, et entr'autres l'emploi de flamen Dialis. Dion et Tacite disent positivement qu'il n'y eut point de flamen Dialis entre Merula et celui qu'Auguste fit élire. Mais on peut leur opposer le témoignage positif de Cicéron qui parloit d'un fait qu'il ne pouvoit ignorer. "Est ergo flanen," dit-il au sénat assemblé, "ut Jovi, ut Marti, ut Quirino, sic divo Julio M. Antonius." On voit qu'il parle d'un flamen actuel et non point d'une dignité presque tombée dans l'oubli. On auroit tort d'opposer Cicéron à lui-même, et dire que Cicéron, dans le dénombrement qu'il fait du collège des pontifes, ne parle point du flamen Dialis. On auroit tort de fixer une cause particulière à une omission qui pouvoit en avoir cent autres.

PRIN

PRINCIPES

DES POIDS, DES MONNOIES, ET DES MESURES DES

ANCIENS,

AVEC DES TABLES CONSTRUITES SUR CES PRINCIPES.

Liste des auteurs. GREAVES.

EISENSCHIDT.

I. *

Il est des études qui n'augmentent point les connoissances, ou du
moins ne les augmentent, qu'en écartant ces obstacles dont la bizarrerie
des hommes en a hérissés la route de toutes parts. Telle est l'étude
des langues, utile si on la méprise, dangereuse si on l'admire. La dif-
férence des poids et des mesures est un nouveau langage, aussi barbare
et plus ridicule que les autres.
les autres. Les idées décident des mots. Mais
pour ces signes d'institution les idées sont ou seroient facilement les
mêmes. Cependant puisqu'il est établi, apprenons-la (cette langue)
en murmurant. Elle nous servira d'interprète dans la géographie, le
commerce, et l'économique des anciens, objets intéressans dont la con-
noissance nous empêchera de voir dans les anciens des sauvages ou des
demi-dieux.

J'écris en François, parcequ'on y a assez besoin de quelque chose sur ce sujet, pour ne pas me chicaner sur sa bonté. Je me sers sans façon des idées qui m'ont plues chez mes devanciers. Je les ai enchassées dans les miennes. On n'aura pas de peine à les reconnoître. Voici les principaux auteurs chez qui j'ai puisé.

M. Greaves sur le Pied et Denier Romain, en Anglois. Petit livre mais excellent. M. Greaves possédoit les talens d'un bon faiseur d'expériences. Exact jusqu'à la superstition, patient, laborieux, habile, et sincère, il croyoit n'avoir rien vu dans un objet qu'il n'y eut tout vu. On peut cependant faire plus de fonds sur son témoignage que sur sa critique.

M. Eisenschidt de Ponderibus et Mensuris Veterum.

La première

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